Le Baiser devant le miroir (1933) : le test complet du Blu-ray

The Kiss Before the Mirror

Combo Blu-ray + DVD

Réalisé par James Whale
Avec Nancy Carroll (I), Frank Morgan et Paul Lukas

Édité par Elephant Films

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Le 25/07/2023
Critique

Première édition vidéo d’un des quelques vingt films de James Whale dont la filmographie est trop souvent réduite à quatre films d’horreur.

Le Baiser devant le miroir

Alors que Walter Bernsdorf embrasse sa femme Lucy pendant qu’elle se maquille devant un miroir, elle le rejette. Intrigué, il la suit. Ses soupçons sont confirmés : elle rejoint un amant. Il la tue de trois balles de revolver et appelle aussitôt la police pour avouer son crime. Paul Held, un avocat qui suspecte l’infidélité de son épouse Maria, assure son ami Walter qu’il obtiendra son acquittement…

Le Baiser devant le miroir (The Kiss Before the Mirror) est l’adaptation d’une pièce de Ladislas Fodor, dramaturge d’origine hongroise installé à Vienne qu’il quittera en 1938 pour la France, puis pour Hollywood avant de regagner l’Allemagne dans les années 50. Ses pièces inspirèrent une trentaine d’adaptations pour l’écran et il signa autant de scénarios, parmi lesquels ceux de L’Orchidée blanche (The Other Love, André De Toth, 1947) et de La Vengeance de Siegfried (Die Nibelungen: Siegfried, Harald Reinl, 1966).

Le Baiser devant le miroir, sorti en 1933, est le septième de la vingtaine de longs métrages réalisés en onze ans à Hollywood par le Britannique James Whale, presque exclusivement connu pour ses seuls quatre films d’horreur, Frankenstein (1931), La Maison de la mort (The Old Dark House, 1932), L’Homme invisible (The Invisible Man, 1933) et La Fiancée de Frankenstein (The Bride of Frankenstein, 1935). Il toucha pourtant, avec un indéniable talent, à tous les genres, le mélodrame, la comédie, la comédie musicale, le film en costumes, l’aventure, jusqu’à sa retraite à la fin des années 40. Il se suicidera en 1957.

Le Baiser devant le miroir

The greater the love, the greater the hate!

Le Baiser devant le miroir, une association de mélodrame et de courtroom drama, tire un sérieux atout d’une prestigieuse distribution réunissant Paul Lukas (Les Carrefours de la ville / City Streets, Rouben Mamoulian, 1931, Une femme disparaît / The Lady Vanishes, Alfred Hitchcock, 1938), Frank Morgan, acteur populaire avec son incarnation d’une centaine de personnages, souvent secondaires, tel le magicien d’Oz, Nancy Carroll, une des stars des années 30 qui venait d’inscrire son nom en tête de l’affiche de L’Homme que j’ai tué (Broken Lullaby, Ernst Lubitsch, 1932), et, dans le rôle furtif de Lucy, l’épouse assassinée, Gloria Stuart, disparue à l’âge de 100 ans en 2010 qui tint en fin d’une longue carrière le rôle de Rose âgée dans le Titanic de James Cameron.

Un intérêt majeur du film tient à la photographie de Karl Freund (1890-1969). Un des plus grands directeurs de la photographie des années 20 à 40, un des maîtres de l’expressionnisme allemand, il collabora avec les plus prestigieux réalisateurs. Il fut, par exemple, le chef-opérateur de Metropolis, du Dracula de Tod Browning (qu’il coréalisa), de Key Largo…. Sa science des éclairages souligne la beauté stylée des décors et des costumes de Le Baiser devant le miroir.

On doit saluer l’initiative prise par Elephant Films de nous proposer cette année, en trois éditions enrichies de bonus exclusifs, quatre films de James Whale encore absents de nos catalogues vidéo : L’Enfer vert (Green Hell, 1940), sorti en janvier 2023, une palpitante aventure avec Douglas Fairbanks Jr. et Joan Bennett en tête d’affiche, et, sortis en mai 2023, Court-circuit (By Candlelight, 1933), Le Baiser devant le miroir avec, en bonus, son remake de 1938, Femmes délaissées (Wives Under Suspicion).

Le Baiser devant le miroir

Présentation - 3,5 / 5

Le Baiser devant le miroir (68 minutes) et ses généreux suppléments (118 minutes) tiennent, dans cette édition combo, sur un Blu-ray BD-50 et sur un DVD-9 avec le même contenu, logés dans un boîtier de l’imposante Collection Cinéma MasterClass. Le test a été effectué sur le seul Blu-ray.

Le menu propose le film dans sa version originale, en anglais, avec sous-titres optionnels par Elephant Films (blancs ou jaunes au choix !), au format audio DTS-HD Master Audio 2.0 mono.

Sous-titres anglais disponibles.

