Alfred Hitchcock présente - Les inédits - Intégrale saison 1 - 32 épisodes (1962) : le test complet du DVD

Réalisé par Bernard Girard
Avec Alfred Hitchcock, Robert Redford et Jeffrey Hunter

Édité par Elephant Films

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Le 02/11/2018
Critique

Alfred Hitchcock présente - Les inédits - Intégrale saison 1

Elephant Films a réussi son pari : éditer en France l’ensemble de la série TV (SAGA(hitchcock_presente)) (1955 à 1965) déjà édité aux USA en DVD par Universal. Elle comporte 7 premières saisons d’épisodes de 30 minutes (25 minutes sans les publicités) tournées de 1955 à 1962 = 268 histoires (268 seulement car la quatrième saison ne comportait que 36 histoires au lieu de 39) et 3 saisons d’épisodes de 60 minutes (environ 50 ou 52 minutes sans les publicités) tournées de 1962 à 1965 = 93 histoires donc au total 361 histoires relevant de la série noire policière dont toutes les tonalités (y compris la comédie policière ou la terreur, voire la parabole et même le fantastique) sont exploitées, servies par des cinéastes réputés et d’autres moins connus mais très honorables, servies aussi par un casting comprenant les plus grandes vedettes de la période mais aussi des acteurs moins connus mais pourtant excellents.

Ces 3 dernières saisons de 1962 à 1965 sont nommées Alfred Hitchcock présente : les Inédits (The Alfred Hitchcock Hour) en raison de la durée d’une heure des 93 téléfilms qui la composent (concernant leur appellation américaine), en raison aussi du fait que la très grands majorité de ces histoires était inédite en France jusqu’à présent. L’ensemble est passionnant, historiquement comme esthétiquement.

Voici la critique de l’intégralité des 32 épisodes de cette saison 1.

Ils sont numérotés par l’éditeur dans leur ordre chronologique de présentation télévisée, ce qui donne à l’ensemble une remarquable valeur d’histoire du cinéma. Précisons à nouveau que certains titres (peu nombreux) ne sont pas inédits puisqu’ils sont dotés d’une VF d’époque et d’un titre d’exploitation TV français, ce dernier étant mentionné, lorsqu’il existe, avant le titre original américain. Mais il s’agit, encore une fois, d’une infime minorité de titres. La majorité, à savoir les titres présentés seulement en VOSTF, était bel et bien inédite chez nous. Le n° de la saison précède le n° de l’épisode, suivi de son titre américain (de son titre français entre crochets lorsqu’il fut télédiffusé chez nous), des noms du réalisateur, du scénariste et / ou de l’écrivain adapté, celui des vedettes masculines et féminines, suivis d’une notice historique et critique.

Alfred Hitchcock présente - Les inédits - Intégrale saison 1

SAISON 1, VOLUME 1 (septembre 1962 à janvier 1963)

1.01 - A Piece of the Action (20 septembre 1962 VOSTF) de Bernard Girard avec Robert Redford, Gig Young, Martha Hyer, Gene Evans, etc. L’épouse d’un joueur professionnel lui demande de cesser son activité au moment où son frère cadet veut prendre sa place. Il décide de l’en décourager. Scénario de Oliver H.P. Barrett, inspiré par celui du La Rue de la chance (1930) de John Cromwell d’une part, aussi par L’Arnaqueur (1961) de Robert Rossen qui avait dépeint tout récemment le milieu des joueurs professionnels. Redford avait débuté à la TV en 1960. Il a ici le second rôle derrière Gig Young ; tous deux sont excellents. On comprend en outre ici pourquoi l’actrice Martha Hyer avait fasciné le cinéaste R. W. Fassbinder au point qu’il ait tourné un film auquel il donna son prénom comme titre. Bernard Girard, dont la mise en scène est solide, s’est essayé au cinéma fantastique dans A Name For Evil (1973) avec Robert Culp et Samantha Eggar. Le casting est composé de quatre acteurs principaux : deux étaient emblématiques des années 1950 (Martha Hyer et Gene Evans) et deux le seront des années 1960-1975 (Robert Redford, Gig Young).

1.02 - Chez les fous (Don’t Look Behind You) (VF/VOSTF) de John Brahm, scénario de Barré Lyndon d’après une histoire de Samuel Rogers, avec Jeffrey Hunter, Vera Miles, Abraham Sofaer, Dick Sargent, etc. Deux jeunes filles sont assassinées dans un parc jouxtant un campus universitaire. On suspecte un professeur de musique et un professeur de chimie. Un professeur de psychopathologie décide d’utiliser sa fiancée Daphné comme appât pour découvrir la véritable identité du tueur. Réalisé par un cinéaste à qui on devait déjà des classiques du cinéma fantastique américain des années 1940-1950 (The Lodger (Jack l’éventreur) en 1944, Hangover Square en 1945, the Mad Magician en 1954) et une dizaine d’épisodes de Alfred Hitchock presents entre 1959 et 1961. Le scénario instaure déjà les éléments thématiques de séries cinéma telles que Halloween, Vendredi 13 et Scream que la critique contemporaine dénomme « slashers ». En réalité, l’air du temps s’y prêtait puisque la même année, Mario Bava adaptait au cinéma le genre littéraire du « giallo » grâce à La Fille qui en savait trop, bientôt suivi par Six femmes pour l’assassin. Brahm retravaille de l’intérieur le mythe de Jack l’éventreur, s’intéressant à une étrange contamination du psychologue par sa propre matière, la psychopathologie. L’ensemble est fascinant, On a reproché à cet épisode son manque relatif de suspense : c’est au contraire un des plus rigoureux et des mieux écrits, sans parler de l’interprétation, de haute volée et comme toujours parfaite dans cette série. Du point de vue de l’histoire du cinéma fantastique, le personnage de Dave, musicien inquiétant qui fascine les jeunes femmes lorsqu’il joue du piano, a peut-être bien inspiré le personnage du vampire pianiste dans Le Baiser du vampire produit l’année suivante en Angleterre en 1963 par la Hammer Films. Dick Sargent qui interprète le rôle est excellent. Vera Miles est à nouveau photographiée par John Russel, comme elle l’avait été dans Psychose en 1960. Gordon Hessler, lecteur et producteur exécutif de nombreux épisodes de The Alfred Hitchcock Hour, passera au cinéma comme réalisateur en 1965 avec Catacombs, son premier film noir à tendance fantastique avant ses deux chefs-d’oeuvre Scream and Scream Again (Lâchez les monstres) (1969) et The Oblong Box (Le Cercueil vivant) (1970). La voix française de Hitchcock est doublée avec un ridicule accent anglais qui rend insupportable ses apparitions dans la VF d’époque. Le reste du doublage est excellent, avec des voix de première classe, y compris Vera Miles doublée par la voix française de Marilyn Monroe, reconnaissable entre mille et qui lui convenait si bien.

