Les Guerriers de la nuit (1979) : le test complet du Blu-ray

The Warriors

Ultimate Director's Cut - Boîtier SteelBook

Réalisé par Walter Hill
Avec Michael Beck, James Remar et Dorsey Wright

Édité par Paramount Pictures France

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Le 15/12/2022
Critique

Le titre le plus célèbre de Hill, adapté d’un roman américain inspiré par le récit antique de Xénophon.

Les Guerriers de la nuit

New York, USA, dans un futur proche : les Warriors se rendent au rassemblement organisé par le charismatique Cyrus qui veut constituer une armée unifiée de jeunes gangs afin de s’emparer de la ville. Pendant son discours, Cyrus est assassiné par Luther (le chef des Rogues) qui accuse Cléon (le chef des Warriors) d’être l’auteur du crime : Cléon est tué sur le champ. Son lieutenant Swan et les 7 autres Warriors, devenus des cibles pour tous les gangs de la ville, vont devoir combattre, de nuit et soumis à des embuscades incessantes, durant les 40 kilomètres qui les séparent de leur territoire de Coney Island. Seront-ils encore vivants aux premières lueurs de l’aube ?

Sorti à Paris le 27 août 1980, Les Guerriers de la nuit (The Warriors, USA 1979) de Walter Hill est adapté d’un roman de Sol Yurick, lui-même inspiré par l’historien antique grec Xénophon qui racontait dans l’Anabase la célèbre retraite tactique des 10 000 mercenaires grecs qu’il avait personnellement commandés et ramenés, en 401 avant Jésus-Christ, de Babylone jusqu’en Grèce. C’est le producteur Lawrence Gordon qui découvrit le livre de Yurick : il en acheta les droits d’adaptation dans la foulée. Ce fut aussi Gordon qui embaucha David Schaber pour en tirer un scénario et qui approcha Walter Hill pour le réaliser car ils avaient déjà travaillé ensemble sur Le Bagarreur (Hard Times, USA 1975) de Hill et sur Driver (USA 1978) de Hill.

Les Guerriers de la nuit comportait initialement une séquence d’introduction diurne qui présentait chaque membre du gang et sa fonction mais Hill et ses producteurs ne la conservèrent pas : on jugea préférable, étant donné que l’action était presque entièrement nocturne, de faire débuter directement le film à la tombée de la nuit. Sur l’ensemble du tournage, une seule séquence (celle de l’attaque dans les toilettes) fut tournée en studio : tout le reste le fut en extérieurs urbains réels. La director’s cut de 2005 rajoute environ 50 secondes d’effets numériques matérialisant certaines transitions sous la forme de gel d’images argentiques puis leur transformation en image de bandes-dessinées, au lieu des effets originels de fondus au rideau sur pellicule argentique. Cela peut paraître idiot à qui ignore la genèse du film mais on comprend mieux cette décision lorsqu’on sait que, dans le livre de Yurick, le plus jeune des Warriors lisait précisément une adaptation en bandes-dessinées du récit autobiographique du général grec Xénophon. Et certains des noms portés par les Warriors sont des noms grecs de l’antiquité classique qu’on retrouve déjà chez Homère : celui d’un des héros de l’Illiade, Ajax, par exemple. En somme, Hill boucle clairement la boucle culturelle et historique par cet artifice technique de 2005 mais il la boucle d’une manière tout de même un peu lourde qui n’apporte véritablement rien à l’action, qui lui fait même perdre un peu de son rythme.

Le montage original de 1979 me semble donc assurément demeurer supérieur à la pesante insistance de la director’s cut de 2005 qui donna, à son tour, matière à un jeu disponible sur diverses consoles (Playstation 2 et Xbox). Peut-être Hill, du fait de la sortie du jeu, avait-il été tenu de conférer a posteriori une certaine portée éducative et morale aux Guerriers de la nuit ? En 1979 à sa sortie américaine comme en 1980 à sa sortie en France, on se souvient que le titre avait été en butte aux censures qui négligeaient ses références culturelles pour se focaliser sur sa violence graphique et sur le slogan de son affiche américaine originale (*), jugé provocateur. Ces aménagements quasi-scolaires de 2005 lui font perdre un peu de sa virulence initiale. Certes basés sur l’histoire ancienne de l’antiquité classique, livre et scénario adaptés visaient un futur proche, indéterminé mais forcément marqué par un passé récent : l’assassinat de Cyrus renvoie ainsi, structurellement et assez clairement, à celui de Martin Luther King ; la comparaison s’arrête là puisque Cyrus, pour sa part, veut constituer une armée afin de rançonner New York, mais elle demeure tout de même en arrière-plan, conférant à l’ouverture du film un étrange parfum, sinon de science-fiction, au moins de politique-fiction discrètement référentielle.

