Les Trois Mousquetaires (1973) : le test complet du 4K UHD

La meilleure adaptation cinématographique à ce jour du plus célèbre roman d’Alexandre Dumas, tant attendue, enfin rééditée !

D’Artagnan se lie d’amitié avec trois mousquetaires du roi. La reine Anne d’Autriche leur confie la mission de lui rapporter de Londres des ferrets qu’elle a imprudemment offerts au duc de Buckingham. Richelieu et Milady tentent de faire échouer leur mission…

Les Trois mousquetaires (The Three Musketeers), sorti en décembre 1973, sous-titré Les Ferrets de la reine (The Diamonds of the Queen), est l’adaptation assez fidèle, par Richard Lester et le romancier George MacDonald Fraser, de la première partie de la trilogie d’Alexandre Dumas, Les Trois mousquetaires, Vingt ans après et Le Vicomte de Bragelonne, écrite de 1844 à 1850, avec la collaboration d’Auguste Maquet, initialement publiée sous forme de feuilleton dans le journal Le Siècle.

Alexandre Dumas, derrière Charles Dickens et devant Victor Hugo, se place sur la deuxième marche du podium des écrivains qui ont inspiré le plus grand nombre d’adaptations de leurs romans. Les Trois mousquetaires arrive en tête des 300 films, téléfilms ou séries qu’il a inspirés, largement devant Le Comte de Monte-Cristo. Et la course n’est pas finie : viennent de sortir, The Fourth Musketeer (Steve Lawson, 2022, en VOD), deux longs métrages de Martin Bourboulon, Les Trois Mousquetaires - D’Artagnan (sorti en avril 2023), devançant une suite, Les Trois mousquetaires : Milady, attendue le 13 décembre. Il faut ajouter une production franco-belge en cours, Toutes pour une par Houda Benyamina (Divines, 2016), une variation au féminin du célèbre roman de cape et d’épée.

Richard Lester, né aux USA en 1932, entré à l’Université de Pennsylvanie à 15 ans, après une courte expérience de la télévision à Philadelphie, traverse la mare aux canards pour s’installer en Angleterre en 1955 et s’investir dans la télévision. Il commence à se faire connaître en 1959 par The Running Jumping & Standing Still Film, coréalisé avec Peter Sellers et Spike Milligan, nommé à l’Oscar du meilleur court métrage. Ce film insolite attira l’attention des Beatles pour lesquels il réalise The Beatles - A Hard Day’s Night en 1964, avant que Le Knack… et comment l’avoir (1965) n’obtienne la Palme d’or en 1966.

En garde !

Richard Lester venait de connaître une pause de plus de quatre ans, conséquence de l’échec commercial des trois films suivants, How I Won the War, Petulia et The Bed Sitting Room, quand les producteurs Alexander et Ilya Salkind, après avoir essuyé le refus de Tony Richardson, lui proposèrent un confortable budget, 17 semaines de tournage en Espagne et une distribution royale pour réaliser Les Trois mousquetaires.

Le premier rôle, celui de D’Artagnan, échoit à Michael York, celui des trois autres mousquetaires à Oliver Reed, Frank Finlay et Richard Chamberlain. Les rôles secondaires à Charlton Heston (Richelieu), Christopher Lee (Rochefort), Georges Wilson (Tréville), Jean-Pierre Cassel (Louis XIII) et Spike Milligan (Bonacieux). Côté dames, Raquel Welch (Constance Bonacieux), Geraldine Chaplin (Anne d’Autriche) et Faye Dunaway (Milady de Winter).

Deux pour le prix d’un !

Les Trois mousquetaires, à l’origine prévu pour être distribué en un seul film de trois heures, fut, à l’initiative des producteurs, divisé en deux parties d’une centaine de minutes chacune. La seconde partie, On l’appelait Milady (The Four Musketeers: Milady’s Revenge), elle aussi rééditée en 4K UltraHD, sortira un an après la première, en décembre 1974. La troisième, Le Retour des Mousquetaires (The Return of the Musketeers), se fera attendre jusqu’en 1989.

Les Trois mousquetaires, avec une mise en scène dynamique, un bon sens du gag, un montage efficace étroitement supervisé par le réalisateur, des dialogues finement écrits, bénéficie de la contribution du chef-opérateur David Watkin qui recevra l’Oscar et le BAFTA Award de la meilleure photographie pour Out of Africa (Sydney Pollack, 1985).

Le film a un autre atout dans sa manche, la musique de Michel Legrand qui venait de recevoir son premier Oscar pour Un été 42 (Summer of ‘42 , Robert Mulligan, 1971) et de signer la partition de Le Messager (The Go-Between, Joseph Losey, 1971). Appelé à la dernière minute, une fois le montage terminé, il n’eut qu’une dizaine de jours pour trouver les thèmes et écrire l’orchestration.

