Les Révoltés de l'an 2000 (1976) : le test complet du Blu-ray

¿Quién puede matar a un niño?

Édition SteelBook

Réalisé par Narciso Ibáñez Serrador
Avec Lewis Fiander, Prunella Ransome et Javier de la Cámara

Édité par Carlotta Films

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Le 14/10/2020
Critique

La petite île d’Almanzora sur laquelle Tom et Evelyn sont venus passer quelques jours de vacances, est bien calme, étrangement calme…

Les Révoltés de l'an 2000

Tom et Evelyn, deux Anglais, arrivent par le car à la station balnéaire de Benavis, au moment du carnaval. Ils ne vont pas y rester : ils ont choisi de passer leurs vacances sur la petite île d’Almanzora. Tom y a séjourné il y a douze ans : Evelyn, enceinte, pourra s’y reposer au calme. La police découvre le cadavre d’une jeune femme, poignardée, échouée sur la plage de Benavis. Le lendemain matin, Tom et Evelyn louent un bateau pour rejoindre Almanzora où ils sont surpris de ne voir que des enfants. L’île paraît avoir été désertée par les adultes…

Où sont les gens ?

Les Révoltés de l’an 2000 (¿Quién puede matar a un niño?) part d’une idée que Juan José Plans développera dans son roman El juego de los niños, publié en 1976, à partir de laquelle Narciso Ibáñez Serrado (disparu en juin 2019) a élaboré le scénario du film, le second et le dernier qu’il aura réalisé pour le grand écran au long d’une carrière essentiellement dédiée à la télévision, dont il fut une de figures marquantes, de 1962 jusqu’à sa retraite en 2006.

Les Révoltés de l’an 2000 (pourquoi avoir affublé le film d’un tel titre français, au lieu de traduire le titre original ?), longtemps tombé dans l’oubli, avait connu à sa sortie un bon accueil et décroché le Prix de la critique à Avoriaz en 1977.

Le premier film de Narciso Ibáñez Serrado, La Residencia, sorti en 1969, que les cinéastes espagnols couvrent de louanges dans les suppléments, n’a pas (encore) été édité en vidéo en France.

Le réalisateur n’a pas fait mystère sur le petit écran de son penchant pour le fantastique et l’épouvante en écrivant ou en réalisant nombre de téléfilms et séries, notamment dans deux programmes aux titres prometteurs, Historias para no dormir et Mis terrores favoritos qui proposait le lundi soir un classique du cinéma d’épouvante.

Les Révoltés de l'an 2000

They’re just little children!

Les Révoltés de l’an 2000 s’affranchit résolument des codes du fantastique : ni souterrains obscurs, ni brumes méphitiques : l’action se déroule sous un soleil de plomb dans les rues d’un village bordées de façades d’une blancheur aveuglante. Ni loup-garou, ni vampire, ni zombie, ni aucune sorte de monstres… juste des enfants.

Rien de surnaturel sur Almanzora. La meilleure recette pour faire peur : faire croire qu’on montre la réalité. Même le plus gogo des cinéphiles sait bien que momies et loups-garous sont des créatures imaginées (attention, toutefois : Bram Stoker, l’inventeur du comte Dracula, nous a mis en garde : « ce qui fait la force des vampires, c’est qu’on ne croit pas qu’ils existent »).

Les Révoltés de l’an 2000 s’ouvre sur des films d’archives montrant des enfants dans les camps de concentration, en Inde, au Pakistan, en Corée, au Vietnam, au Nigéria, en Thaïlande… tous victimes de la folie des adultes. Après une petite demi-heure, dès qu’Evelyn et Tom ont accosté Almanzora, l’inquiétude commence à sourdre et la tension ira crescendo vers l’angoisse, puis jusqu’à l’horreur (culminant avec la scène de la piñata !), grâce à un scénario habilement structuré.

À l’appui du récit, la photographie de José Luís Alcaine qui deviendra le chef-opérateur de huit films de Pedro Almodóvar, de Femmes au bord de la crise de nerfs (Mujeres al borde de un ataque de « nervios », 1988) à Douleur et gloire (Dolor y gloria, 2019).

Avec ces atouts, Les Révoltés de l’an 2000 restera dans la mémoire des cinéphiles, en compagnie d’autres films dans lesquels les enfants, leur innocence perdue, nous ont fait frissonner, Le Village des damnés (Village of the Damned, Wolf Rilla, 1960), Les Innocents (The Innocents, Jack Clayton, 1961), Sa majesté des mouches (Lord of the Flies, Peter Brook, 1963), L’Autre (The Other, Robert Mulligan, 1972), L’Exorciste (The Exorcist, William Friedkin, 1973)…

Les Révoltés de l'an 2000

Présentation - 4,5 / 5

Les Révoltés de l’an 2000 (111 minutes) et ses généreux suppléments (88 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé dans un élégant boîtier en métal brossé SteelBook.

Le menu fixe et musical propose le film dans sa version originale, en anglais et castillan, avec sous-titres optionnels, et dans deux doublages, l’un en castillan, l’autre en français. Les trois versions sont au format DTS-HD Master Audio 1.0.

