La Clé

La Clé (1983) : le test complet du Blu-ray

La Chiave

Édition Collector Blu-ray + DVD + Livret

Réalisé par Tinto Brass
Avec Stefania Sandrelli, Frank Finlay et Franco Branciaroli

Édité par Sidonis Calysta

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Le 28/11/2023
Critique

Premier titre de la Collection Tinto Brass, « le maître du cinéma érotique italien », une nouvelle collection lancée par Sidonis Calysta.

La Clé

En 1940 à Venise. Nino Rolfe, professeur à l’École des Beaux-Arts, expert des oeuvres de Gustav Klimt et d’Egon Schiele, marié depuis 20 ans à Teresa, commence à écrire un journal dans lequel il consigne ses fantasmes sexuels. Pour que Teresa le lise, il laisse délibérément en vue la clé de son secrétaire. Teresa va lui répondre en ouvrant, elle aussi, un journal où elle note les aspects cachés de sa vie amoureuse. La lecture des deux journaux par le mari et la femme libère la pudeur qui inhibait leurs relations sexuelles.

La Clé (La Chiave), sorti en 1983, le treizième des vingt-cinq longs métrages réalisés par Tinto Brass, est l’adaptation de Kagi, le roman publié en 1956 par l’écrivain japonais Jun’ichirō Tanizaki (1886-1965). Ce roman avait précédemment été adapté par Kon Ichikawa en 1959 en un film salué à Cannes en 1960 par le Prix du jury (ex-aequo avec L’Avventura d’Antonioni), puis par Tatsumi Kumashiro en 1974. Les oeuvres de Tanizaki ont inspiré plus de soixante films, dont Miss Oyu (Oyû-sama), réalisé en 1951 par Kenji Mizoguchi et Tatouage (Irezumi), réalisé par Yasuzo Masumura en 1966.

Tinto Brass, né en 1933, licencié en droit, répondit à son attraction par le cinéma en étant archiviste à la Cinémathèque Française dès la fin des années 50, puis assistant de Joris Ivens, d’Alberto Cavalcanti et de Roberto Rossellini. Il réalisa en 1963 son premier long métrage, Chi lavora è perduto (In capo al mondo), sélectionné à Venise, comme le sera, pour le Lion d’or, Col cuore in gola. Sa filmographie sera essentiellement tournée vers l’érotisme.

La Clé

La Clé, sur un scénario de Tinto Brass, a été tourné à Venise, là où il a passé son enfance et son adolescence, « ma ville mystérieuse, caressante, sournoise, (…) idéale pour raconter cette histoire », dit-il dans l’interview jointe en bonus. La Cité des doges est amoureusement photographiée, souvent dans la brume, avec un accompagnement musical composé par Ennio Morricone, en partie inspiré par une variation d’Arnold Schönberg sur une valse de Johann Strauss.

Scrivo questo diario nella speranza che tu lo leggi…

« J’écris ce journal dans l’espoir que tu le lises (…) pour violer cette maudite pudeur qui te fait encore rougir après vingt ans de mariage ». Une invitation, lancée par un mari âgé à son épouse beaucoup plus jeune, à raviver une flamme étouffée par les convenances et la routine.

La Clé dépouille de tout voile le corps des trois personnages formant un triangle amoureux, Teresa, Nino et Lazlo, le gendre photographe vers lequel Nino a poussé Teresa, confiant à son journal que la jalousie le rendait « fou de désir ».

Sans glisser dans la pornographie, mais en exposant frontalement la nudité, le film tient une place particulière dans le cinéma érotique, notamment parce que Tinto Brass a réussi à attirer dans la distribution Stefania Sandrelli, consacrée par une collaboration avec les plus grands réalisateurs italiens : Pietro Germi pour Séduite et abandonnée (Sedotta e abbandonata, 1964), Bernardo Bertolucci pour Le Conformiste (Il Conformista, 1970), Luigi Comencini pour Un vrai crime d’amour (Delitto d’amore, 1974)… Ainsi que Frank Finlay, titulaire de 150 rôles, dans Cromwell (Ken Hughes, 1970), Les Trois Mousquetaires de Richard Lester en1973, Le Pianiste de Roman Polanski en 2002…

La Clé et Miranda (1985) sont les premiers titres de la Collection Tinto Brass lancée par Sidonis Calysta. Elle grossira avec la sortie annoncée en janvier 2024 de Salon Kitty (1976) et de Monella - Lola la frivole (1985).

La Clé

Présentation - 4,0 / 5

La Clé (112 minutes) et ses suppléments (47 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 et sur un DVD-9 logés dans un Digibook.

Le film est proposé dans sa langue originale, l’italien, avec sous-titres optionnels, et dans un doublage en français, les deux au format audio DTS-HD Master Audio 2.0 mono.

Une édition DVD single est disponible avec les mêmes suppléments vidéo.

