House of the Long Shadows (Le Manoir de la peur) (1983) : le test complet du Blu-ray

House of the Long Shadows

Combo Blu-ray + DVD

Réalisé par Pete Walker
Avec Vincent Price, Christopher Lee et Peter Cushing

Édité par ESC Editions

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Le 09/03/2021
Critique

L’ultime film fantastique signé Pete Walker, au scénario intelligent et au casting de stars.

House of the Long Shadows (Le Manoir de la peur)

Londres puis Pays de Galles, Royaume-Uni 1983. Kenneth, un écrivain américain sur le déclin, prend l’avion pour Londres à la demande de Sam, son éditeur anglais venu le chercher à l’aéroport : ils parient 20.000 £ que Kenneth sera capable d’écrire un livre de terreur en une seule nuit, passée dans un manoir désaffecté mais richement meublé que Sam peut mettre à sa disposition. Kenneth s’y rend, installe une machine à écrire, quelques bougies et du papier vierge sur une table de travail mais le manoir recèle d’inattendus occupants qui vont bientôt transformer sa nuit d’inspiration en une nuit de cauchemar.

Le Manoir de la peur (House of the Long Shadows, GB 1982) de Pete Walker est une curiosité intéressante à plus d’un titre. Produite par Cannon Group à l’époque où Menahem Golan et Yoram Globus voulaient faire leur place au soleil à Hollywood grâce à un catalogue varié alliant cinéma de genre et cinéma d’auteur, tournée en Angleterre en 5 semaines pour un budget d’environ un million de £, dotée d’un scénario conçu par le cinéaste Michael Armstrong d’après une pièce de théâtre écrite 70 ans plus tôt et plusieurs fois adaptée au cinéma (mais respectant mieux sa fin originale que les versions antérieures), réunissant ensemble, pour la seule et unique fois de leur carrière, les quatre stars du cinéma fantastique Christopher Lee, Peter Cushing, Vincent Price et John Carradine, ce fut aussi l’ultime film signé par Pete Walker.

Walker ajoute à ce casting, déjà remarquable, son actrice fétiche Sheila Keith qui avait tourné pour lui en vedette à partir de Flagellations (House of Whipcords, GB 1975) et le comédien hitchcockien Richard Todd qui avait tourné pour Alfred Hitchcock mais aussi dans certains films fantastiques anglais des années 1970 produits par la Amicus. Sa mise en scène oscille ici encore entre esthétique cinéma (vastes plans d’ensemble) et esthétique TV (plans rapprochés filmés à l’épaule et dotés d’une nerveuse mobilité). Le scénario fait penser à des films plus anciens aussi adaptés d’une pièce de théâtre, tels que La Maison de la mort / Une soirée étrange (The Old Dark House, USA 1932) de James Whale : là aussi en une nuit et dans un lieu unique, une intrigue se noue et trouve, après de multiples rebondissements, son dénouement à l’aube. Il modernise relativement la donne en y adjoignant non seulement quelques extérieurs londoniens (et un mignon coupé Rolls Royce version Silver Shadow visible au début et qui était peut-être celui dans lequel roulait personnellement Walker) mais encore l’idée d’une mise en scène dans la mise en scène. On songe alors rétrospectivement non plus à l’âge d’or américain 1931-1939 du cinéma fantastique mais aux films fantastiques postérieurs produits et réalisés par William Castle dans les années 1958-1965 : Castle faisait souvent reposer leur suspense sur cette idée. Sans oublier une savoureuse mise en abyme des rapports entre fiction et réalité, ici symbolisés par ceux de l’écrivain avec son éditeur (Richard Todd, excellent comme toujours) et ceux de l’écrivain avec une maison source d’inspiration. Ce n’était certes pas non plus tout à fait nouveau ― La Maison qui tue (The House That Dripped Blood, GB 1970) de Peter Duffell avait déjà assez brillamment illustré la seconde idée dans son premier sketch tandis que la structure de Le Club des Monstres (GB 1981) de Roy Ward Baker reposait sur la première idée ― mais Armstrong et Walker enfoncent encore le clou avec cette très savoureuse conversation professionnelle entre acteurs où Carradine, Cushing, Lee et Price jouent quasiment leurs propres rôles.

Certes moins original que les films écrits antérieurement par David McGillivray pour Pete Walker, House of the Long Shadows possède cependant une précieuse qualité : c’est un film authentiquement crépusculaire, oscillant d’une manière finalement assez shakespearienne entre comédie et terreur. Il y avait assurément déjà de telles oscillations dans la filmographie fantastique antérieure de Walker mais cet incroyable casting accentue encore cet aspect. Au moment de sa sortie, c’est évidemment lui qui était attrayant au premier chef : les cinéphiles voulaient visionner cette première (et dernière) réunion des monstres sacrés Carradine, Cushing, Lee et Price. Avec le temps, cet attrait s’est un peu décanté mais il demeure prédominant : ce n’est pas pour rien, au fond, que son titre original anglais doté d’une noire poésie s’est d’ailleurs presque tout naturellement imposé, en France, sur son titre français d’exploitation. Le dîner réunissant, dans une salle à manger à la décoration baroque, Carradine, Cushing, Lee et Price demeure un assez étrange moment d’histoire du cinéma fantastique, voulu comme tel et magnifié comme tel par la mise en scène mais maintenant cependant les prestiges de la fiction grâce au talent des acteurs. Au fond, on n’est pas loin, avec cet ultime film de Walker, de l’esprit référentiel et réflexif qui animait, trente ans plus tôt, ceux du cinéaste Ed Wood.

