Réalisé par Gérard Corbiau
Avec
Stefano Dionisi, Enrico Lo Verso et Elsa Zylberstein
Édité par Opening
Naples, début du XVIIIe siècle.
Riccardo Broschi (Enrico Lo Verso) apprend la composition
musicale. Les talents de chanteur de son jeune frère Carlo
(Stefano Dionisi) lui vaudront de devenir castrat et
d’acquérir une célébrité locale sous le nom de Farinelli.
Georg Friedrich Händel (Jeroen Krabbé), il caro Sassone, le
remarque et tente de le convaincre d’aller chercher la gloire
à Londres. Farinelli exige que son frère le suive, ce que
refuse Händel.
Après quelques années passées à la cour d’Espagne, les deux
frères iront à Londres, en 1734, à l’invitation de leur
maître, Nicola Popora (Omero Antonutti), directeur musical du
Théâtre de la Noblesse.
Händel, bouleversé par la voix de Farinelli réussit à
l’attirer à Covent Garden et de mettre son talent au service
de sa musique dont la qualité surpasse la virtuosité ampoulée
de la musique composée par son frère.
Le scénario de Gérard et Andrée Corbiau prend quelques
libertés avec l’histoire. Les deux frères ont bien existé,
Farinelli a bien été la coqueluche de Londres, une star adulée
dont on dit que les prouesses vocales faisaient se pâmer les
dames.
Mais le film est surtout un prétexte pour recréer la voix
mythique des castrats (dont n’existe qu’un seul échantillon,
ridicule, enregistré au tout début du XXe siècle), pour
exalter la musique baroque, dans une fastueuse débauche d’airs
vertigineux, de costumes et de décors flamboyants.
C’est aussi l’occasion d’analyser les relations
complémentaires entre les deux frères, le compositeur et le
chanteur, son instrument. Ils iront jusqu’à conjuguer leurs
talents pour la conquête du sexe faible : alors que Farinelli
séduit (et fait même beaucoup mieux si l’on peut se fier aux
gémissements de ces dames), Riccardo, lui, apporte la touche
finale…
Le réalisateur belge Gérard Corbiau signe, en 1994, avec ce
film foisonnant, sa deuxième oeuvre consacrée à la musique,
après Le Maître de musique (1988), film attachant dont le
rôle principal était tenu par le célébrissime baryton José Van
Dam.
L’image est somptueuse, éclatante, sans esbroufe, le son d’une
finesse exemplaire. Deux suppléments généreux et
particulièrement intéressants, ce qui n’est pas trop souvent
le cas.
Le menu principal est animé, flamboyant, sur fond sonore
d’airs baroques. Les autres menus sont fixes. Découpage en 15
chapitres (sur 3 pages), repérés par des vignettes fixes
intitulées.
Pour le film, choix entre deux versions audio, l’une Dolby
Digital 5.1, l’autre en DTS 5.1. On peut changer de version à
la volée.
Pas de choix de langues, ce dont je ne crois pas qu’il faille
se plaindre : la première partie du film, se déroulant à
Naples est, bien naturellement, en… italien, de même que les
dialogues ultérieurs entre les deux frères. Tout le reste est
en français. (Dans l’édition Belga, trois versions étaient
proposées : une version originale (en italien et français) au
format stéréo 2.0, plus deux versions françaises, l’une en DD
5.1, l’autre en DTS 5.1).
Les sous-titres français peuvent être éliminés en cours de
visionnage ; cette heureuse option n’est, curieusement, pas
indiquée sur le menu.
Le disque, joliment sérigraphié, est contenu dans un digipack
à l’intérieur duquel est incluse une intelligente petite
brochure illustrée de 8 pages sur la musique baroque et les
castrats. Le tout s’insère dans un boîtier très plat (à peu
près les 2/3 de l’épaisseur d’un keep-case, pour économiser
l’espace sur vos étagères).
Le castrat Farinelli, nostalgie d’une voix perdue est
un moyen métrage (4/3, en français et VOST, 50’, et non 60,
comme indiqué au dos du boîtier), coproduit par France 3 et
réalisé par Gérard Corbiau. Après un rappel de l’époque des
castrats napolitains (les garçons choisis pour la qualité du
timbre de leur voix subissaient, avant la mue, une section du
canal inguinal conduisant à une atrophie des testicules qui
n’étaient plus irrigués… ce qui assurait la conservation du
registre aigu de leur voix dont l’étendue devenait
anormalement large).
L’essentiel du document est consacré à la re-création d’une
voix à jamais disparue, grâce à un « assemblage », d’abord jugé
impossible, de la voix de deux chanteurs, celle du haute-
contre américain Derek Lee Ragin et celle de la soprano
colorature Ewa Mallas-Godlewska. Grâce aux efforts conjugués
des deux chanteurs, de l’ingénieur du son Jean-Claude Gaberel,
du chef d’orchestre et claveciniste Christophe Rousset et à
l’expertise technique de Philippe Depalle, responsable du
département Analyse et Synthèse de l’Ircam, le miracle s’est
accompli : les deux voix se sont fondues en une seule, au
timbre homogène et à la tessiture merveilleuse !
Dans le second supplément (qui n’existait pas dans
l’édition Belga), Les créateurs de Farinelli ou
Farinelli, la naissance d’un voix (23’, 4/3) le
réalisateur nous rappelle comment il s’est investi avec
passion pendant trois longues années pour se lancer dans la
réalisation d’un projet dont l’idée lui trottait dans la tête
depuis longtemps. Comment il s’est entêté, contre l’avis de
spécialistes, à vouloir fondre deux voix en une seule au lieu
de se contenter d’une soprano à large tessiture. Comment, avec
le concours du musicologue Marc David, ont été exhumées des
partitions oubliées, parce qu’inchantables. Comment il s’est
battu, avec Véra Belmont, productrice, pour financer cette
réalisation franco-belgo-italienne qui a obtenu un large
succès international en décrochant, notamment, le Golden Globe
du meilleur film étranger.
Somptueuse ! L’image est remarquable par sa définition, sa finesse, la balance et la fraîcheur des couleurs.
Le son est clair, avec un sensible gain de pureté avec l’option DTS. L’équilibre de la prise de son, la cohérence de la spatialisation servent à merveille la musique. Ce parti pris de sobriété n’interdit pas quelques effets plus spectaculaires, par exemple lorsque des chevaux quittent leur écurie au grand galop, à 1 h 30’.