La Guerre du feu (1981) : le test complet du Blu-ray

Une aventure haletante pimente la meilleure tentative de reconstitution de la vie de nos ancêtres 80 000 ans avant l’invention du cinéma.

Il y a 80 000 ans, le petit clan homo sapiens des Oulhamr, vivant dans une caverne, attaqué par des néanderthaliens, perd le feu qui l’aidait à se protéger du froid, à éloigner les animaux prédateurs, à cuire la viande, à durcir la pointe des épieux. Naoh, Amoukar et Gaw, sont chargés par le clan d’aller récupérer le feu. Une mission dangereuse…

La Guerre du feu, l’adaptation, sur un scénario de Gérard Brach, du roman publié en 1909 par l’écrivain belge J.-H. Rosny aîné, réédité une centaine de fois, la dernière en 2013, est le troisième long métrage de Jean-Jacques Annaud. L’Oscar du meilleur film étranger attribué en 1976 à son premier film, La Victoire en chantant, lui assurait l’attention des producteurs qui eurent un moment de recul en découvrant le projet d’un film sans acteurs connus, s’exprimant dans une langue inventée, et qui allait coûter quelques 60 millions de francs. 20th Century Fox releva finalement le défi. Après un tournage fertile en péripéties au Kenya, au Canada et en Écosse, le film connut un grand succès commercial.

La Guerre du feu n’est pas un simple film d’aventures, une fantaisie du style d’Un Million d’années avant J.C. (One Million Years B.C., Don Chaffey, 1966) ou, pire encore, de 10 000 (10,000 BC, Roland Emmerich, 2008) et Le Clan de la caverne des ours (The Clan of the Cave Bear, Michael Chapman, 1986). Le réalisateur a investi du temps et appelé des talents pour une reconstitution plausible de la vie au paléolithique. Il s’est assuré la coopération, pour la gestuelle, de Desmond Morris, zoologiste, philosophe, comportementaliste réputé et écrivain (notamment auteur de Le Singe nu / The Naked Ape: A Zoologist’s Study of the Human Animal). Et, pour la création du langage oulhamr, il a profité de l’expertise linguistique d’Anthony Burgess, qui s’était déjà exercé à ce jeu avec L’Orange mécanique (A Clockwork Orange, publié en 1962).

La Guerre du feu, comme le roman qui l’a inspiré (une seule autre adaptation en avait été faite dans un court métrage réalisé en 1915 par Georges Denola), montre le profit qu’on peut tirer de la découverte d’autres cultures, certaines plus évoluées, comme celle de la tribu des Ivaka. Ceux-là vivent dans des huttes regroupées en village, fabriquent de la poterie, des propulseurs pour lancer des flèches, savent faire naître le feu par frottement de morceaux de bois et, par-dessus tout, ont inventé… la position du missionnaire !

La Guerre du feu a remporté l’Oscar du maquillage, une juste récompense des stupéfiantes métamorphoses des acteurs et figurants. Pas d’effets spéciaux : les mammouths sont des éléphants déguisés, la trompe enfilée dans un bas tissé sur mesure par Dior sur lequel ont été cousus des poils de yack !

Une sélection des acteurs selon leurs caractéristiques physiques et leur capacité à assimiler une gestuelle patiemment enseignée par un mime, fera retenir quatre débutants qui allaient faire une belle carrière, Ron Perlman en tête, qui venait de quitter son emploi de chauffeur de taxi!

La qualité de l’image et les suppléments de cette nouvelle édition Gaumont va faire remiser au placard celle sortie par EuropaCorp en 2015, sans bonus.

La Guerre du feu (100 minutes) et ses suppléments (100 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50, logé dans un boîtier bleu standard de 11 mm, glissé dans un fourreau.

Le menu animé et musical propose le film dans sa version originale, en « oulhamr », remixée au format audio DTS-HD Master Audio 5.1, proche du son original 6 pistes dans les salles équipées de projecteurs 70 mm, avec une alternative DTS-HD MA 2.0 stéréo.

Des sous-titres pour malentendants indiquent sommairement les intonations du langage, grognement n’est pas gémissement, décrivent les bruits environnants et la tonalité de l’accompagnement musical.

La fonction des sous-titres anglais se limite à la traduction du court texte introductif : « 80,000 years ago… » et du titre du film, Quest for Fire.

Commentaire audio de Jean-Jacques Annaud. Il signale que l’histoire, supposée se dérouler il y a 80 000 ans, pourrait bien remonter à plus de 250 000 ans. La musique de Philippe Sarde est inspirée du compositeur polonais Krzysztof Penderecki. Il fallait cinq heures pour appliquer un maquillage, deux heures pour le retirer… Le luxe des détails fournis dès les premières minutes donne la mesure de l’intérêt documentaire d’un commentaire épicé de notes d’humour. Un modèle du genre !

Retour de flamme (46’, Gaumont Vidéo, 2021). Jean-Jacques Annaud se souvient avoir pu, après une longue quête, aidé par l’Oscar décerné pour son premier film, obtenir l’accord de 20th Century Fox pour la production de La Guerre du feu. Le tournage dut être repoussé par la grève des acteurs, alors que le troupeau d’éléphants voguait déjà vers l’Islande. Pour rendre crédible la reconstitution de la vie au paléolithique, il s’est assuré la collaboration de Desmond Morris et d’Anthony Burgess et a sélectionné acteurs et figurants en fonction de leur morphologie et de leur gestuelle, perfectionnée par un entraînement de six mois. « J’avais un doute habité de certitudes », reconnaît-il toutefois. Une évocation vivante de la concrétisation d’un ambitieux projet.

Retour de flamme : scènes coupées (26’). Certains « spécialistes » ont mis en cause la vraisemblance du film, l’un d’eux prétendant même que l’homo sapiens avait toujours su domestiquer le feu, alors qu’il avait signé la préface laudative d’un ouvrage qui soutenait le contraire ! L’apport de ces scènes coupées est modeste et les redites sur les péripéties avec les éléphants ne manquent pas d’agacer.

À propos de La Guerre du feu (26’, 1981). Ce reportage, réalisé par Michel Parbot pour Antenne 2 au moment de la sortie du film, rappelle les conditions difficiles de l’adaptation au cinéma d’une histoire se déroulant au temps où l’homo sapiens cohabitait avec l’homme du Néandertal. L’essentiel des informations de ce documentaire est repris dans les compléments précédemment proposés.

Bande-annonce.

L’image (2.35:1, 1080p, AVC), lumineuse, bien contrastée, avec des noirs denses, déploie des couleurs agréablement saturées. Elle a été débarrassée de toute trace de détérioration de la pellicule avec une réduction du grain qui a su s’arrêter à temps pour ne pas dénaturer la texture du 35 mm. Les failles relevées sur les éditions précédentes ont été comblées.

Le son DTS-HD Master Audio 5.1 (ou 2.0 stéréo), propre et clair, avec une bonne dynamique, met en valeur la composition originale de Philippe Sarde, interprétée par le London Symphony Orchestra. Elle plonge aussi le spectateur dans l’action par une utilisation généreuse des canaux latéraux, bien qu’on puisse relever, çà et là, un manque de cohérence avec l’image.

Crédits images : © 1981 GAUMONT - TIGON FILMS - FRANCE 2 CINÉMA