L'Enfant miroir (1990) : le test complet du DVD

The Reflecting Skin

Réalisé par Philip Ridley
Avec Viggo Mortensen, Lindsay Duncan et Jeremy Cooper

Édité par Blaq Out

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Le 13/01/2016
Critique

L'Enfant miroir

Dans l’Amérique rurale des années 50, Seth, un enfant rêveur et farceur, élevé par un père violent et une mère abusive, échafaude des hypothèses farfelues à propos des villageois qui l’entourent. Il est ainsi convaincu que sa mystérieuse voisine Dolphin Blue qui vit seule sur le bord de la route est un vampire…

D’abord peintre exposé et écrivain publié avant d’être cinéaste, Philip Ridley doit autant à Edward Hopper, Andrew Wyeth, Ray Bradbury, Philip K. Dick et Lewis Carroll qu’à La Nuit du chasseur et David Lynch. Pour son premier long-métrage, conte d’apprentissage sur fond d’innocence perdue, il n’hésite pas à faire surgir étrangeté, danger et macabre en plein milieu de ses champs de blés d’or illuminés par un soleil éclatant. Ou comment raconter une histoire d’épouvante dans de magnifiques paysages.

L’année 1990 est déterminante pour le comédien Viggo Mortensen. S’il s’est d’abord fait remarquer en 1985 dans Witness de Peter Weir, il explose littéralement avec L’Enfant miroir (The Reflecting Skin). 25 ans après sa sortie, ce chef-d’oeuvre gothique n’en finit pas d’éblouir les sens et demeure miraculeux dans le sens où il parvient à préserver l’essentiel de ses secrets.

Si l’intrigue est supposée se dérouler dans la campagne de l’Idaho, l’équipe a en réalité posé ses valises à Alberta, une province de l’Ouest du Canada. Le chef opérateur Dick Pope (Secrets et mensonges, Another Year) semble avoir réalisé sa photo à l’aide de pinceaux et de gouaches. Chaque cadre de Philip Ridley enferme ses personnages dans de véritables tableaux qui reflètent l’imaginaire quelque peu psychotique d’un adulte qui se penche sur son enfance perturbée. Bien avant le cinéma de Guillermo del Toro et à l’instar de nombreux roman de Stephen King, L’Enfant miroir confronte la magie enfantine (thème récurrent dans l’oeuvre de Philip Ridley) à la dure réalité. La perte de l’innocence, la mort, le deuil, le meurtre, la découverte de la sexualité, sont au coeur de ce premier, merveilleux et pourtant trop méconnu long métrage.

Le réalisateur ne cesse de déjouer les attentes du spectateur en jouant avec les mythes, les croyances, les tons, les ruptures, les fantasmes. A la fois lumineux et sombre, léger et profondément mélancolique, doux et pourtant d’une violence parfois inouïe, L’Enfant miroir est une oeuvre d’une insondable richesse, un récit initiatique terrible qui se termine dans un cri de résolution, tandis que retentit la musique envoûtante de Nick Bicât.

Depuis 1990, Philip Ridley n’a réalisé que deux long métrages, Darkly Noon - Le jour du châtiment en 1995 et Heartless en 2009. Sélectionné à la Semaine de la Critique à Cannes et récompensé par le Léopard d’Argent à Locarno, L’Enfant miroir mérite plus que jamais d’être redécouvert.

L'Enfant miroir

Présentation - 5,0 / 5

L’éditeur soigne une fois de plus l’une de ses sorties dans les bacs. Le DVD repose dans un superbe slim-digipack illustré par Emre Orhun, très élégant, jusqu’à la sérigraphie du disque. Le menu principal est quant à lui fixe et musical. Signalons que Blaq Out inaugure ici une nouvelle collection intitulée Blaq Market, proposant des oeuvres inclassables et déroutantes qui transcendent les styles et les genres, des cinéastes singuliers aux thèmes et à l’identité formelle affirmés. «  Une collection turbulente pour amateurs de nouveaux horizons, d’étrangetés ou de sensations fortes  » indique l’éditeur.

Bonus - 4,0 / 5

En première partie de cette section, Blaq Out propose un entretien exclusif avec Philip Ridley (21’) durant lequel le réalisateur de L’Enfant miroir revient sur la genèse et la production de son premier long métrage. Les paysages, les couleurs, les symboles, les partis pris esthétiques, tout est passé au crible avec une passion contagieuse qui donne sérieusement envie de revoir le film avec ces nouvelles clés.

L’éditeur joint également deux courts métrages de Philip Ridley :

Le premier, Visiting Mr. Beak (1987, 20’) a pour personnage principal un jeune garçon qui court dans les rues de Londres pour montrer sa «  découverte  » à Mr. Beak, mais quelques individus sont bien décidés à lui barrer la route. Un panneau en introduction indique que Visiting Mr. Beak a été retrouvé par miracle chez le directeur de la photographie du film. Le reste du matériel étant soit perdu soit dans un état déplorable. Restauré dans les limites du possible sous la supervision de Philip Ridley, ce court-métrage impose d’emblée un style et une ambiance particulière, en évoquant quelques thèmes que l’on retrouvera trois ans plus tard dans L’Enfant miroir.

Le second court métrage est The Universe of Dermot Finn (1989, 11’). Dermott Finn retrouve son amie Pearl pour prendre le thé. Sa famille va pour le moins se montrer excentrique. Nous retrouvons ici le thème de la famille cher à Philip Ridley, qui s’amuse ici à mettre en parallèle deux points de vue sur différents modes de vie. Ainsi ce qui peut sembler déroutant, surréaliste et inquiétant chez l’un, peut sembler normal chez l’autre. Un vrai bijou d’humour noir.

L'Enfant miroir

Image - 4,0 / 5

L’image de cette version restaurée 2K sous la supervision du réalisateur Philip Ridley affiche une propreté indéniable et les couleurs souvent ravivées. Alors certes le piqué manque parfois de mordant, mais la définition demeure impressionnante et la profondeur de champ permet d’apprécier chaque composition des cadres. Si les contrastes sont parfois un peu poreux et que le grain d’origine a parfois été trop lissé à notre goût, la colorimétrie retrouve un éclat et une chaleur inédits, un équilibre indéniable (malgré des visages un peu rosés), un étalonnage beaucoup plus conforme aux partis pris esthétiques originaux.

Son - 3,5 / 5

Les mixages anglais et français Stéréo sont propres et distillent parfaitement la bande originale. La piste anglaise est la plus équilibrée du lot avec une homogénéité entre les dialogues et les bruitages. Au jeu des différences, la version française (au doublage peu convaincant) s’avère plus couverte et certaines ambiances et d’autres effets annexes peinent à se faire entendre quand on compare avec la piste anglaise. La piste originale est dynamique et le niveau des dialogues plus plaisant.

L'Enfant miroir

Crédits images : © Blaq Out

Configuration de test
  • Téléviseur 16/9 Sony LCD Bravia KDL-32W5710
  • Sony BDP-5350
  • Ampli Pioneer VSX-520
  • Kit enceintes/caisson Mosscade (configuration 5.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 81 cm