Merrily We Go to Hell (1932) : le test complet du Blu-ray

Restauration haute-définition - Combo Blu-ray + DVD

Réalisé par Dorothy Arzner
Avec Sylvia Sidney, Fredric March et Adrianne Allen

Édité par Elephant Films

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Le 16/11/2021
Critique

La toute première édition française d’un film de Dorothy Arzner, une des rares femmes cinéastes de l’Âge d’or de Hollywood.

Merrily We Go to Hell

Lors d’une soirée, le chroniqueur Jerry Corbett tombe sous le charme de Joan Prentice, jeune héritière d’une famille riche de Chicago. Faisant fi des problèmes d’alcool de son partenaire et des remontrances de son père, Joan se jette à corps perdu dans cette relation.

Merrily We Go to Hell, sorti en 1932, est le dixième des dix-sept films réalisés par Dorothy Arzner de 1927 à 1943, si l’on oublie les quatre qu’elle a coréalisés avec Robert Milton, Henry Hathaway, Edmund Goulding et Richard Boleslawski sans que son nom apparaisse au générique. Oubliée par la quasi-totalité des histoires du cinéma, elle en fut pourtant une pionnière de son industrie et une des très rares réalisatrices de l’Âge d’or du cinéma hollywoodien. Après une solide expérience de monteuse au sein de Paramount, elle s’est lancée dans la réalisation en tournant quelques scènes additionnelles d’Arènes sanglantes (Blood and Sand, Fred Niblo, 1922), puis son premier film, Fashions for Women en 1927, suivi de deux autres muets avant Manhattan Cocktail, son premier film parlant, aujourd’hui perdu.

Merrily We Go to Hell est l’adaptation d’une histoire d’un certain Cleo Lucas, I, Jerry, Take Thee, Joan, par Edwin Justus Mayer futur coscénariste de chefs d’oeuvres comme Désir (Desire, Frank Borzage, 1936) ou, encore, To Be or Not to Be - Jeux dangereux (Ernst Lubitsch, 1942).

Merrily We Go to Hell, même si l’on se force à croire à un improbable happy ending, reste un film sombre avec deux personnages éclipsant tous les autres, y compris celui de Charlie Baxter, interprété par un Cary Grant encore inconnu, tout juste venu d’Angleterre à la conquête de Hollywood.

C’est aussi une bonne illustration de la liberté de ton des films américains avant que les studios ne s’imposent l’autocensure du Code Hays. L’infidélité conjugale est, non seulement mise en brèche, mais ouvertement encouragée par Joan qui propose à son mari coureur de jupons, une relation de couple ouverte, « moderne ». Un carcan qui, à partir de 1964, stimulera l’imagination et les ruses des réalisateurs et scénaristes pour défier ces règles… pour notre plus grande délectation !

Merrily We Go to Hell

Merrily We Go to Hell oppose Fredric March qui venait de rejoindre les acteurs des premiers rangs en venant de décrocher l’Oscar d’interprétation masculine pour rôle-titre de Docteur Jekyll et Mr. Hyde (Rouben Mamoulian, 1931).

L’apparente soumission de Joan, de loin le personnage principal, ne doit pas tromper : elle est fermement résolue à sauver son mariage en dépit des humiliations publiques répétées de Jerry. Cette ambiguïté du personnage est finement communiquée par la jeune Sylvia Sidney, 22 ans, qui venait d’apparaître en tête de distribution de trois films importants sortis en 1931, Les Carrefours de la ville (City Streets) de Rouben Mamoulian, Une tragédie américaine (An American Tragedy) de Josef von Sternberg et Street Scene de King Vidor. On la reverra dans le rôle de la mère de Lydia/Winona Ryder dans Beetlejuice (Tim Burton, 1988).

Cette édition et celle de Honor Among Lovers, sorti simultanément, viennent combler en partie un des manques de notre catalogue vidéo qui, jusque-là, ne proposait de l’oeuvre de Dorothy Arzner qu’un extrait de la comédie musicale Dance, Girl, Dance, sortie en 1940.

Merrily We Go to Hell et Honor Among Lovers, inaugurent la Collection Les Soeurs Lumière, coéditée par Elephant Films, Splendor Films et Extralucid Films, avec trois autres films annoncés à ce jour : Be Natural : l’histoire cachée d’Alice Guy-Blaché (Be Natural: The Untold Story of Alice Guy-Blaché, Pamela B. Green, 2018), Property (Penny Allen, Eric Alan Edwards, 1979) et Old Joy (Kelly Reichardt, 2006), le seul à avoir été préalablement édité en vidéo en France.