À l’intérieur du boîtier, un livret de 20 pages intitulé L’Énigme James Whale, 1. Mythe et réalité, par Denis Rossano, auteur français de plusieurs ouvrages, dont Un père sans enfant, consacré à Douglas Sirk (Allary Éditions, 2019). En dépit des nombreuses pages écrites sur lui et du biopic Ni dieux ni démons (Gods and Monsters, Bill Condon, 1998), James Whale reste peu connu, souvent « réduit à ses quatre incursions dans l’horreur » alors qu’il signa 21 films et aborda à peu près tous les genres ». Denis Rossano résume la vie de James Whale. Après s’être vite imposé comme un grand réalisateur, né dans une famille pauvre des Midlands, engagé dans l’armée en 1915, fait prisonnier en 1917, il s’essaie au théâtre populaire, puis classique, dessine des décors, met en scène en 1929 une pièce de R.C. Sherriff, La Fin du voyage (Journey’s End) dont le succès planétaire lui valut d’être appelé à Hollywood pour en réaliser une adaptation pour le cinéma qui connut un bel accueil public et critique. Suit une brève revue des films produits par Carl Laemmle Jr., fondateur du studio Universal. Frankenstein et La Fiancée de Frankenstein font de James Whale « un réalisateur majeur, connu du grand public » qui exerça « son influence sur Alfred Hitchcock, Brian De Palma, George A. Romero ou David Lynch ». La suite de L’Énigme James Whale, 2. Disgrâce et 3. The end complète les éditions de Court-circuit et de L’Enfer vert.

Sont également disponibles deux éditions single, avec les mêmes bonus vidéo. Le livret accompagnant le DVD est absent de l’édition Blu-ray à prix réduit.

Le Baiser devant le miroir

Bonus - 3,5 / 5

Le film par Jean-Pierre Dionnet (6’). Avec sa prononciation bizarre du nom du réalisateur (« wall », comme le mur), Jean-Pierre Dionnet résume la carrière de Ladislas Fodor, rappelle que Karl Freund, après avoir été un des maîtres de l’expressionnisme, avait reconverti son style depuis Key Largo (John Huston, 1948) et inventé le tournage avec trois caméras sur les plateaux de télévision. Il souligne les costumes d’Eugene Joseff (Autant en emporte le vent), la « pétulance » de Nancy Caroll, la longue vie de Gloria Stuart (1910-2010), la carrière remplie de Frank Morgan, cent rôles à son tableau, dont celui du magicien d’Oz.

Analyse de séquences par Fabien Mauro (30’). Dans son analyse de quatre séquences, Le meurtre, Les avocats, Le miroir et La plaidoirie, l’auteur et essayiste commente les décors de Charles D. Hall, les éclairages de Karl Freund, la signification des cadrages, des mouvements de caméra, des reflets dans les miroirs et révèle des références à d’autres films.

Portrait de James Whale (16’). Jean-Pierre Dionnet l’affirme : « James Whale est un malentendu, car ce n’est pas un metteur en scène de films d’horreur (…) comme Tod Browning qui n’a fait que ça toute sa vie ». Il rappelle sa vie, son accès au grade de colonel pendant la Grande guerre, puis son expérience du théâtre avant le cinéma et la réalisation de Frankenstein qui fit sa réputation à Hollywood. Suit une rapide revue des films, dans tous les genres, « d’un des grands metteurs en scène des années 30 » avec « son chef-d’oeuvre absolu de l’horreur », La Fiancée de Frankenstein (1935).

Femmes délaissées (Wives Under Suspicion, noir et blanc, 1.37:1, MPEG-2, DTS-HD Master Audio 2.0 mono, 66’), remake, tourné en 1938, de The Kiss Before the Mirror. Le zélé procureur Jim Stowell avoue ne vivre que pour faire condamner les criminels et comptabilise les sentences capitales obtenues, 11 depuis le début de l’année, sur un boulier fait de crânes. Il diffère son départ en vacances, déterminé à envoyer sur la chaise électrique un riche universitaire, le professeur Shaw MacAllen, que la police vient d’arrêter pour le meurtre de son épouse infidèle. Stowell, à son tour, découvre que son épouse Lucy le trompe… L’intrigue de The Kiss Before the Mirror a été reprise, mais simplifiée et focalisée sur le personnage du procureur Stowell, avec une distribution solide et une représentation elliptique de l’infidélité et une fin moralisatrice, sous l’influence du code Hays, entré en vigueur en 1934. Une copie non restaurée, mais assez correctement conservée, d’un remake un peu pâle.

Le Baiser devant le miroir

Image - 4,5 / 5

L’image (1080p, AVC), au ratio original 1.37:1, a été débarrassée des marques du temps par une soigneuse restauration qui a préservé le grain de la pellicule, sans rechercher un gain de résolution par un lissage qui aurait dénaturé la texture originelle. Stable, elle offre un dégradé de gris bien étalonné, entre blancs lumineux et noirs très denses, mettant en valeur les beaux éclairages expressionnistes et la photographie de Karl Freund.

Son - 4,0 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 2.0 mono, lui aussi très propre, à la bande passante nécessairement étroite, restitue les dialogues avec la carté attendue. L’ambiance et l’accompagnement musical sont délivrés avec quelques saturations.

Crédits images : © Universal Pictures

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

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Philippe Gautreau
Le 26 juillet 2023
Trois films de James Whale encore absents de nos catalogues vidéo ont été édités cette année par Elephant Films. Sublimé par la photographie de Karl Freund, Le Baiser devant le miroir est l’un de ceux qui démontrent que le talent du réalisateur de Frankenstein pouvait s'exprimer hors du registre de l’horreur.

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