Le Dernier milliardaire (1934) : le test complet du Blu-ray

Combo Blu-ray + DVD

Réalisé par René Clair
Avec Max Dearly, Sinoël et Paul Ollivier

Édité par Pathé

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Le 26/11/2019
Critique

Encore inédite en vidéo, une comédie satirique sur les dérives du capitalisme et la montée du fascisme dans l’Europe des années 30.

Le Dernier milliardaire

Les ressources du casino ont longtemps permis à la petite cité-royaume de Casinario de vivre dans l’insouciance. Aujourd’hui, les caisses sont vides : le traitement des fonctionnaires n’est plus versé et les Casinariens sont revenus à l’âge du troc pour régler leurs échanges. La reine de Casinario, pour convaincre le richissime Monsieur Banco, un Casinarien expatrié depuis cinquante ans, de souscrire à l’emprunt national de 300 millions qu’elle a lancé, prétendument pour financer l’agrandissement du royaume, a fait réaliser un film qui vante la prospérité de la nation et lui a promis la main de sa petite-fille, la princesse Isabelle, amoureuse du chef de l’orchestre du palais royal. Banco tire profit de la situation en se proclamant le chef suprême de Casinario. Le coup qu’il va recevoir sur la tête va changer le cours des événements…

Le Dernier milliardaire, sorti en 1934, le dixième long métrage de René Clair, René-Lucien Chomette pour l’état civil, scénariste et réalisateur d’une trentaine de films, suit quatre de ses grandes oeuvres : Sous les toits de Paris, sorti en 1930, Le Million et À nous la liberté, tous deux sortis en 1931, et de Quatorze juillet, en 1933.

Le Dernier milliardaire

Le Dernier milliardaire, s’il ne s’élève pas au même niveau des quatre films précédents, est une charge caricaturale, quasi-burlesque, qui peut faire penser à Soupe au canard (Duck Soup) des Marx Brothers, sorti en France quand René Clair réalise son film. René Clair fustige les dérives du capitalisme, la passivité des politiques devant les délires dictatoriaux de Banco : en sa présence, les ministres doivent marcher à quatre pattes en aboyant, tous les barbus sont contraints de porter des culottes courtes, les sièges de toute nature sont interdits, au même titre que les armes, depuis qu’il a été assommé par une chaise !

Le Dernier milliardaire témoigne de l’imagination fertile de René Clair, révélée dès ses deux premiers films, Entr’acte et Paris qui dort, simultanément édités par Pathé : le chef d’orchestre paie son journal avec deux poireaux et une carotte ; un fermier règle son dîner avec un poulet, reçoit la monnaie sous la forme de deux poussins et d’un oeuf qu’il donne au garçon en guise de pourboire.

Le Dernier milliardaire

Certains ont dû craindre qu’on les confonde avec Banco, en moins drôles : le film a été interdit en Allemagne et en Italie sous les dictatures d’Adolf Hitler et de Benito Mussolini !

Le rôle-titre est tenu par Max Dearly, sortant du tournage du film de Raymond Bernard Les Misérables (1934), celui d’Isabelle par Renée Saint-Cyr, vue l’année précédente dans Les Deux orphelines de Maurice Tourneur (pas encore édité sur disque optique). On reconnaît aussi Raymond Cordy, un visage familier du cinéma de René Clair, présent dans huit de ses films, en tête d’affiche d’À nous la liberté et de Le Silence est d’or.

Pathé comble un manque important en sortant en même temps la première édition sur disque optique de Le Dernier milliardaire, et de trois autres films de jeunesse de René Clair, Entr’acte et Paris qui dort (sur un seul disque) et Le Silence est d’or (1947).

L’arrivée de ces trois disques qui viennent enrichir la collection Version restaurée par Pathé (dans laquelle figure Les Croix de bois de Raymond Bernard, Prix du meilleur DVD/Blu-ray de patrimoine décerné par le Syndicat Français de la Critique de Cinéma en 2014) est un des événements de l’édition vidéo de l’année 2019.