Dans un livret de 60 pages intitulé Tinto Brass, toutes les couleurs de l’érotisme, Olivier Père, directeur général d’ARTE France Cinéma, rappelle les premiers films de Tinto Brass, son approche moderniste de plusieurs genres, comédie, giallo, western, soldée par un échec commercial qui l’éloigna des plateaux pendant cinq ans jusqu’à deux grosses productions, Salon Kitty et Caligula. Le succès commercial de La Clé et de Miranda fit de lui « le maître italien de l’érotisme ». Olivier Père retrace la vie de Tinto Brass, son entrée dans l’univers du cinéma, ses premiers films, sa parenthèse londonienne à partir de 1967, « l’extravagante aventure de la production de Caligula » dont le montage lui échappe et dans lequel sont insérées des séquences pornographiques. « C’est paradoxalement grâce à ce film dont il renie la paternité que Tinto Brass accède à la célébrité mondiale ». Victime en 2010 d’une sévère hémorragie cérébrale, il écrit pourtant son autobiographie, Una passione libera. Suivent trois chapitres, La Clé, l’oeuvre maîtresse de Tinto Brass, « un projet longuement désiré », avec un rappel du choix des acteurs et une analyse des jeux sexuels du trio, La Clé et la censure italienne, puis Stefania Sandrelli, l’absolue naturelle, « l’actrice la plus Nouvelle Vague du cinéma italien ». Olivier Père souligne « la singularité de sa présence devant la caméra et l’insoumission de son jeu » et passe en revue les plus importants des 140 rôles qu’elle a tenus qui lui vaudront en 2005 un Lion d’or pour l’ensemble de sa carrière.

La Clé

Bonus - 3,5 / 5

Présentation par François Guérif (Sidonis Calysta, 2023, 10’). Après avoir résumé la carrière de Tinto Brass (qu’il rajeunit de quatre ans en le faisant naître en 1937), il souligne la qualité de ses premiers films reconnue par Positif qui le voyait ainsi : « Petit Orson, mérite de devenir grand ». À partir de 1983, avec La Clé, il se consacre au cinéma érotique, avec « une approche frontale de l’érotisme (…) un regard admiratif de l’homme sur la femme ». Dans La Clé, il fait du spectateur « le héros, voyeur de sa femme ».

Scènes coupées (5’). Le professeur Rolfe a un malaise en découvrant un faux dessin de Klimt. Teresa achète son journal.

Le journal secret : interview de Tinto Brass (Il Diario segreto, Nocturno Cinema, 2006, 29’). « Les critiques, grands pontes de la culture, distinguent deux périodes, l’avant et l’après La Clé », une analyse qu’il conteste. Ce film est dans la lignée de Caligula, dénaturé par l’ajout de scènes par la production et le magazine Penthouse. Il fut pris pour un fou quand il proposa une adaptation du roman de Tanizaki dont il avait acheté les droits dès sa publication en Italie en 1964. Il lui parut intéressant de situer cette histoire immorale à l’époque du fascisme, obsédé par l’ordre. Il a essuyé le refus de toutes les actrices auxquelles il avait proposé le rôle de Teresa. Seule Stefania Sandrelli a répondu « Perché no? ». Frank Finlay a accepté le rôle de Nino aussitôt après avoir lu le scénario. L’interdiction du film, vite levée par une décision de justice, a contribué à sa publicité. Un article incendiaire dans L’Avvenire, l’a fait retirer au dernier moment de la sélection pour la Mostra. Plus tard, une version coupée a servi à sa diffusion à la télévision et à son édition VHS.

Bande-annonce (3’), en italien, recadrée à 1.33:1.

La Clé

Image - 3,0 / 5

L’image (1080p, AVC), au ratio originel de 1.66:1 (noté 1.85:1 au dos du Digibook), a été recadrée à 1.78:1. Rien n’est dit sur la restauration qui a éliminé taches et griffures. Mais une pauvre résolution et le léger voile présent dans de nombreux plans révèlent qu’elle n’a pas été opérée à partir du négatif original, mais d’une copie destinée à l’exploitation au Royaume Uni ou aux USA, ce que confirment le générique et quelques aperçus des journaux intimes.

Son - 4,0 / 5

Le son mono d’origine, réencodé au format DTS-HD Master Audio 2.0, propre et stable, avec une bande passante nécessairement cantonnée dans le medium, restitue clairement les dialogues, dans un bon équilibre avec l’ambiance et l’accompagnement musical, délivré sans saturations. On note une synchronisation approximative des dialogues de Frank Finlay, doublé en postproduction.

Le doublage en français donne un timbre plus ouvert aux dialogues qui manquent dramatiquement de naturel.

Crédits images : © San Francisco Film, Selenia Cinematografica, International Video Service

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

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Philippe Gautreau
Le 29 novembre 2023
L’édition de La Clé inaugure, avec Miranda, le lancement par Sidonis Calysta de la Collection Tinto Brass. La Clé, son chef-d’œuvre, doit beaucoup à la contribution de Stefania Sandrelli et valut au réalisateur d’être reconnu comme le maître du cinéma érotique italien. Le film a reçu les honneurs d’une édition exceptionnelle, un bel objet de collection.
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Giuseppe Salza
Le 11 février 2009
Tout simplement l'un des plus grands films érotiques de ce dernier quart de siècle. Tinto Brass passe en revue tous les fantasmes sexuels, même les plus inavouables.

Stefania Sandrelli est une véritable bombe atomique. Certaines de ses scènes resteront gravées à jamais dans vos neurones.

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