L’esthétique des Guerriers de la nuit est celle d’un hyper-réalisme urbain confinant plus d’une fois au fantastique cauchemardesque. Sont également à porter au crédit de Hill, un générique d’ouverture admirablement monté dont l’efficacité narrative installe immédiatement au coeur de l’action ; quelques touches d’un authentique lyrisme (le baiser en clair-obscur de Swan et Mercy éclairés par la rame de métro) ; une critique sociale humaniste et parfois assez virulente (notamment portée par le personnage féminin principal) ; une ultra-violence graphique chorégraphiée au millimètre (les ralentis imitant ceux du cinéaste Sam Peckinpah sans oublier un hommage au cinéaste Stanley Kubrick car le gang des Baseball Furies évoque évidemment celui vu dans Orange mécanique). L’une des grandes forces du film réside aussi dans son interprétation, globalement bonne. Sans oublier une ironie glacée du montage qui ponctue un climat de tension pourtant déjà souvent poussé à son paroxysme : lors d’une poursuite, on passe devant une affiche publicitaire où est écrit « In This City, You Need A Voice ! » (« Dans cette ville, vous avez besoin d’une voix ! ») alors que c’est précisément la voix d’une radio privée qui a déclenché les hostilités : témoignage historique de l’influence des radios privées implantées depuis longtemps aux USA alors qu’elles émergeaient, avec beaucoup de retard, en Europe. Ce mélange de tons et ces références confèrent au Guerriers de la nuit, une très réelle et très intacte puissance.

(*) « These are the armies of the night. They are 100,000 strong. They outnumber the cops five to one. They could run New York City » qu’on peut littéralement traduire par « Voici les armées de la nuit, fortes de 100 000 soldats. Leur nombre surpasse celui de la police dans un rapport de 5 contre 1. Elles pourraient s’emparer de la ville de New York ». La bande-annonce et les dialogues réduisent le nombre à 60 000.

Les Guerriers de la nuit

Présentation - 3,5 / 5

1 Blu-ray BD-25 multi-régions ABC, édité par Paramount le 07 décembre 2022. Image Full HD au format 1.78 (à partir d’un 1.85 réel) en couleurs et compatible 16/9, 1920 x 1080p AVC. Son : VF d’époque + VEspagnole en Dolby Audio DD 2.0 mono + VOSTF américaine remastérisée en 5.1. Durée du film 94 min. environ. Suppléments : présentation du cinéaste Walter Hill (2005) + documentaire de Laurent Bouzereau divisé en 4 sections « featurettes » (2005) + bande-annonce originale cinéma (1978). Boîtier « Steelbook » et belle sérigraphie en couleurs au recto, en N&B au verso. Le boîtier est muni d’une fiche cartonnée rabattue, constituant un verso alternatif avec les informations habituelles, le titre français d’exploitation sur une face, le titre américain original sur l’autre. Elle affirme que la director’s cut 2005 est plus violente que la version cinéma originale de 1979 : cet argument publicitaire est inexact. Il n’y a, sur le plan de la violence graphique, strictement aucune différence entre les deux versions. Sur l’exemplaire reçu, la fiche cartonnée se décollait plus ou moins du boîtier : j’ai préféré la décoller définitivement et la ranger à l’intérieur. Pourquoi n’avoir pas proposé, en plus de cette director’s cut 2005, la version cinéma 1979 d’origine au format 1.85  ? Il suffisait de la mettre en bonus ou sur un autre disque rangé dans le même boîtier afin que les cinéphiles puissent visionner et comparer les deux versions. Si une telle offre était un jour proposée par Paramount (ce que je souhaite), c’est clairement la version 1979 qui devrait être le film principal du menu et la version director’s cut 2005 qui devrait être proposée en bonus.

Les Guerriers de la nuit

Bonus - 4,0 / 5

Présentation par Walter Hill (2005, 1’18”, VOSTF) : cette brève introduction de la director’s cut, ici reprise comme bonus mais qui apparaît déjà lorsqu’on lance le film, établit formellement le parallèle entre l’Anabase de Xénophon et l’histoire du film ; elle définit leur point commun : être une histoire de courage. Ce n’est pas faux : je pense que c’est d’ailleurs la raison pour laquelle le président Reagan (ancien acteur émérite) avait aimé le film. Selon une savoureuse anecdote, il aurait téléphoné à l’acteur principal Michael Beck pour lui dire qu’il avait visionné Les Guerriers de la nuit à Camp David et l’avait beaucoup apprécié.

