Les Nuits de Cabiria (1957) : le test complet du Blu-ray

Le Notti di Cabiria

Mediabook Blu-ray + DVD

Réalisé par Federico Fellini
Avec Giulietta Masina, François Périer et Franca Marzi

Édité par Tamasa Diffusion

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Le 15/06/2021
Critique

Le film qui a confirmé la renommée internationale de Fellini après La Strada, nous revient enfin restauré, dans une édition exceptionnelle.

Les Nuits de Cabiria

Cabiria se prostitue pour vivre, mais cette condition ne l’empêche pas d’être d’une désarmante confiance. Ses « collègues » peuvent bien la railler, elle se défend avec la force que lui donnent ses rêves et espoirs d’une vie meilleure, et rebondit toujours après chaque déconvenue…

Les Nuits de Cabiria (Le Notti di Cabiria), sorti en 1957, est le sixième film de Federico Fellini, dont la réputation internationale avait été assurée par [PROGRAM(strada)], sorti en 1954, salué par l’Oscar du meilleur film étranger et par le Lion d’argent à Venise.

Peut-être le prénom du personnage principal a-t-il été inspiré par celui de l’héroïne du péplum, adapté de Tite Live, réalisé en 1914 par Giovanni Pastrone, Cabiria. C’est celui attribué à la prostituée, Maria Ceccarelli, dans l’histoire imaginée par Federico Fellini et ses deux fidèles scénaristes, Ennio Flaiano et Tullio Pinelli, avec une collaboration, notamment à l’écriture des dialogues, de Pier Paloo Pasolini.

Les Nuits de Cabiria, en prenant ses distances vis-à-vis du néoréalisme, plutôt que raconter une histoire, suit la rencontre de la prostituée avec plusieurs hommes, un voyou qui lui dérobe son sac en la poussant dans le Tibre, un célèbre acteur, un mystérieux bienfaiteur, l’homme au sac, secourant les sans-abri terrés dans les grottes d’un terrain vague (interprété par le monteur du film, Leo Catozzo), un ecclésiastique illuminé, un magicien-hypnotiseur et Oscar, le séducteur. Autant de rencontres qui l’amèneront à réfléchir ou ébranleront son optimisme.

Autour de Giulietta Masina, son épouse depuis 1943, devenue mondialement célèbre depuis son incarnation de Gesomina dans le duo avec Zampanò/Anthony Quinn, Federico Fellini fait appel à Amedeo Nazzari, un des acteurs les plus réputés alors en Italie, dans son propre rôle, à une lettre près, celui d’Alberto Lazzari. Le personnage principal masculin, le séducteur Oscar, est interprété par François Périer, sans que la barrière de la langue soit un obstacle, les dialogues des films italiens étant alors systématiquement postsynchronisés en studio par les acteurs ou par des doublures. La maîtresse de Lazzari est jouée par Dorian Gray, le nom d’actrice choisi par Maria Luisa Mangini, celui du trouble personnage imaginé en 1890 par Oscar Wilde dans son roman The Picture of Dorian Gray qui sera adapté pour l’écran une quinzaine de fois.

Une solide distribution dominée par Giulietta Masina, bouleversante dans son interprétation de Cabiria, une poupée clownesque dont les rêves éclatent comme des bulles de savon. Son escapade sur la Via Veneto tournera court : elle se retrouvera dans le sinistre terrain vague, dont le passé glorieux, celui de la Rome impériale, n’est plus rappelé que par les ruines voisines des thermes de Caracalla. Cabiria reste pourtant inébranlable dans sa foi en un meilleur destin, ravivée par l’hystérie communicative d’un pèlerinage. Cette prestation, remarquable jusque dans l’inoubliable dernier plan, sera récompensée par le Prix d’interprétation féminine à Cannes.

Les Nuits de Cabiria, introuvable depuis des lustres, nous revient, après restauration, en même temps que Les Vitelloni, grâce à Tamasa Diffusion, dans deux éditions exceptionnelles sorties simultanément.

Les Nuits de Cabiria

Présentation - 5,0 / 5

Les Nuits de Cabiria (118 minutes) et ses suppléments (70 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 et sur deux DVD, un DVD-9 pour le film, un DVD-5 pour les compléments, logés dans les couvertures d’un mediabook.

Le menu fixe et musical propose le film dans sa version originale, en italien, avec sous-titres optionnels, au format audio Dolby Digital 2.0 mono et dans un doublage en français au format Linear PCM 2.0 mono sur le Blu-ray, DD 2.0 mono sur le DVD.

Piste d’audiodescription LPCM 2.0 mono (avec dialogues placés trop en avant) et sous-titres pour malentendants.

