Tár (2022) : le test complet du Blu-ray

Grandeur et décadence d’une femme chef d’orchestre accusée de harcèlement, un poignant récit écrit et mis en image par Todd Field.

Lydia Tár, première femme à occuper le poste de chef du Berliner Philharmoniker, mariée à Sharon, premier violon de l’orchestre, a fondé Accordion dont l’objet est de soutenir les jeunes femmes chefs d’orchestre. Elle s’apprête, pour achever son cycle des symphonies de Gustav Mahler, à enregistrer la Symphonie n° 5 et à publier son autobiographie, Tár on Tár, quand tombe la nouvelle du suicide de Krista Taylor, une jeune chef d’orchestre qu’elle a intimement connue. La rumeur la rend responsable de la mort de cette femme qu’elle aurait harcelée…

Tár, sorti aux USA en octobre 2022, dans nos salles en janvier 2023, trois fois nommé aux Oscars du Meilleur film, du Meilleur scénario et de la Meilleure réalisation, est le troisième long métrage écrit et réalisé par Todd Field, après deux films bien reçus par la critique et le public, In the Bedroom (2001) et Little Children (2008).

Todd Field a commencé comme acteur. Il tint une quarantaine de rôles sur le grand et le petit écran, depuis une apparition dans Radio Days (Woody Allen, 1987), avant que son nom ne s’inscrive sur plusieurs affiches, notamment celles de Ruby in Paradise (Victor Nunez, 1993), de Twister (Jan de Bont, 1996), de Eyes Wide Shut (Stanley Kubrick, 1999). Parallèlement, de 1992 à 1996, il réalise six courts métrages, avant In the Bedroom, six fois nommé aux Oscars, notamment du Meilleur film et Meilleur scénario.

Tár aborde plusieurs thèmes : l’accession d’une femme à un emploi traditionnellement occupé par des hommes, le pouvoir acquis par la célébrité et l’abus qu’on peut en faire, les sentences médiatiques vite rendues avant que la justice ne soit saisie, les dégâts qu’elle peuvent causer et, bien sûr, la musique.

Tár intéressera particulièrement les mélomanes pour la pertinence de ses nombreux commentaires sur la musique, « ce langage universel capable d’engendrer des sensations qu’aucun mot ne peut définir ». Un immense plus : chaque musicien joue réellement son instrument. Pas de doigts n’importe où sur les cordes, une des erreurs qui gâchent gravement les passages musicaux de trop nombreux films ! On apprécie aussi l’irréprochable qualité du son des extraits musicaux de Mahler et d’Elgar et la composition originale de Hildur Guðnadóttir qu’on connaissait déjà, notamment pour la partition, saluée par un Oscar, de Joker (Todd Phillips, 2019) ou celle de l’excellente minisérie Chernobyl, créée par Craig Mazin en 2019.

Tár, Todd Field l’a affirmé, a été écrit pour Cate Blanchett. Présente dans tous les plans, elle étonne, dès les premières scènes, par son apparente aisance dans les longues tirades où elle semble transmettre une intime connaissance de la musique classique et par la diversité d’un jeu exprimant, tour à tour, la bonté vis-à-vis de Petra, la fille de Sharon, une agressive dérision à l’encontre d’un étudiant de la Julliard School disant ne pas aimer Bach, l’abattement engendré par les rumeurs sapant sa réputation, le déchaînement de fureur à l’encontre du chef d’orchestre qui dirige à sa place la Cinquième de Mahler. Une performance justement récompensée par la Coupe Volpi d’interprétation féminine et le Golden Globe de la meilleure actrice dans un film dramatique.

Cate Blanchett est bien entourée, par Noémie Merlant (Portrait de la jeune fille en feu, Céline Sciamma, 2019), Nina Hoss, Mark Strong, etc., ainsi que par une jeune violoncelliste britannique apparaissant pour la première fois sur un écran, Sophie Kauer.

On a aussi apprécié la photographie, sélectionnée pour l’Oscar, de Florian Hoffmeister, que nous avions loué pour sa contribution à Emily Dickinson, A Quiet Passion (Terence Davies, 2016).

Tár (158 minutes) tient sur un Blu-ray BD-50 logé dans le traditionnel boîtier bleu.

Le menu propose le film dans sa version originale, en anglais et en allemand, et dans un doublage en allemand, les deux au format audio Dolby Atmos, core Dolby TrueHD 7.1, ainsi qu’en français et en italien au format Dolby Digital Plus 7.1.

Sous-titres dans onze langues, dont le français (et l’anglais pour malentendants).

Piste d’audiodescription en anglais Dolby Digital 2.0.

Une édition 4K UltraHD est sortie aux USA en décembre 2022, sous-titrée en français.

Aucun supplément.

L’image numérique (1080p, AVC), au ratio original de 2.39:1, capturée par des caméras Arri Alexa 65 et Arri Alexa Mini, avec une fine résolution, tant dans les gros plans et les plans larges qu’en pleine lumière ou dans l’obscurité, déploie des couleurs naturelles, délicatement saturées et parfaitement étalonnées. Une qualité qui fait regretter que l’édition UltraHD ne soit pas distribuée en France.

Le son Dolby Digital Atmos, testé sous le format compatible Dolby TrueHD 7.1, en plus d’assurer la clarté des dialogues, donne, avec une forte dynamique et une large ouverture du spectre sonore, ampleur et aération aux passages musicaux, notamment aux extraits de la Cinquième symphonie de Mahler et du Concerto pour violoncelle d’Edward Elgar. Une répartition équilibrée du signal sur les sept canaux et le caisson de graves génère un convaincant effet enveloppant.

L’effet immersif est légèrement atténué dans le doublage en français assez soigné, au format Dolby Digital Plus 7.1.

Crédits images : © 2022 Focus Features, LLC.