1.03 - Night of the Owl (1962 VOSTF) de A. Crosland Jr. scénario de Richard Fielder d’après une histoire de Andrew Garve, avec Brian Keith, Patricia Breslin, Mike Kellin, Philip Coolidge, etc. Un truand exerce un chantage envers les parents adoptifs d’une jeune fille à laquelle il est apparenté. Le réalisateur a signé 16 épisodes de la série antérieure Alfred Hitchcock présente. Scénario original maintenant une tension constante, fondé sur le thème tragique de la révélation des origines. Patricia Breslin et Brian Keith remarquables tous les deux, Mike Kellin diabolique et très inquiétant en dégénéré névrosé. Mise en scène en revanche assez standardisée mais maintenant néanmoins bien le suspense.

1.04 - J’ai tout vu (I Saw the Whole Thing) (VF+VOSTF) 1962 de A. Hitchcock, scénario de Henry Slesar d’après une histoire de Henry Cecil, avec John Forsythe, Ken Smith, Evans Evans, etc. Un accident de voiture meurtrier, causé par un écrivain de romans policiers, donne matière à un procès au cours duquel l’accusé décide de réfuter lui-même chaque témoin : il a une bonne raison pour agir ainsi. L’unique épisode de The Alfred Hitchcock Hour réalisé par le maître lui-même, intéressé par un scénario adapté d’une histoire originale de Henry Cecil (l’auteur de Le Crampon, éditions Gallimard, collection série noire-NRF, traduction française Paris 1968) dont la structure est celle du classique japonais Rashomon d’Akira Kurosawa, à savoir une histoire racontée par plusieurs témoins dont les récits modifient à chaque fois le sens de l’action et faisant rebondir le suspense. Le « final twist » (retournement final) est une très belle idée. John Forsythe sera en 1966 l’un des protagonistes américains du Topaz (L’Etau) d’Alfred Hitchcock.

1.05 - Le Traquenard (Captive Audience) (VF+VOSTF) de Alf Kjellin, scénario de William Link et Richard Levinson d’après un roman de John Bingham, avec Angie Dickinson, James Mason, Arnold Moss, Ed Nelson, etc. Un écrivain adresse à son éditeur d’étranges enregistrements lui expliquant l’intrigue de son prochain roman autobiographique… à moins qu’il ne s’agisse de la confession d’un crime sur le point de se produire ? Scénario alambiqué et invraisemblable, à peine sauvé par le plan final qui fait basculer l’ensemble dans la folie. Le casting est en revanche savoureux : une star confirmée des années 1940-1950 (James Mason qui surjoue ici d’une manière assez inhabituelle) opposé à une starlette montante (Angie Dickinson) à l’érotisme toujours aussi ravageur. Un tel casting signale d’emblée l’impact publicitaire de la série auprès du grand public de l’époque. Quelques effets spéciaux photographiques bien réalisés alternent avec des plans au classicisme hollywoodien raffiné.
1.06 - Final Vow (VOSTF) de Norman Lloyd, scénario de Henry Slesar d’après son histoire, avec Carol Lynley, Clu Galager, Don Hanmer, Carmen Phillips, etc. Deux bonnes soeurs se font dérober dans une gare de chemin de fer, une statuette religieuse qu’un gangster repenti voulait offrir à une troisième soeur à l’agonie. L’une d’elles décide de la récupérer… coûte que coûte ! Les thèmes alliés de la foi catholique et de la culpabilité face au mal étaient déjà le coeur du scénario d’un des films cinéma d’Hitchcock les plus célèbres : I Confess (La Loi du silence) (1953). On les retrouve évidemment ici mais l’épisode vaut surtout par l’interprétation de Carol Linley et celle de Clu Galager. La surprise partie populaire et son érotisme agressif valent aussi le détour. La chute, avec son effet de circularité, est intelligente et bien exploitée. Lloyd était un des producteurs exécutifs de la série, ici passé à la réalisation.

Alfred Hitchcock présente - Les inédits - Intégrale saison 1

1.07 -

Annabelle (Annabel) (VF+VOSTF) de Paul Henreid, scénario Robert Bloch d’après un roman de Patricia Highsmith, avec Dean Stockwell, Susan Oliver, Kathleen Nolan, Gary Cockrell, etc. Un jeune chimiste est amoureux fou - l’expression étant à prendre aux deux sens du terme - d’une femme mariée. Le chaînon intermédiaire, pour le spectateur français cinéphile, entre le roman de Patricia Highsmith This Sweet Sickness paru en 1960 (traduit en français en 1966 sous le titre Ce mal étrange) et sa remarquable adaptation cinéma Dites-lui que je l’aime (Fr. 1977) de Claude Miller, film noir français qui avait été un succès critique mais un échec commercial. Dans ce moyen métrage de Henreid comme dans le long métrage de Miller, l’adaptation prend certaines libertés avec le matériel littéraire d’origine. Robert Bloch en a ici tiré une sorte de conte macabre acide alors que le scénario de Miller sera un drame psychologique fouillé, pathétique puis tragique. L’acteur et cinéaste Paul Henreid dont la bio-filmographie viennoise puis hollywoodienne est loin de se limiter à un second rôle dans Casablanca (1942), avait notamment contribué au film noir américain avec son extraordinaire interprétation psychanalytique et faustienne à la fois, en vedette dans Le Balafré (Hollow Triumph, 1945) de Steve Sekely. Bien que cet épisode appartienne à la série TV The Alfred Hitchcok Hour, le mot Hour est curieusement absent du générique d’ouverture. Enfin, notons que Henreid avait déjà réalisé plusieurs épisodes, à partir de 1957, de la précédente série TV Alfred Hitchcock presents.

1.08 - HouseGuest (VOSTF) de A. Crosland Jr., scénario de H. Slesar et M. Brandell d’après un roman original de A. Garve, avec MacDonald Carey, Adele Mara, Robert Sterling, etc. Un homme sauve de la noyade le petit garçon d’un couple dirigeant une école privée californienne. Le sauveteur, devenu invité d’honneur, se présente comme un ancien aviateur de l’US Airforce mais il s’avère être en réalité un diabolique maître-chanteur. Scénario cauchemardesque, un peu invraisemblable mais traité à un rythme haletant qui ne laisse pas au spectateur le temps de se poser de questions. Bonne mise en scène, fine et dynamique à la fois, direction photo honorable prenant le temps de soigner certains plans. De l’ensemble des acteurs, tous bons, se détache McDonald Carey, excellent d’un bout à l’autre.

