Méduse (2022) : le test complet du DVD

La relation fusionnelle entre deux soeurs ne serait-elle qu’une apparence trompeuse ? C’est la question posée par ce premier film insolite.

Romane rentre tard chez elle en compagnie de Guillaume dont elle tombe rapidement amoureuse. Le lendemain matin, Guillaume découvre une fille dans le salon. C’est Clémence, la soeur de Romane, restée hémiplégique et privée de la parole des suites d’un accident. Guillaume se sent alors investi d’une mission : redonner corps et vie à Clémence.

Méduse est le premier long métrage de Sophie Lévy, après une expérience de réalisation de spots commerciaux, de clips musicaux et de quelques courts. Elle en a écrit le scénario original, lointainement inspiré du mythe de Méduse, l’une des trois Gorgones. Un sort jeté par Athéna fait qu’elle pétrifie tout mortel qui croise son regard. Persée, guidé par le reflet de son visage sur son bouclier d’airain, lui tranchera la tête d’un coup de glaive. Méduse est devenue le symbole de la femme fatale.

Méduse, tourné en 2021, mais sorti dans nos salles en novembre 2022, est un drame en huis clos, dont la tension est efficacement entretenue par le montage inspiré de Sanabel Cherqaoui, salué par un Los Angeles Film Award et d’autres récompenses marquant l’aboutissement de dix ans d’expérience. Elle a aussi assuré le montage du téléfilm de Rodolphe Tissot, Clèves, Prix de la meilleure fiction décerné par le Syndicat Français de la Critique de Cinéma et des films de Télévision.

Réalisé par une équipe réduite, Méduse, bien photographié par Nicolas Desaintquentin qui, après une vingtaine d’années d’expérience en tant qu’assistant caméra, assume ici sa première responsabilité de chef-opérateur, est une oeuvre étonnamment achevée pour un premier film. La tension monte, dans une lente et inéluctable progression, en révélant subtilement la complexité de la relation entre les deux soeurs. L’arrivée de Guillaume va révéler qu’une apparente bonté peut dissimuler une profonde noirceur et que la haine peut étouffer l’amour, et mettre à jour une ambiguïté, symbolisée par l’apparition récurrente de détails du Jugement dernier, le pandémonium imaginé par Jérôme Bosch.

Méduse est servi par une belle distribution. Arnaud Valois, nommé en 2018 au César du meilleur espoir masculin pour sa contribution à 120 battements par minute de Robin Campillo, campe avec naturel Guillaume, pris en étau entre les deux personnages principaux du film, les soeurs, auxquelles, avec une rare économie de dialogues, les deux actrices donnent une forte présence. Romane est interprétée par Roxane Mesquida dont Catherine Breillat avait su déceler le potentiel alors qu’elle était encore débutante en lui confiant un rôle majeur dans deux de ses films, A ma soeur !, en 2001, et Sex is Comedy, en 2002. Mais le scénario met en avant Clémence, brillamment incarnée par Anamaria Vartolomei dont la maturité du jeu en tête d’affiche de L’Événement (Audrey Diwan, 2021) fut reconnue par le Prix Lumière de la meilleure actrice et le Prix du meilleur espoir féminin à la Berlinale et aux Césars.

L’édition DVD par Wayna Pitch, distributeur du film, devrait lui permettre d’élargir le public qu’il a attiré dans les salles.

Méduse (83 minutes) tient sur un DVD-9 logé dans un fin digipack.

Le menu, avec pour fond musical le magnifique Laudate pueri d’Antonio Vivaldi qui accompagne les crédits, propose le film au format audio Dolby Digital 5.1.

Dans un livret de 8 pages, illustré d’une reproduction de l’affiche et de quatre photos du film, Sophie Lévy évoque la référence au mythe de Méduse : « au moment où le sujet est frappé par le sort, il devient une victime et simultanément un bourreau potentiel ». C’est la clé du drame qui se noue entre trois personnages « ni bons ni mauvais », les soeurs étant les deux visages de Méduse, Guillaume celui de Persée. Elle dit aimer Fassbinder, Bergman ou Cassavetes qui ont « filmé les femmes avec sensibilité et force ».

Bande-annonce du film (1’32”).

L’image numérique, au ratio 2.39:1, finement définie, lumineuse, agréablement contrastée, déploie une délicate palette de couleurs naturelles, délibérément peu saturées, soigneusement étalonnées.

La compréhension des dialogues est occasionnellement gênée par leur timbre caverneux, une priorisation insuffisante sur l’ambiance et l’accompagnement musical, délivré avec finesse. L’encodage Dolby Digital 5.1 donne une belle ampleur à la musique, mais l’effet immersif est limité par un cantonnement des bruits d’ambiance sur le plan frontal.

Crédits images : © Ph. Lebruman