House of the Long Shadows (Le Manoir de la peur)

Présentation - 4,0 / 5

Édition ESC sortie le 03 février 2021, contenant 1 Blu-ray BD50 région B + 1 DVD-9 PAL zone 2 (non reçu) + 1 livret illustré de 16 pages (non reçu). Durée cinéma du film : 102 min. environ. Format 1.85 original respecté, en couleurs et compatible 16/9, Full HD sur le Blu-ray. DTS-HD Master Audio Dual Mono 2.0 VOSTF + VF d’époque. Suppléments : présentation et analyse par Laurent Aknin. Livret 16 pages (non reçu).

Bonus - 3,0 / 5

Présentation et analyse d’une séquence par Laurent Aknin (2021, durée 25 min. environ) : honnête et vivante présentation, illustrée de quelques documents iconographiques et de quelques extraits du film, qui fournit les clés historiques nécessaires à sa situation historique dans l’histoire de la firme Cannon Group, dans les filmographie du cinéaste Pete Walker et du cinéaste Michael Armstrong (ici scénariste), dans celles de leurs célèbres acteurs vedettes (Carradine, Cushing, Lee, Price). Faut-il réduire le film à une idée de producteur et à une photo de publicité ? Laurent Aknin semble, à plusieurs reprise, assez tenté de répondre par l’affirmative. Au passif, on peut relever le jugement négatif affiché pour les films fantastiques antérieurs signés Walker  : Aknin passe d’ailleurs totalement sous silence le casting de Sheila Keith, la vedette fétiche de Walker durant son âge d’or fantastique des années 1975. Au passif aussi, il manifeste un certain mépris pour Lâchez les monstres ! (Scream and Scream Again, USA 1969) de Gordon Hessler et que Fritz Lang tenait pour le premier film adulte de science-fiction qu’il ait vu. La présence de Peter Cushing n’y est pas si anecdotique : contrairement à ce que dit Akin, son rôle est, certes, moins important que ceux tenus par Price et Lee mais il est cependant intéressant et contribue brillamment à la structure d’ensemble du titre, un des meilleurs signés par Hessler. Enfin il faut tout de même préciser, ce que ne fait pas Aknin lorsqu’il le cite avec là encore un brin de mépris, que La Marque du diable (Hexen bis aufs Blut gequält, RFA 1970) de Michael Armstrong fut co-écrit et co-réalisé par Adrian Hoven. La séquence analysée est, sans surprise, celle du dîner, en effet mémorable et occasion d’une anecdote sur Carradine.

Image - 5,0 / 5

Blu-ray 1080p région B dont l’image est pratiquement celle du master américain Kino Lorber édité aux USA en 2015. Même respect du format original 1.85, même fidélité de restitution du grain, mêmes couleurs typiques des années 1980-1990 : plus atonales et limitées, plus froides que celles des décennies antérieures mais produisant un effet se voulant davantage réaliste car moins stylisé. Une ou deux brûlures blanches fugitives sur presque 102 minutes : très honorable copie argentique.

Son - 5,0 / 5

DTS-HD Master Audio Dual Mono 2.0 en VOSTF anglaise et VF d’époque : offre nécessaire et suffisante pour le cinéphile francophone. Il faut privilégier la VOSTF, bien équilibrée et puissante tandis que la VF nécessite de monter de plusieurs crans le niveau sonore pour retrouver le même relief sonore et la même amplitude. La piste VOSTF m’a semblé meilleure encore que la piste audible sur le Blu-ray Kino Lorber, qui plus est. La voix française de Christopher Lee ne lui convient pas vraiment : raison de plus pour privilégier cette VOSTF. Quelques divergences occasionnelles entre mots anglais et STF : lorsque l’écrivain entreprend de taper à la machine à écrire la première page de son nouveau livre, il inscrit en haut de sa feuille de papier son titre en lettres majuscules « MIDNIGHT MANOR » que les STF traduisent par Le Manoir de la peur ― reprenant le titre français d’exploitation ― au lieu de le traduire littéralement (et correctement) par « Le Manoir de Minuit ». Musique fonctionnelle, correcte mais sans génie particulier.

Crédits images : © London-Cannon Films

Configuration de test
  • Téléviseur 4K LG Oled C7T 65" Dolby Vision
  • Panasonic BD60
  • Ampli Sony
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francis moury
Le 10 mars 2021
L’ultime film fantastique signé Pete Walker, au scénario intelligent et au casting de stars.

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