1.09 - The Black Curtain (VOSTF) de Sidney Pollack, scénario de J. Murcott d’après une histoire de Cornell Woolrich, avec Richard Basehart, Lola Albright, Harold J. Stone, etc. Un homme agressé par deux voyous dans une rue nocturne de New York s’avère amnésique. Il a oublié trois années de sa vie, obscurcies par un « rideau noir » mental. Déchirer ce rideau pourrait cependant lui être fatal. Pollack, pas encore l’un des réalisateurs les plus en vue des années 1970, a également réalisé l’épisode 1.22 de cette première saison : sa mise en scène est ici aérée, riche, ample, aisée, directe, dynamique. Cornell Woolrich (alias « William Irish ») est l’un des plus grands écrivains de série noire américaine du vingtième siècle, il a également touché au fantastique et à la criminalité psychopathologique (par exemple son roman L’Homme léopard adapté par Jacques Tourneur en 1943). Le scénario est, hélas, invraisemblable, convenue et emberlificotée : on ne croit que très peu aux personnages en dépit des acteurs, tous excellents y compris James Farentino dans un petit rôle de jeune voyou. Lola Albright est relativement méconnaissable car mal habillée et mal coiffée.

1.10 - L’Autre homme (Day of Reckoning) (VF+VOSTF) de Jerry Hopper, scénario de W. Link et R. Levinson d’après une histoire de John Garden, avec Barry Sullivan, Louis Hayward, Claude Akins, Dee Hartford, etc. Un homme jaloux, persuadé que son épouse a une liaison, la tue durant une croisière privée. L’enquête le lave de tout soupçon mais il décide pourtant d’avouer afin de soulager sa conscience : c’est alors que ses véritables ennuis commencent. Intéressant et original scénario, bien écrit et tenant compte des spécificités du droit américain d’une manière rigoureuse, bien joué (Barry Sullivan est, comme d’habitude, remarquable), bien mis en scène, très bien photographié par John Russel, notamment les plans nocturnes épurés du début. VF d’époque soignée mais il faut augmenter nettement son niveau sonore pour l’entendre distinctement, par rapport à celui de la piste originale VOSTF. Hopper avait réalisé dans les années 1950 des séries B pour le cinéma (films noirs, westerns, espionnage, aventures) avant de travailler pour la télévision à laquelle il consacra ensuite toute sa carrière, signant de multiples épisodes de séries américaines des années 1960 à 1975 (Les Incorruptibles, Le Fugitif, Voyage au fond des mers, Le Virginien, La Famille Adams, etc.). Du fait du succès vidéo des séries TV chez nous, la seconde partie de sa carrière devient progressivement plus accessible que la première partie qui pourrait pourtant réserver des surprises intéressantes (on pense à son Naked Alibi (Alibi meurtrier) de 1954 avec Gloria Grahame, Sterling Hayden, Gene Barrry… rien que le casting donne envie de le découvrir).

1.11 - Ride the Nightmare (VOSTF) de Bernard Girard, scénario de Richard Matheson d’après sa propre histoire (et non pas de R. Link et W. Levinson d’après Matheson, comme indiqué par erreur ans le dossier de presse), avec Gena Rowlands, Hugh O’Brian, John Anderson, Jay Lanin, etc. Un ancien gangster reçoit un appel téléphonique lui assurant que faute d’argent, il sera assassiné le soir-même. Sa jolie femme, qui ignore tout de son passé, le conjure d’appeler la police mais elle comprend vite que cela ne servirait pas à grand chose. Remarquable premier quart de l’épisode, photographié dans un magnifique clair-obscur contrasté digne des classiques du film noir américain, très bien joué par Gena Rowlands. Ensuite, les trois quarts suivants sont convenus et décevants sur tous les plans, surtout de la part d’un script signé Matheson. La présentation de Hitchcock - sans aucun rapport avec l’épisode et son histoire - est curieusement prémonitoire de l’état actuel du marché immobilier parisien.

1.12 - Hangover (VOSTF) de Bernard Girard, scénario de Lou Rambeau d’après des histoires de J.D. McDonald et C. Runyon, avec Tony Randall, Jane Mansfield, June Levant, Robert P. Lieb, Myron Healey, etc. Un publicitaire alcoolique découvre au petit matin une chaleureuse barmaid dans son salon, en train de prendre son petit-déjeuner. Il se souvient juste qu’il s’était disputé le matin précédent avec son épouse qui le menaçait de le quitter. Que s’est-il passé entre-temps ? Son cerveau abruti reconstitue progressivement, à mesure qu’il rencontre des témoins de sa journée antérieure, une chronologie qui s’avère meurtrière. Structure par retours en arrière, certes classique mais remarquablement écrite et réalisée. Excellente interprétation générale notamment de l’acteur Tony Randall. Le bonus suprême étant la présence de Jane Mansfield en barmaid sexy jouant (très bien) un personnage de fille sincère, primesautière mais réaliste qui aurait pu être écrit pour la Shirley McLaine de La Garçonnière ou la Kim Novak de Embrasse-moi, idiot !.

Alfred Hitchcock présente - Les inédits - Intégrale saison 1



1.13 - Bonfire (VOSTF) de Joseph Pevney,scénario de W. D. Gordon et A. Hayes d’après une histoire de V.S. Pritchett, avec Peter Falk, Dina Merrill, Patricia Collinge, Paul von Schreiber, etc. Une jeune femme emménage dans la maison de sa tante qui a été tuée par un prédicateur criminel : elle pourrait devenir sa seconde victime. Peter Falk (avant qu’il devienne célèbre dans le rôle de l’inspecteur Columbo à la TV américaine puis mondiale) tient un rôle inspiré - qu’il surjoue et dans lequel il est très étonnant - par celui que jouait Robert Mitchum en 1955 dans La Nuit du chasseur. Le fait qu’il se nomme « Robert Evans » est certainement une « private joke » (une plaisanterie à usage interne) à l’encontre du véritable Robert Evans qui présentait L’Homme aux mille visages (1957) de Pevney et qui devait devenir, une fois mis un terme à sa carrière d’acteur, producteur à la Paramount, y compris sur Le Parrain de Francis Ford Coppola.