Le Dernier milliardaire

Présentation - 3,0 / 5

Le Dernier milliardaire (92 minutes) et ses suppléments (48 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé, dans cette édition combo, en compagnie d’un DVD-9, dans un boîtier non fourni pour le test effectué sur un check disc du seul Blu-ray.

Le menu animé et musical propose le film restauré en 4K par L’Immagine Ritrovata, à partir d’un contretype safety et d’une copie d’exploitation nitrate, au format audio DTS-HD Master Audio 1.0.

Piste d’audiodescription au format DTS-HD MA 2.0 et sous-titres pour malentendants.

Sous-titres anglais.

Bonus - 4,0 / 5

En supplément :

Le dernier baroud (Pathé, 2019, 35’). Noël Herpe, historien du cinéma, et Dimitri Veziroglou, maître de conférences dépeignent un cinéaste à la recherche d’un « ton comique original » dans lequel pointent des hommages au burlesque, à Charles Chaplin. Il acquiert à 35 ans une réputation internationale. Le Dernier milliardaire (qui a failli s’appeler Le Dernier dictateur) était produit par la Tobis, une société allemande. Son contrôle étroit par Goebbels amena René Clair à se tourner vers Pathé-Nathan qui tombera en faillite en 1935. L’hésitation entre le burlesque et la satire est la faiblesse du film qui peut être vu comme un deuxième volet d’À nous la liberté. Le chahut à sa sortie, pour la façon légère dont il montrait, dans un climat tendu, la montée du fascisme en Europe fut peut-être une des raisons qui poussèrent René Clair à regarder vers les USA.

Portrait du metteur en scène René Clair (13’). « René Clair, 50 ans de cinéma, par R. de Dancourt » est un documentaire pour la télévision datant probablement de la fin des années 70. Il s’ouvre sur le discours d’admission de René Clair à l’Académie Française, en 1960. Puis on le voit dans sa villa sur les hauteurs de Saint-Tropez, là où il consigna ses vues sur le cinéma dans deux ouvrages, Réflexions faites et Cinéma d’hier et d’aujourd’hui, mettre du vin en bouteilles et jouer à la pétanque. « La mise en scène cinématographique, c’est une question de bon sens » (…) « Il est très difficile de représenter le rêve au cinéma : le cinéma est déjà le rêve » affirme-t-il. Il dit son amour du théâtre en évoquant sa mise en scène au TNP d’On ne badine pas avec l’amour, à la demande de Gérard Philipe. « Notre cinéma n’est qu’un précurseur des moyens d’expression qu’on ne peut imaginer aujourd’hui » dit-il en conclusion de l’entretien. (Le même document complète l’édition de Le Silence est d’or).

Le Dernier milliardaire

Image - 4,0 / 5

L’image en dépit de la précarité des sources utilisées, est d’une étonnante qualité : débarrassée de toutes taches ou rayures, sans lissage excessif, dans le respect de la texture originelle, agréablement contrastée, elle ne laisse pas paraître son âge, sauf dans les rares plans sur fond de ciel, affectés par un grain assez grossier.

Son - 4,5 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 1.0, très propre lui aussi, restitue les dialogues avec clarté et, sans trop de distorsions, le discret accompagnement musical du compositeur Maurice Jaubert qui eut le temps de signer une petite trentaine de partitions pour le cinéma, dont celle de Drôle de drame, avant de tomber au front en 1940, à l’âge de 40 ans.

Crédits images : © Droits réservés

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 26 novembre 2019
René Clair a concocté en 1934 une fable sur le capitalisme et ses dérives, sur la passivité des politiques devant les délires d’un nouveau venu qui se proclame chef suprême d’un pays. L’aspect caricatural, quasi-burlesque, de la charge a pourtant dérangé deux dictateurs : le film fut interdit en Allemagne et en Italie !

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