Documentaire de Laurent Bouzereau divisé en 4 sections (2005, VOSTF) : Le Début (14’07”) couvre la genèse du film, les divers problèmes de sa production et de son casting + Champ de bataille (15’24”) évoque le tournage d’une manière détaillée + Le Chemin du retour (18’07”) en constitue la suite, couvrant parfois certains aspects techniques avec le directeur de la photo Andrew Laszlo + Le Phénomène (15’23”) évoque la sortie du film, les aléas sociologiques de son exploitation, son succès commercial puis, plus tard, critique. Remarquable documentaire signé par Bouzereau : on le trouvait déjà sur l’ancienne édition américaine DVD zone 1 NTSC de novembre 2005. Il couvre tous les aspects du film depuis la découverte du livre par le producteur Lawrence Gordon jusqu’à sa réception commerciale et critique. Les techniciens et acteurs principaux, les producteurs, le réalisateur évoquent d’une manière très précise les divers aspects du film. On peut également y visionner quelques plans de la première séquence d’ouverture initialement tournée par Hill mais retirée au montage. Nombreuses photos de plateau et de tournage, couleurs et N&B.

Bande-annonce cinéma (2’02”, VO sans STF, 1978) : en mauvais état argentique mais au format large respecté, en VO 2.0 mono, durée 2min., belle et au commentaire bien conçu. Deux éléments intéressants à relever sur le plan de l’histoire du cinéma et de l’histoire de l’exploitation qui en constitue une section à part entière : elle mentionne que le film a été approuvé pour tous publics alors qu’il sera, par la suite, classé R (restricted) ; elle est datée au copyright 1978 alors que les copies du long-métrage de référence sont toutes estampillées 1979 au générique. Cette différence d’une année est fréquente lorsqu’on compare les bandes-annonces et les films longs-métrages de référence. La date qui l’emporte, sur le plan historique, doit toujours être celle mentionnée sur les génériques du long-métrage de référence.

Ensemble remarquable auquel il ne manque qu’une solide galerie affiches et photos d’exploitation pour mériter la note maximale.

Les Guerriers de la nuit

Image - 4,0 / 5

Format 1.77 / 1.78 à partir du 1.85 original, compatible 16/9 et couleurs. La director’s cut 2005 est dotée d’une image (argentique comme numérique) remarquable mais j’aurais préféré que le format fût strictement respecté même si le recadrage n’a pas, en Blu-ray, les conséquences qu’il avait à l’époque du DVD. Les couleurs sont admirablement restituées : les rouges des lettres du générique sont, par exemple, impeccablement délimités. La définition est pointue ; la gestion de la lumière et des contrastes est impeccable. Presque aucune poussière positive ni négative, ni aucune rémanence dans les scènes nocturnes : ce dernier point était fondamental puisque l’action du film se déroule durant toute une nuit jusqu’à l’aube. Bruit vidéo parfaitement contrôlé. Les effets numériques 2005 rajoutés à la director’s cut sont techniquement soignés. Un détail intéressant sur le plan de l’image : le directeur photo Andrew Lazslo suggéra et obtint du réalisateur qu’une séquence de pluie torrentielle fût insérée assez tôt dans la continuité : cela lui permit de photographier par la suite de beaux effets de reflets de couleurs sur des flaques d’eau.

Les Guerriers de la nuit

Son - 4,5 / 5

VF d’époque (et VEspagnole) en Dolby Audio DD 2.0 mono + VOSTF américaine remastérisée en 5.1. : offre nécessaire et suffisante pour le cinéphile francophone. L’ancienne VO 2.0 originale (qu’on trouvait sur l’ancien DVD zone 1 NTSC édité par Paramount en novembre 2005 et qui résistait techniquement bien à l’épreuve du temps) n’est plus proposée puisque le montage image 1979 n’est pas non plus ici proposé. Convenons que la remastérisation 5.1 de cette director’s cut est énergique. La VF d’époque modifie assez souvent le dialogue américain original et certaines voix françaises sont inférieures en qualité dramaturgique aux voix américaines : je recommande, par conséquent, de privilégier la VOSTF. Chansons d’époque intégrées explicitement à l’action : la plus belle est peut-être Love is a fire (chantée par Genya Raven) qu’écoutent les dangereuses Lizzies ; la plus emblématique demeure la fameuse No where to run. Notez que, dans la version originale 1979, le générique de fin était suivi d’un écran noir d’environ 3 minutes durant lequel on entendait la chanson In the City de Joey Walsh. Musique électronique (alliant Rock et synthétiseurs) signée Barry de Vorzon, remarquablement utilisée et, à l’époque, novatrice.

Crédits images : © Paramount Pictures, Lawrence Gordon

Configuration de test
  • Téléviseur 4K LG Oled C7T 65" Dolby Vision
  • Panasonic BD60
  • Ampli Sony
Note du disque
Avis

Moyenne

4,0
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francis moury
Le 16 décembre 2022
Le titre le plus célèbre de Hill, sur un scénario adapté d’un roman américain lui-même inspiré par le célèbre récit antique de Xénophon ; ici présenté dans sa version director's cut.
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Réal
Le 26 juillet 2007
Pas de commentaire.
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salade
Le 14 février 2004
Un film culte qui n'a pas vieillit!

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