1.14 - The Tender Poisoner (VOSTF décembre 1962) de Leonard J. Horn, scénario de Lucas Heller d’après un roman de John Bingham, avec Howard Duff, Jan Sterling, Phillip Reed, Dan Dailey, etc. Un homme marié décide d’empoisonner son épouse, pensant qu’elle ne supportera pas sa nouvelle liaison mais il commet l’erreur de présenter sa maîtresse à son meilleur ami. Un épisode en forme de comédie dramatique acide, durant lequel aucun des protagoniste ne parvient à envisager la réalité telle qu’elle est vraiment, sauf le héros passif puis franchement négatif joué par Duff. Rebondissement final inattendu, dramatiquement puissant mais assez invraisemblable. Duff (époux d’Ida Lupino et ancien amant d’Ava Gardner) avait été l’un des prisonniers filmés par Jules Dassin dans Les Démons de la liberté (1948), son premier grand rôle hollywoodien : il est ici, comme toujours, excellent acteur. Le réalisateur L. J. Horn qui avait débuté en réalisant un épisode de la série Alfred Hitchcock presents, fut ensuite un prolifique cinéastes de séries TV (Le Fugitif, Voyage au fond des mers, Mission : impossible, Mannix, L’Homme de fer, etc.) des années 1960 à 1975.

1.15 - The Thirty-First of February (VOSTF 4 janvier 1963) de A. Kjellin, scénario de Richard Matheson (sous le pseudonyme de « Logan Swanson ») d’après une histoire originale de Julian Symons, avec David Wayne, William Conrad, Elizabeth Allen, etc. Un publicitaire veuf - doté d’antécédents psychotiques - dont la femme est reconnue morte accidentellement à la suite d’une chute dans l’escalier de leur cave, est progressivement persécuté par un anonyme qui l’accuse d’avoir maquillé un meurtre en accident. Qu’en est-il vraiment ? Diabolique scénario - qui maintient le suspense intact jusqu’à la fin - écrit par Richard Matheson, adapté d’un roman de Julyan Simons. Dernier épisode de l’année 1962 de cette première saison. Casting intéressant : David Wayne (sans lien de parenté avec John Wayne) avait repris le rôle de Peter Lorre dans le remake du M de Fritz Lang, réalisé par Joseph Losey en 1951 : il est excellent en névrosé amené progressivement à la folie totale. William Conrad était l’un des deux tueurs au visages de brutes qui ouvraient le classique film noir policier The Killers (Les Tueurs) (1946) de Robert Siodmak, avant d’incarner l’inspecteur Cannon dans la série TV homonyme entre 1970 et 1975. La belle brune Elizabeth Allen a surtout travaillé pour la TV entre les années 1960 et 1980 ; au cinéma, elle est bientôt au générique de deux classiques signés John Ford : La Taverne de L’Irlandais (1963) et Les Cheyennes (1964). Mise en scène de Kjellin dynamique, classique, mais capable d’effets spectaculaires témoignant d’une inspiration assez baroque, flirtant avec le cinéma fantastique à l’occasion : le dédoublement en surimpression du visage d’Elisabeth Allen confondu par le fou avec celui de son épouse, est une idée simple mais ici techniquement très bien réalisée.

1.16 - What Really Happened (VOSTF) de Jack Smight, scénario de H. Sleasar d’après une histoire de Mary Belloc Lowndes avec Anne Francis, Ruth Roman, etc. Une gouvernante, menacée d’être renvoyée à cause de la mauvaise conduite de son petit garçon, empoisonne son employeur mais c’est l’épouse de ce dernier qui est accusée du meurtre. Hitchcock avait déjà adapté en 1926 son The Lodger (Les Cheveux d’or) à partir d’un roman de M.B. Lowndes mais il reprend aussi, durant les séquences du procès, la structure en souvenirs contradictoires déjà bien utilisée dans l’épisode 1.04 I Saw The Whole Thing (J’ai tout vu). L’actrice Ruth Roman avait joué en vedette dans Strangers on a train (L’Inconnu du Nord Express) (1950) le rôle de la fiancée du joueur de tennis compromis par un psychopathe. Treize ans plus tard, elle vaut encore le détour. Quant à Anne Francis, elle est alors au sommet de sa beauté. L’opposition de ces deux belles reines au casting suffit largement à justifier la vision de cet épisode, outre son excellent scénario reposant autant sur le suspense que sur la psychologie criminelle. Le cinéaste Jack Smight servit le film noir et le film fantastique dans les années 1965 à 1970 mais d’une manière inégale : il a, en revanche, signé d’excellents épisodes de cette série TV dont celui-là. La direction de la photo de William Margulies correspond, lorsqu’on lui laisse le temps de régler les éclairages sans inonder le plan d’une lumière uniforme (esthétique TV de base) à l’esthétique cinéma du film noir américain classique : Ruth Roman montant un escalier en clair-obscur inquiétant, le travelling sur le visage angoissé d’Anne Francis rompant brusquement une profondeur de champ soigneusement organisée, etc.

Alfred Hitchcock présente - Les inédits - Intégrale saison 1

SAISON 1, VOLUME 2 (janvier 1963 à mai 1963)

1.17- Brouillard (Forecast : Low Clouds and Coastal Fog) (18 janvier 1963 VF+VOSTF) de Charles F. Haas, scénario Lee Herwin avec Inger Stevens, Dan O’Herlihy, Richard Jaeckel, etc. Par une nuit de brouillard envahissant la plage où se dresse sa belle demeure face à la mer, l’épouse d’un homme absent ce soir-là (car en voyage d’affaires) craint d’ouvrir sa porte à un inconnu demandant du secours. Les conséquences seront dramatiques. Le scénario est très hitchcockien. Casting passionnant : Inger Stevens sera la star tragique de certains des meilleurs films de Don Siegel (Police sur la ville) et Ted Post (Pendez-les haut et court) à la fin des années 1960, Dan O’Herlihy jouera le sorcier dément de Halloween 3 Le sang du sorcier, Richard Jaeckel est l’un des acteurs fétiches de Robert Aldrich. L’acteur noir Greg Morris (qui tient un petit rôle de médecin dans lequel il est très bon) sera un des membres de l’équipe de la série TV Mission : impossible. La mise en scène est signée par un inconnu, dénuée de style mais fonctionnelle, efficace lorsqu’il le faut.

