Le Fantôme de Milburn (1981) : le test complet du Blu-ray

Nouvelle Angleterre (USA) hiver 1980, petite ville de Milburn : un fantôme provoque les cauchemars puis la mort des membres d'un cercle de gentlemen âgés. Le fils de l'un d'eux tente d'éclaircir le mystère, après que la même apparition ait aussi tué son frère. Les deux derniers survivants acceptent enfin de lui révéler son origine et les raisons de sa vengeance mais une course contre la montre est engagée pour éviter qu'elle ne les tue eux aussi.

Des 600 ou 700 pages de Ghost Story aux intrigues et sous-intrigues paraît-il assez complexes et qui étaient admirées par Stephen King, il ne reste qu'une simple histoire à la trame suffisante pour charpenter un film à l'allure esthétique de téléfilm gonflé, en dépit de la direction de la photo de Jack Cardiff et des effets spéciaux signés Dick Smith et Albert Whitlock dont le résultat est médiocre en dépit de leur perfection formelle comme technique. Les quatre acteurs principaux jouant les gentlemen âgés sont des stars hollywoodiennes parfois très célèbres chez nous (Fred Astaire) parfois oubliées (Melvyn Douglas, Douglas Fairbanks Jr.) ou connues uniquement des historiens du cinéma (le producteur John Houseman qui produisit des classiques de Fritz Lang et de Vincente Minnelli). il faut y ajouter Patricia Neal qui fut une star des années 1950-1960 (Le Rebelle, Le Jour où la Terre s'arrêta, etc.). Craig Waisson (dans un double rôle dont il se tire assez bien) et la mignonne Alice Krige représentent la nouvelle génération. Irvin a réalisé deux excellents films de guerre : Les Chiens de guerre (USA 1980) et Hamburger Hill (USA 1987) mais on peut vraiment, hélas, oublier sans remords ce film fantastique qui intéressera surtout les historiens du cinéma fantastique ou les purs amoureux du genre, avides de vidéographies et de filmographies exhaustives ou désireux de combler une lacune. Dommage car le contexte (homosexualité latente de la bonne société américaine des années 1920, misogynie, impuissance, alcoolisme) en fait, durant les séquences de retour en arrière, une sorte de version infernale de l'atmosphère de Gatsby le magnifique.

PS : Il faut absolument prononcer le titre à l'anglaise (ce qui donne phonétiquement : millebeurn) et ne surtout pas prononcer à la française (ce qui donne phonétiquement : milleburne) car sinon on obtient un titre qui aurait certainement intéressé le poète Guillaume Apollinaire : Le Fantôme de Mille Burnes ! Des mille burnes aux Onze mille verges, il n'y aurait certes qu'un léger pas à franchir mais la décence autant que l'histoire du cinéma l'interdisent toutes deux bien évidemment.

1 Blu-ray Full HD 1080p, édité le 12 décembre 2018. Image couleurs au format original 1.85 compatible 16/9. Son DTS HD 2.0 Mono VF et VOSTF. Durée du film sur Blu-ray : 110 min environ. Suppléments : présentation du film par J. Comelli (20 min. environ), bandes annonces, crédits.

Présentation du film : les vieux de la vieille (sic) (durée environ 20 min) par Julien Comelli, réalisée par Erwan le Gac. Nourrie graphiquement d’assez nombreuses affiches et de quelques photos de plateau et de tournage N&B et couleurs, bien reproduites et bien intégrées au montage, elle détaille au pas de charge la genèse du film, sa production, les bio-filmographies des acteurs principaux, de son cinéaste, de ses techniciens d’effets spéciaux, de son directeur de la photo, de son monteur, de son musicien. Comelli est probablement belge francophone : il lui arrive, dans le feu du discours, de parler des années « septantes » ou « nonantes » au lieu des années (19)70 ou (19)90. Il prend en revanche parfois soin de prononcer certains noms à l’anglaise, ce qui donne « Myia Fairoooo » dans le cas de l’actrice Mia Farrow : est-ce phonétiquement correcte et un auditeur américain comprendra-t-il à qui il a affaire ? Je l’ignore. Revenons à nos moutons interactifs et supplémentaires : le novice en histoire du cinéma apprendra beaucoup de choses mais le cinéphile déjà cultivé ou bien spécialiste, un peu moins sinon des détails sur l’adaptation du roman et d’autres, un peu plus techniques, tels que ces contre-champs tournés en Angleterre, par exemple. Comelli pense qu’il est logique et naturel que Universal ait proposé au cinéaste John Irvin de tourner Le Fantôme de Milburn après le succès de son remarquable Les Chiens de guerre. Je ne vois pas en quoi l’un impliquait l’autre. Il pense aussi que la séquence où Craig Wesson est seul avec une femme nue, vue de dos, représente bien l’angoisse qui peut saisir un homme lorsqu’il est seul avec une femme. Passons sur cette remarque psychologique dont la pertinence n’échappera pas au lecteur. Comelli et Le Gac font l’impasse sur la star Patricia Neal dont le beau regard est pourtant, ici, inchangé mais qui n’a même pas droit à une photo N&B d’un de ses classiques signés King Vidor, Robert Wise, etc. Sa carrière est pourtant nettement plus excitante que celle de Fred Astaire. Comme d’habitude, ne visionner ce supplément qu’après le film lui-même dont il présente de nombreux extraits, si on veut préserver l’effet de surprise.

Aucune galerie de photos d’exploitation : ni les américaines, ni les françaises.

Le cinéphile anglophone préférera à cette présentation « light » (mais qui a le mérite ontologique d’exister) les suppléments américains (hélas non sous-titrés en français) nettement plus lourds de l’édition américaine Shout Factory sortie durant l’hiver 2015, dotée d’un commentaire audio de John Irvin, d’un entretien avec l’écrivain Peter Straub, d’études détaillées sur l’écriture du scénario, d’une galeries photos et affiches dont l’ampleur lui permet de durer 8 minutes environ, etc.

Bandes-Annonces : La Sentinelle des maudits (The Sentinel) (USA 1977) de Michael Winner, Enfer mécanique (The Car) (USA 1977) de Elliot Silverstein, Le Fantôme de Milburn (Ghost Story) (USA 1981) de John Irvin, Enterré vivant (Buried Alive) (USA 1990) de Frank Darabont, La Nurse (USA 1990) de William Friedkin, toutes d’époque en VOSTF mais aux états numérique et argentique assez variés.

Format original 1.85 respecté en Full HD 1080p : c’est le master édité par Shout Factory aux USA en 2015. Copie argentique presque parfaitement nettoyée : une dizaine de poussières négatives et positives relevées tout de même mais plus aucune rayure ni brûlure de cigarette. Sur le plan numérique, le niveau de grain demeure naturel et la définition est excellente. Colorimétrie d’origine aux tons volontairement automnaux à dominantes ocres et grises mais assez uniforme et sans surprise sur le plan plastique.

VF d’époque (qui était absente de l’édition américaine) et VOSTF (STF qui étaient absents aussi de l’édition américaine) en DTS HD 2.0 mono au dynamisme et à l’équilibrage très bien restitués entre musique - effets sonores - dialogues sur les deux pistes. Offre nécessaire et suffisante pour le cinéphile francophone. La VF (assez neutre dramaturgiquement) comme les STF adaptent assez souvent ce qui est dit dans la VO mais ne modifient pas sérieusement le sens du dialogue sauf sur des points de détail.

Crédits images : © Eléphant Films