Réalisé par Víctor Erice
Avec
Manolo Solo, Jose Coronado et Ana Torrent
Édité par Blaq Out
Julio Arenas, un acteur célèbre, disparaît en 1990 pendant le tournage du film La Mirada del adiós, réalisé par Miguel Garay, son meilleur ami. Son corps n’est jamais retrouvé. A-t-il été assassiné par un mari jaloux, s’est-il suicidé ou n’a-t-il pas organisé sa disparition pour changer de vie ? Vingt-deux ans plus tard, la productrice du magazine de télévision dédié aux affaires non élucidées, Casos sin resolver, sollicite le témoignage de Miguel Garay. En se rendant à Madrid, Miguel va replonger dans son passé…
Fermer les yeux (Cerrar los ojos), sélectionné à Cannes dans la section Un Certain Regard, primé par de nombreux festivals, principalement en Espagne et en Amérique Latine, discrètement sorti dans nos salles en août 2023, est le dernier des quatre longs métrages réalisés par Victor Erice (né en 1940) depuis son premier film, L’Esprit de la ruche (El Espíritu de la colmena, 1973), dont la sélection à Cannes par la Semaine de la critique avait assuré la réputation internationale. Ses deux autres films sont El Sur, sélectionné à Cannes pour la Palme d’or en 1983, sorti subrepticement dans nos salles en 1988, toujours absent de non catalogues vidéo, et Le Songe de la lumière (El Sol del membrillo, 1992), un documentaire sur le peintre Antonio López García, sélectionné pour la Palme d’or et salué à Cannes par le Prix du jury et le Prix FIPRESCI.
Trente et un ans et quelques courts métrages plus tard, faute pour Victor Erice d’avoir pu boucler le financement de plusieurs projets, arrive Fermer les yeux. Une longue attente pour les cinéphiles, récompensée par une émouvante évocation de souvenirs à demi-effacés d’une amitié soudainement perdue. La demande de la productrice de télévision va déclencher chez Miguel Garay, qui n’a pu se résigner à accepter la mort de son meilleur ami, le désir d’élucider les circonstances de sa disparition. Victor Erice nous invite avec cette histoire qu’il a imaginée, à suivre Miguel dans son enquête, si bien racontée qu’on ne sent pas le temps passer pendant les presque trois heures du film.
Fermer les yeux montre une recherche de la vérité, à partir d’objets retrouvés, des rushes de La Mirada del adiós, de la rencontre avec Ana, la fille de Julio, ce père qui n’a cessé de disparaître pour réapparaître dans la peau d’un autre personnage, interprétée par Ana Torrent. Victor Erice l’avait révélée à l’âge de 7 ans en la plaçant en tête de distribution de L’Esprit de la ruche, trois ans avant que Carlos Saura ne fasse de même avec Cría cuervos…, sélectionné pour la Palme d’or et récompensé par le Prix du jury, ex-aequo avec La Marquise d’O… d’Éric Rohmer.
Fermer les yeux est aussi une mise en abyme du cinéma, avec un autre film dans le film, une autre belle histoire de quête, celle d’un père qui souhaite, avant de mourir, revoir le regard de sa fille qu’il a quittée depuis une vingtaine d’années. Une occasion pour le cinéaste de dire sa nostalgie de la pellicule, de regretter la disparition des projecteurs 35 mm et la fermeture de tant de cinémas de quartier. Il se projette probablement dans le personnage de Miguel Garay qui n’a plus tourné de film depuis La Mirada del adiós.
Avec une mise en scène sans affectation, des séquences séparées par des fondus au noir qui s’enchaînent sans à-coups, des cadrages naturels, Fermer les yeux, à la recherche d’un temps perdu, est servi par l’incarnation, tout en retenue, de Miguel et Julio par Manolo Solo et Jose Coronado.
Nous restons dans l’attente d’une édition de El Sur et, en supplément, de quelques-uns des courts métrages d’un cinéaste trop rare, mais inoubliable.
Fermer les yeux (162 minutes) tient sur un DVD-9, logés dans un boîtier épais de 14 mm, glissé dans un fourreau.
Le film est proposé dans sa langue originale, l’espagnol, avec sous-titres optionnels, au format audio Dolby Digital 5.1.
Sous-titres pour malentendants.
Bande-annonce (1’16”).
L’image numérique, captée par une caméra Arri Alexa 35, au ratio d’origine de 1.66:1, finement définie dans toutes les conditions d’éclairage, déploie des couleurs naturelles, soigneusement étalonnées.
Le son Dolby Digital 5.1 assure une claire restitution des dialogues et une discrète, mais cohérente, impression d’immersion dans l’ambiance, notamment sous la pluie battante de certains extérieurs.
Crédits images : © Manolo Pavon