1.18 - A Tangled Web (VOSTF) de A. Kjellin, scénario de James Bridges, avec Robert Redford, Zohra Lampert, Barry Morse. Un fils de famille violent et névrosé, devenu voleur par goût du risque bien qu’il soit déjà riche, épouse sa domestique sans lui révéler qui il est vraiment. Elle finit par l’apprendre et il accepte de changer de vie mais son complice, amoureux de sa femme, s’arrange pour qu’il commette un meurtre. Redford est tout à fait étonnant en criminel conscient de l’être : il est en vedette cette fois-ci alors qu’il n’était qu’en second rôle dans l’épisode 1.01. De l’actrice Zohra Lampert (dans le rôle improbable d’une domestique française) émane une douceur naturelle, un érotisme authentique. Barry Morse compose un personnage proche de celui de Iago dans La Tragédie d’Othello de William Shakespeare. Scénario (tragique lui aussi, d’un bout à l’autre, mais relativement invraisemblable) écrit par James Bridges, le futur auteur des scripts de L’Homme de la sierra et Le Cerveau d’acier, par la suite de scripts moins originaux mais au service de plus grosses machines hollywoodiennes, qu’il dirigera parfois comme cinéaste. Un des meilleurs épisodes signés à la mise en scène par Kjellin. La présentation de Hitchcock, montré prisonnier de deux tribus de Lilliputiens qui décident de le couper en deux au moyen d’un pendule s’abaissant graduellement, fait pauvrement mais drôlement et ouvertement référence à deux films fantastiques : Les Voyages de Gulliver (USA 1960) de Jack Sher (trucages de Ray Harryhausen) et La Chambre des tortures (Pit and the Pendulum) (USA 1961) de Roger Corman. La photo de Redford illustrant la sérigraphie du DVD sur lequel figure cet épisode correspond, soit dit en passant, à l’épisode 1.01 et non pas à cet épisode 1.18.

1.19 - To Catch a Butterfly (VOSTF) de David Lowell Rich avec Bradford Dillman, Diana Hyland, Edward Asner, June Dayton, etc. Un enfant criminel persécute le jeune couple qui vient de s’installer à côté de chez ses parents au point de mettre leur vie en danger. Suspense sans faille, résolu par la révélation d’une relation névrotique. Conclusion psychanalytique humaniste qui fait sourire aujourd’hui. David Lowell Rich signe ici une mise en scène dynamique et sa violence graphique est parfois impressionnante. Il réalisera un étrange film noir flirtant avec le fantastique en 1968 : Les Griffes de la peur (Eye of the Cat). Le thème des enfants dangereux ou inquiétants est classique dans la littérature et le cinéma fantastiques, plus original et moins exploité dans le film noir policier, d’où l’intérêt particulier de cet épisode, du point de vue de l’histoire du cinéma et de la télévision. Dillman et Asner sont tous deux excellents. Présentation de Hitchcock totalement débile et sans intérêt, sans aucun rapport avec l’épisode présenté. Générique en état technique un peu inférieur, comme souvent, au restant de l’épisode.

1.20 - The Paragon (VOSTF) de Jack Smight, scénario de Alfred Hayes d’après un roman de Rebecca West avec Joan Fontaine, Gary Merrill, Susan Gordon, Virginia Vincent, Linda Leighton, etc. L’épouse d’un avocat, donneuse permanente de leçons à sa famille et à ses domestiques, fait un cauchemar prémonitoire… mais de quoi ? Peut-être du lieu et du moment de son assassinat. Intéressante structure, bien construite et bien écrite, bien rythmée même si assez bavarde. Joan Fontaine compose ici un personnage bien plus original que ceux que Hitchcock lui confiait vingt ans plus tôt dans Rebecca et Soupçons. Comme dans ce dernier titre, le suspense tourne à un moment autour d’une boisson empoisonnée. Trois ans plus tard, Joan Fontaine tournera en vedette le curieux, rare et intéressant Hammer film fantastique anglais, Les Sorcières (Pacte avec le diable) de Cyril Frankel. Quant à l’acteur Gary Merrill, il est remarquable d’un bout à l’autre.

1.21 - I’ll Be Judge - I’ll Be Jury (VOSTF) de James Sheldon, scénario de Lukas Heller d’après une histoire originale de Elisabeth Levy, avec Peter Graves, Albert Salmi, Ed Nelson, Sarah Marshall, etc. Un couple américain passant sa lune de miel au Mexique est victime d’un psychopathe déjà soupçonné par la police locale d’un meurtre antérieur. Le mari, désireux de venger son épouse étranglée, accepte de collaborer avec la police. Scénario et mise en scène louchant vers l’absurde et le surréalisme mais l’ensemble, ennuyeux en dépit de rebondissements inattendus, s’avère en fin de compte artificiel et invraisemblable. Avec en vedette Peter Graves (Mission : impossible) opposé à Albert Salmi dans le rôle d’un tueur inquiétant qui n’aurait pas dépareillé dans un film noir tel que La Soif du mal (1957) d’Orson Welles.

1.22 - Diagnosis: Danger (VOSTF) de Sidney Pollack, scénario de Roland Kibbee avec Charles McGraw, Michael Parks, etc. Le bacille mortel de l’anthrax est introduit en Amérique du Nord par un objet venu du Mexique et qui passe de mains en mains : une course contre la montre s’engage pour le retrouver, en identifiant les morts et en soignant les survivants qui furent en contact avec lui. Le scénariste Roland Kibbee - nom souvent lu au générique de bien des épisodes de bien des séries TV de la période 1960 à 1975 - ne s’est pas trop fatigué pour l’idée de base de cet épisode qui devait être le pilote d’une nouvelle série qui ne s’est jamais faite. Il reprend, en l’adaptant intelligemment, l’idée du classique du film noir américain Panique dans la rue (1950) d’Elia Kazan. L’acteur Charles McGraw fut un habitué des films noirs durant les années 1945-1955. Michael Parks est ici médecin : il sera étudiant en médecine dans la saison suivante. Gus Trikonis, futur réalisateur du film fantastique de série B The Evil (Le Couloir de la mort) (1978) est assez bon acteur en jeune voyou violent. Second épisode de la saison réalisé par Sidney Pollack qui délivre une mise en scène assez ample et nerveuse, émaillée de quelques effets de style. Le plan de l’attaque éclairée en ombres chinoises d’un homme par d’autres dans une ruelle nocturne, est directement inspiré par celui qui ouvrait, deux ans plus tôt, le film noir policier Underworld U.S.A (Les Bas-fonds de New York) (1961) de Samuel Fuller.

Alfred Hitchcock présente - Les inédits - Intégrale saison 1



1.23 - The Lonely Hours (VOSTF) de Jack Smight, scénario de William Gordon d’après une histoire de Celia Fremlin, avec Nancy Kelly, Gena Rowlands, Joyce Van Patten, Juanita Moore, etc. Une névrosée (préparant une thèse d’histoire de la philosophie antique sur le penseur grec présocratique Thalès de Millet) s’introduit comme locataire chez une mère de famille (dont le mari est absent pour de longues périodes) afin de lui dérober son dernier-né qu’elle considère secrètement comme étant son propre bébé. Suspense sans faille, bien interprété mais qui intéressera sans doute davantage le public féminin que masculin. Encore que Gena Rowlands soit constamment agréable à regarder et le sache, de toute évidence, très bien. Casting exclusivement féminin car le scénario tient en hors-champ / hors-caméra toutes les figures masculines, sauf le bébé dont les gros plans du visage ahuri, finissent par être un peu lassants. Une gageure scénaristique tenue certes efficacement mais quel but visait-elle ? Un effet de curiosité ou d’originalité formelle ? Sans doute les deux à la fois. A noter le regard étonné échangé entre Gena Rowlands et son amie lorsque la névrosée leur énonce son sujet de thèse de doctorat. A noter aussi une assez curieuse policière matriarcale et psychologue, aux cheveux courts et à l’uniforme strict, qui rétablit in extremis l’ordre et la sécurité du monde (féminin).