Un livret de 56 pages, illustré de six caricatures dessinées par le réalisateur et de quelques photos, contient un entretien avec Federico Fellini d’Aldo Tassone, (auteur de Fellini 23 1/2. Tutti i film, 2020). Quelques phrases glanées dans les quarante pages de cet entretien, bien conduit, laissent entrevoir son intérêt. Fellini dit avoir « besoin d’un scénario élastique, aux contours estompés, (…) mais où les idées sont déjà définies (…) pour accueillir toutes les suggestions » pendant le tournage où « tout est utile ». Sur le choix du thème, du genre, « chacun doit réaliser ce qu’il sait faire, (…) avoir quelque chose à dire et les moyens adaptés pour le dire ». « Le cinéma est l’image. L’image est faite de lumière. Donc, dans le cinéma, la lumière c’est tout. (…) . La musique est une expression vitale, elle fait partie intégrante du récit, comme la lumière. » Il choisit lui-même les acteurs, jusqu’aux figurants, à la recherche de « visages expressifs ». Le montage est « prévu au moment du tournage ». Il ne voit pas d’évolution dans sa filmographie, se sentant « toujours immobile, de manière obtuse, têtue ». Mais « J’ai l’impression de n’avoir rien fait d’autre que d’inventer, depuis toujours. (…) Il n’y a pas de souvenirs objectifs, ils sont toujours variables, changeants. » Le tournage ne peut être improvisé, mais « du film qu’on avait en tête, naît un autre film qui lui ressemble. » L’entretien accorde une large place à Casanova, un personnage « encombrant comme un cheval dans une maison, (…) un inépuisable Pinocchio qui n’a pas réussi à devenir un garçon comme il faut. (…) Il n’y a rien dans les Mémoires. On ne se souvient de rien. » L’entretien se termine, après un échange sur l’accusation d’antiféminisme de son cinéma, par cette réflexion : « Je crois que l’homme qui réussit à dépasser les conditionnements qui l’emprisonnent et à s’en nourrir pour tourner son attention vers d’autres horizons, je crois que cet homme-là est plus heureux que celui qui, libéré de tous tabous, trouve ensuite devant lui le vide. »

Les Nuits de Cabiria

Bonus - 3,5 / 5

Dominique Delouche raconte… (36’). Après la projection de La Strada à Venise, mal accueilli, il a témoigné de son admiration à Federico Fellini qui l’a recruté pour le tournage des trois films suivants, Il Bidone, Les Nuits de Cabiria et La Dolce vita, sans lui assigner une mission précise. Il se souvient du tournage, de « l’énergie poétique » de Fellini, des tensions avec Aldo Tonti, le chef-opérateur que lui imposa Dino De Laurentiis au lieu d’Otello Martelli qui assurera toutefois quelques prises de nuit, des dialogues remaniés au dernier moment, dont certains, écrits par Pasolini en romanaccio, un dialecte romain peu compréhensible par tous les Italiens, furent écartés…

Cabiria vu par Jean-Christophe Ferrari, historien et critique de cinéma à Transfuge et France Culture (27’). Le personnage de Cabiria, apparu en 1952 dans Le Cheik blanc (Lo Sciecco bianco), a été inspiré à Federico Fellini par sa rencontre, sur le tournage d’Il Bidone, d’une prostituée qui enjolivait le récit de sa vie. Les Nuits de Cabiria est situé « en marge de Rome », un environnement que connaissait bien Pasolini, le rude cadre de vie de Cabiria, « ballottée par les événements », que la danse semble par moments lui permettre « d’échapper à son destin », avant que la désillusion ne s’impose à elle dans deux scènes « au bord de l’eau », au début et à la fin du film…

Bandes-annonces de 2020 (6’), en VO et VF.

Bande-annonce d’I Vitelloni (1’49”), édité simultanément.

Les Nuits de Cabiria

Image - 4,5 / 5

L’image (1.37:1, 1080p, AVC), restaurée en 4K pour TF1 Studio par L’Immagine Ritrovata en 2019 à partir d’un nouveau marron, a été méticuleusement nettoyée, avec un contrôle idéal du grain, respectueux de la texture du 35 mm. Stable, lumineuse, fermement contrastée, avec des noirs denses, elle déploie un dégradé de gris bien étalonné.

Son - 3,5 / 5

Le son standard Dolby Digital 2.0 mono de la version originale, restauré (ainsi que le doublage) à partir d’un négatif, lui aussi très propre, pratiquement sans souffle, restitue clairement les dialogues et délivre l’accompagnement musical dans une bande passante très étroite, avec un déficit de graves qui lui donne un timbre aigrelet.

Ce constat vaut pour le doublage en français, au format Linear PCM 2.0 mono, avec un accompagnement musical un peu plus rond.

Crédits images : © Dino de Laurentiis Cinematografica, Les Films Marceau

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 15 juin 2021
Les Nuits de Cabiria, un des films majeurs de la première période de Fedrico Fellini, introuvable depuis des lustres, nous revient, après restauration, en même temps que Les Vitelloni, grâce à Tamasa Diffusion, dans deux éditions exceptionnelles sorties simultanément.

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Les Nuits de Cabiria
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