Shadow Days (2014) : le test complet du DVD

Après vingt ans d’absence, Renwei, cachant un passé trouble, revient avec sa compagne enceinte à Zhiziluo, son village natal, isolé au sommet d’une montagne. Avec l’appui de son oncle, le maire du village, Renwei se fait embaucher par le planning familial qui doit veiller au respect de la politique de l’enfant unique.

Shadow Days (Gui ri zi), tourné en 2014, est le troisième film de fiction du cinéaste chinois indépendant Zhao Dayong, auteur de plusieurs documentaires. Privé de toute aide publique et même d’un accès de ses oeuvres au marché chinois, il doit assurer seul le financement de ses films.

La chronique du jeune couple est le prétexte d’un constat sur la Chine contemporaine (le strict contrôle des naissances, la politique de l’enfant unique imposée en 1979, n’a été réformé qu’en 2015). Elle révèle la migration d’une grande partie de la population vers les villes industrielles, laissant à l’abandon des zones rurales promises à un inexorable délabrement.

Shadow Days évoque aussi le poids du passé et l’inhumanité d’un régime qui fait peu de cas des libertés fondamentales. Une des scènes les plus choquantes est l’enfumage d’une maison par un petit groupe de jeunes hommes excités pour en débusquer une femme qui tente d’échapper à un avortement forcé.

Shadow Days montre aussi le déboussolement des villageois désoeuvrés, cherchant dans l’alcool une échappatoire au désespoir. Et, aussi, le manque de repères, illustré par la conduite du maire. Faisant feu de tout bois pour conjurer la maladie, il a recours aux prières du pasteur chrétien, aux incantations du chamane local et, pour faire bonne mesure, encense une statue du « Grand timonier » au pied de laquelle il dépose en offrande… une cigarette allumée !

Ce film fort, sombre, dérangeant, est de ceux qui confirment que la liberté d’expression ne pourra jamais être complètement bâillonnée, tant que des hommes ou des femmes auront le courage de s’engager à révéler la vérité, quels que soient les risques encourus.

Shadow Days (95 minutes) et ses suppléments sont contenus sur un DVD-9 logé dans un boîtier de 14 mm. Le menu animé et musical propose le film en version originale sous deux formats, Dolby Digital 5.1 ou 2.0 stéréo, avec sous-titres optionnels.

En supplément, un intéressant entretien avec le réalisateur (16’). Zhao Dayong voit la Chine à un tournant de son histoire, ce que visent à montrer ses fictions nourries par les informations récoltées à l’occasion du tournage de ses documentaires. La politique de l’enfant unique ne répondait à aucun besoin économique : ce n’était qu’un slogan déshumanisé qui s’est imposé sans que personne ne puisse se révolter. Il a choisi le cadre du village de Zhiziluo parce qu’il garde visibles les marques de la révolution culturelle. Un cinéaste chinois ne peut aujourd’hui s’exprimer librement dans le cadre officiel : il est contraint à assurer seul le financement de films qui ne pourront, le plus souvent, être diffusés qu’à l’étranger et de se contenter avec un budget très serré (100 000 dollars pour Shadow Days).

Suivent les bandes annonces d’une dizaine de films asiatiques tirés du catalogue de Dissidenz Films, parmi lesquels ont été récemment testés deux films coréens A Cappella + Délinquant juvénile.

L’image (2.35:1) reflète nécessairement les conditions spartiates du tournage. Elle manque généralement de contrastes, particulièrement dans les scènes les moins éclairées. Ce qui n’affecte pas la beauté des plans larges de paysages spectaculaires.

Le son Dolby Digital 5.1 (une version DD stéréo est également disponible), propre, avec un bon équilibre entre les dialogues et la musique, assure une immersion convaincante dans l’ambiance.

Crédits images : © Dissidenz Films