1.24 - The Star Juror (VOSTF) de Herschel Daugherty, scénario de James Bridges d’après le roman français de Francis Didelot, avec Dean Jaeger, Cathie Merchant, Jennifer West, Betty Field, etc. Dans le Sud des USA, un pharmacien commet une tentative de viol qui finit par un meurtre. L’amant de la victime est accusé à sa place. Nommé juré au procès, le pharmacien fait tout ce qu’il peut pour le faire innocenter. L’accusé est en effet disculpé mais une étrange relation se noue entre cet homme et le pharmacien, de plus en plus torturé par sa conscience. Elle engendre un second meurtre ! Cet épisode illustre bien les relations entre l’histoire du cinéma et la télévision d’une part, l’importance des dates dans l’histoire du cinéma mondial d’autre part. Le cinéaste français Georges Lautner venait d’adapter au cinéma l’année précédente (en 1962, donc) le roman de Francis Didelot Le Septième juré (édition originale en 1958). Le film de Lautner sortira aux USA en 1964 seulement mais James Bridges écrit le scénario de cet épisode en 1963, adaptant l’idée originale de l’auteur français, crédité au générique. Bridges avait-il lu le livre de 1958 ou vu le film de 1962 à Paris durant un voyage ? Ou bien une relation américaine parisienne à lui l’avait-il lu ou vu puis lui en avait-il parlé sans même qu’il eût à se déplacer ? Toujours est-il que cet épisode oscille entre comédie parodique et film noir dramatique : certains personnages sont des caricatures (l’épouse du pharmacien) ou des silhouettes bien davantage comiques que dramatiques (Alice, la « rebelle » qui tombe amoureuse de l’accusé). Même la scène du meurtre en ouverture oscille curieusement entre les genres : elle a un petit côté Nouvelle vague française. Daugherty n’est cependant ni le Hitchcock de Mais qui a tué Harry ?, ni le Chabrol de Les Bonnes femmes. Sa mise en scène illustre sagement l’histoire et ses oscillations génériques sans jamais pouvoir l’unifier par un style. L’acteur Dean Jaeger (qui reprend - probablement sans le savoir puisque, encore une fois, nous sommes en 1963 - le rôle tenu par Bernard Blier dans le film de Lautner) est remarquable en raison de l’économie dramatique de son jeu qui atteint ici une dimension authentiquement tragique. Mais l’ensemble vaut aujourd’hui surtout pour les prestations de Cathie Merchant (La Malédiction d’Arkham (The Haunted Palace) en 1963) et de Jennifer West. Le plan de l’accusé dans la barque, demi-nu, en chapeau de cowboy et lunettes noirs, évoque fugitivement les photos érotiques homosexuelles vendues sous le manteau à cette époque. La plaisanterie ouvertement salace d’Alice, en pleine rue, à l’encontre de dames s’estimant plus honorables qu’elle, vaut également le détour historique et sociologique. A noter enfin la présentation d’Hitchcock, certainement inspirée par le sketch Le Chat noir du film L’Empire de la terreur (Tales of terror) (1962) de Roger Corman, appartenant à la « série Edgar Poe ». Ici encore c’est le cinéma qui nourrit la TV en idées, presque en temps réel.

1.25 - The Long Silence (VOSTF) de Robert Douglas, scénario de Charles Beaumont et William Gordon d’après une histoire de Hilda Lawrence avec Phyllis Thaxter, Michael Rennie, Natalie Trundie, etc. Un vol suivi d’un meurtre est maquillé par le riche M. Manson afin de faire croire à un suicide mais son épouse s’en rend compte et devient un témoin gênant. Le scénariste Charles Beaumont a collaboré à la série Edgar Poe de Roger Corman. Phyllis Thaxter est excellente en paralysée hystérique menacée. L’acteur Michael Rennie tient un rôle de méchant très inhabituel mais dans lequel il est étonnant : il est bien connu des cinéphiles, y compris pour la section fantastique et science-fiction de sa filmographie. On retrouvera dix ans plus tard la belle actrice Natalie Trundie dans La Conquête de la planète des singes de Jack Lee Thompson. Photo N&B digne d’un film noir classique : un des meilleurs épisodes de la saison.

1.26 - Oscar (An Out for Oscar) (VF+VOSTF) de Bernard Girard, scénario de David Goodis d’après une histoire originale de David Kane, avec Henry Silva, Linda Christian, John Marley, Larry Storch, David White, Alan Napier etc. Un employé de banque qui a épousé une prostituée qu’il croyait être simple serveuse, se voit proposer par son proxénète de devenir complice du vol de sa propre banque. Il trouvera le moyen de résoudre ce double problème simultanément, à la satisfaction de son patron. Humour noir invraisemblable mais souvent drôle. On a un peu oublié qui furent les acteurs Alan Napier (série TV Batman), David White (série TV Ma sorcière bien-aimée), Larry Storch (série TV F Troop) mais ils étaient alors très populaires. Le cinéphile français se souvient, en revanche, mieux d’Henry Silva qui avait été la vedette de L’Insolent (Fr. 1972) de Jean-Claude Roy mais joua aussi très bien pour les cinéastes Henry King, John Frankenheimer, Burt Reynolds. Linda Christian avait joué, dix ans plus tôt, le rôle de la princesse dans Les Esclaves de Babylone de William Castle (1953).

1.27 - Death and the Joyful Woman (VOSTF) de John Brahm, scénario de James Bridges d’après une histoire originale d’Edith Pargeter, avec Laura Devon, Gilbert Roland, Laraine Day, Don Galloway, etc. Le riche propriétaire d’un grand domaine viticole californien, règne en tyran sur sa famille et ses proches. Il est tué par sa secrétaire mais un domestique, témoin gênant du meurtre, doit aussi être supprimé. Scénario reposant sur l’idée shakespearienne du parricide et de la folie. Gilbert Roland joue d’ailleurs ici d’une manière réellement shakespearienne. La belle Laura Devon en héritière amoureuse d’un domestique, mérite par ailleurs le détour. Sur John Brahm, lire supra ma remarque dans la notice de l’épisode 1.02. Sur James Bridges, lire ma remarque dans la notice de l’épisode 1.18.