Merrily We Go to Hell

Présentation - 2,5 / 5

Merrily We Go to Hell (83 minutes) et ses suppléments (41 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé, dans cette édition combo, en compagnie d’un DVD-9, dans un boîtier Blu-ray glissé dans un fourreau avec, au dos de la jaquette réversible, une reproduction de l’affiche originale.

Le menu fixe et musical propose le film dans sa version originale, en anglais, avec sous-titres optionnels, au format audio DTS-HD Master Audio 2.0 mono.

Sont sorties simultanément deux éditions single, une sur Blu-ray, l’autre sur DVD, avec le même contenu.

À l’intérieur du boîtier, un livret de 12 pages présente succinctement la Collection Les Soeurs Lumière, avec un court synopsis et la liste des bonus.

Bonus - 3,5 / 5

Portrait de Dorothy Arzner par Véronique Le Bris (14’), fondatrice de ciné-Woman.fr et du Prix Alice Guy. Seule femme réalisatrice de l’Âge d’or du cinéma à Hollywood, Dorothy Arzner réalise, Seule femme réalisatrice de l’Âge d’or du cinéma à Hollywood, elle réalise, de 1927 à 1943, une bonne vingtaine de films, dont quatre muets. Ambulancière pendant la première guerre mondiale, elle avait rencontré William C. DeMille, le frère aîné de Cecil B. DeMille : il l’invita sur un plateau, ce qui lui donna l’envie de devenir réalisatrice. Entrée par la petite porte comme secrétaire, puis monteuse d’une cinquantaine de films, elle obtint en 1927 de Paramount la production de son premier film, Fashions for Women, puis la signature d’un contrat de réalisatrice. Elle tourne avec une star de l’époque, Clara Bowe, son premier film parlant, Les Endiablées (The Wild Party, 1929), dont le succès booste sa carrière et celle de Fredric March. Elle devient cinéaste indépendante et réalise en 1933 un film important, Christopher Strong (La Phalène d’argent) dans lequel Katherine Hepburn tient son deuxième rôle. Puis, en 1936, Craig’s Wife, vu comme un de ses meilleurs films, avec Dance, Girl, Dance. Elle s’est démarquée par des personnages féminins complexes et forts et par la révélation de son homosexualité, deux caractéristiques pouvant expliquer qu’elle ait été si longtemps oubliée. Un supplément qu’on retrouve dans l’édition de Honor Among Lovers.

Merrily We Go to Hell

Entretien avec Laura Tuillier (25’), critique de cinéma à Libération. Avec les brillants dialogues d’Edwin Justus Mayer, des mouvements de caméra fluides et les audaces du pré-code, notamment dans sa représentation crue de l’alcoolisme. Après une brève revue la carrière des acteurs, de Frederic March, un coutumier de la filmographie de Dorothy Arzner, puis de Sylvia Sidney, une habituée des rôles de femmes désespérées, Laura Tuillier analyse la complexe relation du couple qui annonce, dans une tonalité amère, les « remarriage comedies » des années 30 et 40. Le film fut un succès commercial, mais quelques scènes d’ébriété ou d’affaires extra-conjugales furent censurées dans certains états. Le titre du film souleva même des protestations après l’entrée en vigueur du Code Hays. Une pertinente analyse du scénario replacé dans son contexte historique.

Le film par Véronique Le Bris (2’). « Un film assez sombre, crépusculaire », le dernier que Dorothy Arzner tournera pour Paramount, auquel l’interprétation par les deux acteurs de personnages « allant contre la raison » donne toute son intensité.

La collection Soeurs Lumière avec les bandes-annonces annonces de quatre des cinq films (manque celle de Old Joy).

Merrily We Go to Hell

Image - 5,0 / 5

L’image (1.37:1, 1080p, AVC), après numérisation 4K et une restauration opérée pour l’édition Criterion sortie en mai 2021, est magnifique, débarrassée de toute trace de détérioration de la pellicule, stable, lumineuse et agréablement contrastée avec des noirs denses, jamais bouchés. Une restauration exemplaire qui a respecté le grain du 35 mm.

Son - 4,0 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 2.0 mono, lui aussi très propre, fait parfaitement l’affaire en restituant clairement les dialogues, avec les limitations inhérentes à son âge, en particulier d’une bande passante concentrée dans le medium.

Crédits images : © Paramount Pictures

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 16 novembre 2021
Ce mélodrame réussi et Honor Among Lovers, sorti simultanément, sont les seuls films édités en vidéo en France de l’œuvre de Dorothy Arzner, une des rares réalisatrices à avoir réussi à percer à Hollywood, pourtant largement oubliée par les historiens du cinéma. Cette édition s’inscrit dans la collection Les Sœurs Lumière, un hommage aux pionnières du cinéma.

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