Bonus - 4,5 / 5

Un complément exclusif :

Présentation du film par Fabrice Du Welz (5’). Il aime ce film, oublié, malgré son bon accueil à Avoriaz, puis redécouvert dans les années 2000. Naturaliste, entre survival et horreur, « à la lisière du fantastique », tourné en plein soleil, en contraste avec Residencia, un film gothique qui avait inspiré Suspiria à Dario Argento. Il n’a pas pu obtenir les droits pour un remake, mais son film Vynian, sorti en 2008, « emprunte beaucoup à ¿Quién puede matar a un niño?) (…) un film admirable, écrasant, ensoleillé et poisseux à la fois ».

Les autres compléments sont repris de l’Édition Collector Wild Side de 2008 :

Qui peut tuer un enfant ? (16’, Dark Sky Films, 2007), un entretien avec le chef-opérateur José Luís Alcaine. Narciso Ibáñez Serrador souhaitait faire « quelque chose entre La Nuit des morts-vivants et Les Oiseaux », avec des couleurs naturelles pour que l’histoire, qui se déroule en plein jour, paraisse réelle. Le tournage en plusieurs lieux, dans un village près de Tolède et à Minorque, a compliqué la photographie : la lumière est plus crue dans le centre de l’Espagne qu’au bord de la Méditerranée : il a fallu une dizaine de visionnages pour étalonner les couleurs.

Le metteur en scène des enfants (9’, Dark Sky Films, 2007), un entretien avec Narciso Ibáñez Serrador. Le scénario a été écrit en quatre jours, avant que José Plans n’ait fini son roman. Le réalisateur « tourne avec un papier et un stylo » en visualisant chaque plan. José Luís Alcaine a très vite compris ce qu’il voulait, une histoire en plein soleil où les monstres sont remplacés par des enfants, pas comme celles des films d’horreur qui font rire le public. Il regrette de n’avoir pas mis à la fin les images d’archives du générique.

Les Révoltés de l'an 2000

Narciso Ibáñez Serrador vu par… (27’, Wild Side Video, 2008) « Impossible d’être Espagnol et de ne pas connaître ‘Chicho’ Serrador (…) figure de proue de la télévision, le Hitchcock espagnol », dit le réalisateur Paco Plaza. Avec une réalisation élégante rappelant celle de Terence Fisher, ¿Quién puede matar a un niño? est un « film novateur, puissant, mystérieux, pervers, transgressif, impossible à oublier ». Serrador, le premier réalisateur du cinéma de genre en Espagne, a ouvert la voie à Jesús Franco, à Paul Naschy, et influencé les cinéastes d’aujourd’hui, tels Alejandro Amenábar, Alex de la Iglesia, Enrique Urbizu, Mateo Gil, Guillermo del Toro, Juan Antonio Bayona, Jaume Balagueró et Paco Plaza…

Histoire du cinéma fantastique espagnol (28’, Wild Side, 2008, exclusivité Blu-ray’). L’historien Emmanuel Vincenot voit dans la culture catholique le « ferment » du cinéma fantastique espagnol bien que les cinéastes aient eu à lutter contre la censure exercée par l’église, qui a conduit Paul Naschy à situer l’action de ses films partout, sauf en Espagne, et Jesús Franco à tourner la plupart de ses quelques 200 films à l’étranger. Le cinéma fantastique plante ses racines avec Segundo de Chomon, le « Méliès espagnol ». La Torre de la siete jorobados d’Edgar Neville, 1944, est le premier long métrage du genre. Dans les années 60, il se développe avec L’Horrible Docteur Orlof (Gritos en la noche, Jesús Franco, 1962) et Les Vampires du Dr Dracula (La Marca del Hombre-lobo, sur un scénario de Paul Naschy, 1968), tourné en 70 mm 3D que son auteur voit comme « le premier film réellement fantastique du cinéma espagnol ». Au milieu des années 80, commence une période de vaches maigres jusqu’à une résurgence, au milieu des années 90, annoncée par Alex de la Iglesia avec Le Jour de la bête (El Día de la bestia, 1995), par Alejandro Amenábar, avec Tesis (1996) et Ouvre les yeux (Abre los ojos, 1977), marquant la naissance d’un cinéma qui « gomme les signes d’hispanité (…) tout en conservant un ancrage local (…) qui reste mal aimé, comme l’ensemble du cinéma de genre, mais garde un public de cinéphiles ». Avec les témoignages de Jesús Franco, Paul Naschy, Jorge Grau.

Bande-annonce 2020.

Les Révoltés de l'an 2000

Image - 4,5 / 5

L’image (1.85:1, 1080p, AVC) a été débarrassée par une soigneuse restauration de toutes les marques de dégradation de la pellicule, dans le respect du grain argentique toutefois un peu trop visible sur fond de ciel. Lumineuse, avec des couleurs agréablement saturées et des noirs denses dans les quelques scènes de nuit, elle assure une parfaite lisibilité de tous les cadres.

Son - 4,0 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 1.0 de la version originale, dans laquelle l’anglais domine nettement l’espagnol, est aussi très propre : ni parasite, ni souffle. Une bonne dynamique rend l’ambiance présente.

Les deux doublages, en français et en espagnol, s’en sortent honnêtement, bien qu’ils soient affectés par du souffle restant à un niveau tolérable.

Crédits images : © 1976 PENTA FILMS. Tous droits réservés.

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 15 octobre 2020
Voici la réédition attendue d’un film d’épouvante insolite, salué par le Prix de la critique à Avoriaz en 1977. Ni vampire, ni zombie, ni loup-garou... Pas la queue d’un monstre dans les rues étrangement calmes du village de la petite île d’Almanzora, au large des côtes d’Espagne. Juste des enfants...

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