Alfred Hitchcock présente - Les inédits - Intégrale saison 1

1.28 - Last Seen Wearing Blue Jeans (VOSTF) de A. Crosland Jr., scénario de Lou Rambeau d’après une histoire de Amber Dean, avec Michael Wilding, Anna Lee, James Anderson, Randy Boone, Katherine Crawford. etc. Une famille anglaise voyage de New York à Los Angeles pour découvrir l’Amérique d’Est vers l’Ouest mais, arrivée de nuit en Arizona, la fatigue est source d’erreur et leur fille se retrouve dans une voiture (à l’aspect similaire à la leur) d’un gang trafiquant des voitures à la frontière mexicaine. Elle est bientôt unique témoin d’un meurtre et unique témoin qu’il faut supprimer ! Suspense sans faille, en forme de cauchemar bien mené du début à la fin qui plaide pour une fraternité anglo-américaine certes un peu sirupeuse mais bien réconfortante après tant de noirceur criminelle. Anna Lee avait joué pour Fritz Lang (Les Bourreaux meurent aussi) et pour la série Val Lewton (Bedlam de Mark Robson) ainsi que pour John Ford (Le Massacre de Fort Apache, L’Homme qui tua Liberty Valance). Michael Wilding avait tourné pour Hitchcock au cinéma (Le Grand alibi, Les Amants du Capricorne). Anna Lee et Michael Wilding sont anglais d’origine mais Katherine Crawford qui joue leur fille, est en revanche américaine. Second épisode de la saison se déroulant (en partie) au Mexique après I’ll Be Judge, I’ll Be Jury. La frontière mexicaine fut un sujet classique de western avant de devenir un sujet classique du film noir policier américain.

1.29 - The Dark Pool (VOSTF) de Jack Smight, scénario de William D. Gordon d’après une histoire de Alec Coppel, avec Madlyn Rhue, Lois Nettleton, Anthony George„ David White. L’enfant d’une Américaine mariée à un riche fonctionnaire mexicain, se noie dans la piscine à la suite d’une inattention causée par son alcoolisme. L’enquête la reconnaît innocente mais une belle brune surgit alors, prétendant être la mère biologique de l’enfant. C’est le début d’un diabolique chantage. Bon épisode qui vaut par l’opposition entre deux actrices. Des deux, c’est surtout Madlyn Rhue (1935-2003) qui l’emporte, à la fois belle et très inquiétante tandis que Lois Nettleton joue bien les alcooliques repenties mais risquant de replonger dans l’enfer de la dépendance. Le physique de Madlyn Rhue lui valut de jouer assez souvent les femmes latines ou orientales. Elle fut un des piliers de la télévision américaine des années 1960. La scène où elle drogue à l’alcool sa victime est réalisée d’une manière spectaculaire. L’un des rares scénarios de la série faisant intervenir non pas un meurtre mais un accident comme ressort de l’intrigue : le suspense n’y perd rien. Un des meilleurs épisodes signés par Jack Smight.

1.30 - Dear Uncle George (VOSTF) de Joseph M. Newman, scénario de James Bridge, R. Levinson et W. Link, avec Gene Barry, John Larkin, Patricia Donahue, etc. Un journaliste célèbre rédigeant des conseils sentimentaux et matrimoniaux reçoit un jour une lettre dénonçant l’infidélité de sa propre épouse. Il la tue, tout en se forgeant un alibi qu’il pense solide. Joseph M. Newman a signé de bons westerns (Fort Massacre, Le Shérif aux mains rouges, Tonnerre apache) de série B à la fin des années 1950 et au début des années 1960, ainsi que le classique Universal de la SF Les Survivants de l’infini, co-réalisé par Jack Arnold et Virgil Vogel. Il a réalisé d’excellents épisodes de cette série : celui-ci en est un. Suspense sans faille, chute intelligente bien qu’un peu attendue néanmoins. Excellente interprétation, Gene Barry en tête.

1.31 - Run for Doom (VOSTF) de Bernard Girard, scénario de James Bridges d’après une histoire de Henry Kane, avec John Gavin, Diana Dors, Tom Skerritt, Scott Brady. Un jeune médecin de bonne famille tombe amoureux fou d’une dévoyée sous l’emprise d’un louche patron de cabaret. Elle l’aime aussi mais ses vieux démons (appât du gain, incapacité d’être fidèle à un homme) la reprennent, provoquant sa mort. Casting démentiel : l’actrice anglaise Diana Dors (1931-1984), ici dans le rôle d’une dévoyée mi-chanteuse de cabaret mi-veuve noire, était l’une des starlettes les plus érotiques des années 1960. Elle avait été surnommée « la Marilyn anglaise » à cause de sa ressemblance avec l’actrice américaine Marilyn Monroe mais il faut savoir que l’inverse fut non moins vrai puisque les critiques anglais des années 1950 estimaient que Marilyn Monroe pouvait être définie comme une « Diana américaine ». Elle s’avère remarquable de présence, excellente actrice. Il semble bien qu’elle chante elle-même durant les scènes de cabaret, ce qui rend cet épisode doublement incontournable. Elle joua également dans un épisode réputé (écrit par Robert Bloch) de la série antérieure Alfred Hitchcock presents. Scott Brady joue bien les hommes mûrs, désabusés mais encore puissants et secrètement amoureux. John Gavin, en revanche, compose un personnage de médecin a priori sans surprise, attendu mais le joue très bien, notamment à la fin où il est assez étonnant. Sans oublier l’apparition brève mais filmographiquement savoureuse de Tom Skerritt, bien avant qu’il soit l’officier supérieur du vaisseau de Alien ou le « vigilante » du violent Philadelphia Security. Chute finale d’une particulière crudité et cruauté. Un des meilleurs épisodes de cette saison.

1.32 - Death of a Cop (24 mai 1963 VOSTF) de Joseph M. Newman, scénario de Leigh Brackett d’après une histoire de Douglas Warner, avec John Marley, Richard Jaeckel, Victor Jory, Peter Brown, Paul Hartman, Paul Genge, etc. Un policier dont le fils a été tué par des gangsters, décide de venger celui-ci coûte que coûte. Scénario signé par L. Brackett qui avait signé les scripts du Grand sommeil et du Rio Bravo de Howard Hawks. Ce n’est pas forcément une référence dans la mesure où Hawks avait avoué n’avoir jamais rien compris à l’action du Grand sommeil. Ici, la ligne dramatique est bien plus simple mais aussi plus violente graphiquement, suivant en cela l’évolution du film noir américain. Elle peut sembler parfois fantasmatique, voire cauchemardesque et on n’arrive d’ailleurs pas vraiment à y croire : dommage car la mise en scène de Newman est d’une solidité et d’une fluidité remarquables. Richard Jaeckel et John Marley crèvent l’écran, comme d’habitude, mais le scénario confère à Jaeckel un rôle (une redoutable brute meurtrière) plus important qu’à Marley (un inspecteur de police). Paul Genge joue ici un lieutenant de police : il sera, cinq ans plus tard, le très inquiétant tueur au riot-gun du Bullitt ! (1968) de Peter Yates.