Le film, d’abord distribué en France, connut un succès mondial. Absent de nos catalogues vidéo depuis des années, il méritait amplement cette réédition d’une qualité technique exemplaire, la première en HD et UltraHD, complétée par un entretien exclusif avec Neil Sinyard, le spécialiste de Richard Lester.

Les Trois mousquetaires (107 minutes) et ses suppléments (77 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-100 4K UltraHD et sur un Blu-ray BD-50, logés dans le traditionnel boîtier noir.

Le menu propose le film dans sa langue originale, l’anglais, avec le choix de sous-titres en français, allemand ou anglais pour malentendants, et dans un doublage en français et en allemand, tous au format audio non compressé Linear PCM 2.0 mono.

Interview de Neil Sinyard (2023, 31’), auteur de The Films of Richard Lester, paru en 1985. Richard Lester fut remarqué en 1959 par la nomination à l’Oscar du court métrage de The Running Jumping & Standing Still Film, réalisé pour la modique dépense de 70 £, avec Peter Sellers et Spike Milligan, une slapstick comedy, avant que The Knack… and How to Get It, A Hard Day’s Night et Help!, emblématiques du « Swinging London » des années 60, n’assurent sa renommée. Suivra « la trilogie de la désillusion », How I Won the War, Petulia et The Bed Sitting Room, « trois films remarquables » dont les critiques mitigées et la faible audience l’amenèrent en 1969 au creux de la vague. Découvrant la dimension iconoclaste du roman et l’opportunité d’explorer le contexte politique et social des aventures, il accepta de réaliser Les Trois mousquetaires et put confier l’écriture du scénario à George MacDonald Fraser qui savait mêler l’histoire et la fiction. L’annonce de Charlton Heston dans la distribution a opéré comme un aimant pour attirer les autres acteurs. Une logistique serrée a été nécessaire pour planifier le tournage en fonction des disponibilités de chacune des vedettes. Richard Lester avait demandé à Michel Legrand « de courtiser l’époque et de lui tordre le cou en même temps ». Le film accordant une bonne place à l’espionnage, est sorti au bon moment, celui de l’affaire du Watergate.

La Saga des Mousquetaires, partie 1 (23’, 2002). Ilya Salkind rappelle le succès de sa première production en 1971, Le Phare du bout du monde (The Light at the Edge of the World) adapté d’un roman de Jules Verne. Son père et lui, souhaitant une vision comique du roman de Dumas, avaient un temps imaginé confier les rôles des mousquetaires aux Beatles, puis, pour obtenir un style à la Tom Jones, à confier la réalisation à Tony Richardson, partisan d’une approche dramatique. Après lecture du livre, Richard Lester s’enthousiasma pour le projet et proposa George MacDonald Fraser comme scénariste. Alexander Salkind réussit à financer la production sans solliciter les studios et obtint l’accès à tous les palais que l’Espagne pouvait offrir autour de Madrid. Équipé de cinq caméras, Richard Lester, dont c’était le premier film en costumes fut, comme il l’a toujours été, en avance sur le planning. Avec la participation de Michael York, Charlton Heston, Richard Chamberlain, Frank Finlay, Raquel Welch, Christopher Lee, Pierre Spengler, producteur exécutif et Brian Eatwell, directeur artistique.

Making of Les Trois mousquetaires (1974, 7’). Richard Lester dit avoir voulu reconstituer le XVIIe siècle sans chercher à l’enjoliver, en soulignant la dimension comique du roman. Une forte chaleur rendit le tournage éprouvant et quelques acteurs furent légèrement blessés.

Bande-annonce américaine (3’02”).

Bande-annonce anglaise (2’36”).

L’image 2160p, 4K HEVC - Dolby Vision, HDR10 (1080p, AVC sur le Blu-ray BD-50), au ratio original de 1.85 :1, a été récemment restaurée, probablement à partir d’un scan 4K du négatif original au regard de la qualité du résultat. Très propre, lumineuse, agréablement contrastée, finement résolue, elle déploie une délicate palette de couleurs bien étalonnées avec un rendu naturel des tons de peau. Un possible affinement du grain respecte la texture du 35 mm.

Le son mono d’origine, encodé au format non compressé Linear PCM 2.0 mono sur les deux disques, très propre lui aussi, avec une bonne dynamique et une ouverture du spectre assez large, assure la clarté des dialogues et le réalisme de l’ambiance et délivre avec l’aération attendue et sans saturations l’accompagnement musical de Michel Legrand.

Ces observations valent pour le doublage en français, au même format, avec des dialogues naturels au timbre un peu trop mat.

Crédits images : © Studiocanal