Magnum 44 spécial (1976) : le test complet du Blu-ray

Film noir policier violent signé par Stelvio Massi, en version intégrale restaurée.

Magnum 44 special(La legge violenta della squadra anticrimine, Ital. 1976) de Stelvio Massi reflète assez bien la position de ce cinéaste dans l’histoire du film noir policier violent italien. Cet honnête artisan n’est pas un baroque inspiré comme Umberto Lenzi qui demeure le meilleur cinéaste de l’âge d’or (1970-1980) du genre. Son style un peu lourd ne peut rivaliser avec celui bien plus dynamique des autres cinéastes notables y ayant régulièrement contribué, tels que Fernando Di Leo, Enzo G. Castellari, Sergio Martino, Massimo Dallamano. Sur la quinzaine de titres policiers que Massi réalise entre 1974 et 1980, on retient aujourd’hui surtout la trilogie policière de « Marc la gâchette », interprétée en vedette par Franco Gaspari en 1975-1976 et qui bénéficiait des scénarios rigoureux de Dardano Sachetti. Magnum 44 spécial entretient d’ailleurs un lien avec elle par le biais du casting de l’acteur Lee J. Cobb qui jouait déjà un inquiétant parrain dans Un flic voit rouge (Mark il poliziotto, Ital. 1975) de Stelvio Massi. L’intérêt de Magnum 44 spécial tient d’abord dans sa visée réaliste en apparence modeste mais qui fait progressivement mouche, à commencer par le choix du décor : ici le port de Bari, ses ruelles, ses autoroutes mais aussi ses immeubles de bureau et les appartements luxueux, à la décoration surchargée, dans lesquels vivent les maîtres de la ville. Le casting est bien dosé : ce n’est pas tant Lee J. Cobb qui est opposé à John Saxon que Renzo Palmer, un des acteurs piliers de second plan du genre. Les corps sont lourds, les visages brutaux, qu’il s’agisse des forces de l’ordre ou des gangsters : certaines séquences nocturnes (les plus belles plastiquement) virent au cauchemar. Et la violence graphique (on jette une otage sous les roues d’une voiture de police durant une poursuite ; la pègre comme la police torturent pour obtenir des informations) augmente encore l’effet d’ensemble, renvoyant in fine presque dos à dos les deux camps antagonistes.

Combo 1 Blu-ray BD50 multirégions ABC + 1 DVD9 + 1 livret d’Alain Petit édités par Eléphant films le 12 décembre 2023. Image format large 1.85 en couleur, compatible 16/9, 1920 x 1080p AVC (sur Blu-ray). Son VOSTF + VF + VA en DTS-HD Master Audio Mono 2.0. Durée cinéma du film 95 min. environ (sur Blu-ray). Belle illustration de jaquette et belle sérigraphie reprenant les codes graphiques du coffret Fernando Di Leo, chez le même éditeur. Une affiche italienne originale reproduite au verso de la jaquette réversible, une autre à l’intérieur du livret. Bonus : présentation + entretien + bande annonce + bandes annonces de la collection. Existe aussi sous boîtier métal, tirage limité à 500 exemplaires.

Livret Les Années de plomb volume 3, par Alain Petit : 25 pages illustrées, nourries d’informations précises sur les biographies, filmographies des cinéastes et acteurs principaux ayant contribué à trois films de la collection, dont celui-ci. La dernière page montre les boîtiers des 9 titres de la collection. Les novices seront initiés correctement à l’histoire du genre. Notez que l’expression qui donne son titre à la collection est un détournement ironique d’une réalité historique puisque « Les années de plomb » désignait la période des attaques terroristes des Brigades rouges communistes contre l’Etat italien : elle ne caractérisait absolument pas le milieu des gangsters. Page 10, une belle affiche italienne originale et page 13 l’illustration de la jaquette VHS Secam française. Cette dernière montre John Saxon tirer avec un revolver calibre 44 magnum (popularisé en 1971 par le succès du film noir policier de Don Siegel avec Clint Eastwood) mais aucun revolver de ce calibre n’apparaît dans le film de Massi. Le titre français d’exploitation comme le titre VHS Secam confondait en outre calibres 44 spécial et 44 magnum qui sont balistiquement et historiquement distincts.

Présentation par Gérald Duchaussoy et Romain Vandestichel (durée 23 min. environ) : entrecoupée par de nombreux extraits, elle est honnête mais un peu trop longue. Quelques remarques d’histoire du cinéma sont pertinentes : par exemple celle sur la relation entre le rôle de Lee J. Cobb et celui qu’il tenait dans La Mafia fait la loi (Il giorno della civeta, Ital. 1968) de Damiano Damiani.

Entretien avec l’acteur Lino Capolicchio (durée 14 min. environ, VOSTF) : intéressante par l’éclairage de première main qu’elle offre sur les relations entre cinéma-bis italien et cinéma grand public, à travers les souvenirs d’un jeune acteur qui admirait Giorgio Strehler, Shakespeare et Marlon Brando mais n’imaginait pas se retrouver jeune premier d’un film noir policier violent aux côtés de John Saxon et Lee J. Cobb.

Bande-annonce (VOSTF, durée 1 min. 25 secondes) : il s’agit d’une bande-annonce montée par l’éditeur, pas d’une bande-annonce d’époque.

Bandes-annonces de la collection Les Années de plomb: certaines sont des montages récents opérés par l’éditeur, d’autres sont des bandes-annonces d’époque. Etat argentique et vidéo variable.

Honorable édition spéciale (si on y ajoute le livret) mais pourquoi avoir fait l’impasse sur la galerie affiches et photos ? Le matériel italien original est pourtant disponible.

Format large original 1.85 respecté, en couleurs. Bonne copie argentique bien nettoyée, à la colorimétrie sinon vive, au moins rafraîchie. Transfert vidéo soigné : scènes nocturnes en extérieurs bien définies. Bon équilibre entre grain restitué et lissage. L’édition de référence, dorénavant, en Full HD.

VOitalienne STF + VF d’époque en DTS-HD Master Audio mono 2.0 : offre nécessaire et suffisante pour le cinéphile francophone, à laquelle est rajouté, en troisième choix, une inutile version anglaise. Pistes son bien nettoyées, dialogues nets et bien détachés. Sous-titrage soigné et bien lisible. Deux séquences inédites en France au cinéma sont présentées en VOSTF dans la VF d’époque.

Crédits images : © Produzioni Atlas Consorziate