Alfred Hitchcock présente - Les inédits - Intégrale saison 1

Présentation - 4,0 / 5

1 coffret DVD Pal zone 2 Elephant, édité le 05 octobre 2015. Durée totale : 1616 minutes ou 26H 56 comprenant 10 DVD contenant les 32 premiers épisodes tournés de 1962 à 1963. Image 1.37 N&B, son VOSTF et VF d’époque mono. Suppléments : présentation de la série et des épisodes par Jean-François Rauger, livret illustré, bandes annonces.

Bonus - 5,0 / 5

Outre un livret illustré commode (mais parfois incomplet) et une galerie photos N&B, Jean-François Rauger a assuré la caution cinéphilique de l’entreprise en présentant la série d’une part, la saison d’autre part (entre 10 et 20 minutes selon les cas) et en permettant que 4 chapitres de son livre, L’Oeil domestique, Alfred Hitchcock et la télévision (éditions Rouge profond, l’éditeur qui édite une intégrale revue et augmentée de la revue Midi-Minuit Fantastique) soient utilisés par les livrets illustrés qui présentent (très succinctement) chaque épisode. On y apprend, par exemple, que Shamley productions, société fondée en 1955 aux USA par Hitchcock pour la production de cette série, reprend le nom d’un village du Sud de Londres où son épouse et lui avaient acheté une maison de campagne en 1928.

Lancée sur la chaîne de TV américaine CBS le dimanche 2 octobre 1955 à 21H30 sous le titre Alfred Hitchcock présente, accompagnée de la célèbre petite mélodie Marche funèbre d’une marionnette composée en 1872 par Charles Gounod, cette série TV dura 7 saisons de 39 histoires (268 histoires au total car la quatrième saison ne comportait que 36 histoires au lieu de 39) constituant chacune un moyen métrage autonome durant environ 25 ou 26 minutes, en général tourné en 3 jours. En 1957, une saison concurrente nommée Suspicion fut lancée par la chaîne NBC : Shamley production et Hitchcock en produisirent également les épisodes, Hitchcock en tourna même un lui-même mais ils étaient présentés par l’acteur Dennis O’Keefe. Quant à la série CBS originale, elle changea de nom en 1962 et devint The Alfred Hitchcock Hour parce que la durée des épisodes augmenta, passant à environ 50 ou 52 minutes (selon les différentes durées vidéo PAL ou NTSC, selon aussi qu’il s’agit de DVD ou de Blu-ray). Ils furent en général tournés en 6 jours. Cette nouvelle série comporta 3 saisons successives. Selon qu’on calcule en partant de 1955 ou en partant de 1962, on peut les numéroter 8, 9, 10 ou bien 1, 2, 3. La série de ces 3 saisons The Alfred Hitchcock Hour fut connue en France sous le titre générique de… Suspicion qu’il ne faut surtout pas confondre avec la série NBC. Ce sont ces 3 dernières saisons 1962 à 1965 qui constituent l’intégrale de ce coffret The Alfred Hitchcock Hour ((saison 1 = 32 histoires) + (saison 2 = 32 histoires) + (saison 3 = 29 histoires) = donc, au total, 93 histoires).

Comme c’était son habitude depuis 1955, Alfred Hitchcock présentait et commentait in fine ces histoires. Ces présentations et commentaires qu’il n’avait pas le temps de rédiger lui-même, étaient écrits par un certain James B. Allardice. Ils constituent aujourd’hui, à mon avis, le point souvent faible de la série : je ne partage donc pas l’avis élogieux de Jean-François Rauger en ce qui les concerne, à de rares exceptions près que je signale dans les notices critiques. Hitchcok signa lui-même la mise en scène d’une vingtaine d’histoires (notamment la toute première de la première saison en 1955 : Revenge) entre 1955 et 1962 inclus. La majorité de ses contributions personnelles dure donc 26 minutes mais certaines durent aussi 52 minutes : elles avaient été éditées en coffret par Universal mais malheureusement pas classées dans l’ordre historique chronologique de production. Elephant restitue chacun de ces épisodes à sa place chronologique correcte au sein de l’intégralité enfin rééditée.

On se souvient que Psycho (Psychose) (USA 1960) d’Alfred Hitchcock avait été tourné dans des conditions assez proches de celles d’un moyen métrage de cette série, au point qu’on peut le considérer aujourd’hui rétrospectivement comme une sorte de porte-étendard. Le cinéphile francophone qui admire Psychose ne pouvait que souhaiter découvrir la totalité de sa série matricielle. Son examen révèle qu’elle entretient des liens parfois encore plus étroits qu’on pouvait le penser avec ce chef-d’oeuvre.

Alfred Hitchcock présente - Les inédits - Intégrale saison 1

Image - 4,0 / 5

L’ensemble est au format original 1.37 N&B compatible 4/3 : les copies sont parfaitement nettoyées, les numérisations soignées, seules d’éventuelles poussières négatives ou positives subsistent sur un ou deux plans (cas de l’excellent épisode 3.22, par exemple). Le bruit vidéo se manifeste parfois aussi sur des marches d’escaliers ou des stores mais il est, en règle générale, assez bien contrôlé bien qu’il ne s’agisse que de DVD standards. Une suggestion : à présent que l’intégralité de la série est disponible en DVD standard, il faudrait songer à préparer une édition Blu-ray Full HD et même à une édition Blu-ray UHD 4K.

Son - 4,0 / 5

Le son est du mono 2.0 parfaitement nettoyé lui aussi, qu’il s’agisse des VOSTF ou des VF. Quelques erreurs ou coquilles, parfois des fautes de syntaxe ou un vocabulaire argotique récent substitué à l’argot original américain de l’époque, peuvent être relevés dans les STF mais, sur une telle quantité de disque, c’est presque inévitable : l’ensemble est cependant assez bien traduit, en règle générale. Les VF, lorsqu’elles existent, sont soignées pour l’époque, aux normes cinéma et souvent très savoureuses.

Crédits images : © Eléphant Films

Configuration de test
  • Téléviseur 4K LG Oled C7T 65" Dolby Vision
  • Panasonic BD60
  • Ampli Sony