Le Goût de la violence (1961) : le test complet du Blu-ray

Réalisé par Robert Hossein
Avec Robert Hossein, Giovanna Ralli et Mario Adorf

Édité par Gaumont

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Le 29/06/2021
Critique

Western européen au romantisme lyrique, à l’esthétique baroque parfois proche du fantastique.

Le Goût de la violence

Amérique latine, 1890 : des paysans révolutionnaires, menés par Perez, prennent en otage la fille du président de leur pays afin d’obtenir la libération de détenus politiques. Trois d’entre eux doivent convoyer l’otage à travers des lieux hantés par la mort et la pauvreté et l’armée gouvernementale, afin de la livrer à Guzman, le chef de l’insurrection. Au cours du voyage, la cohésion du groupe se délite tandis qu’un amour interdit naît entre l’otage et Perez.

Le Goût de la violence (Fr.-Ital.-RFA 1961) de Robert Hossein appartient à l’âge d’or de Hossein cinéaste, donc à sa période 1955-1970, celle où il signe des films de genre (notamment fantastique, espionnage, policier, aventures) dont il est l’auteur aussi complet que possible : réalisateur, scénariste (parfois en collaboration), acteur. C’est Marina Vlady qui devait initialement tenir le rôle féminin principal : les exigences d’une production internationale la remplacèrent par l’italienne Giovanna Ralli alors au sommet de sa beauté et dont c’est un des meilleurs rôles, en grande partie muet donc, comme souvent dans l’histoire du cinéma, d’autant plus expressif.

Le Goût de la violence

Le début, plastiquement assez somptueux en raison de cadrages particulièrement soignés et d’un montage sophistiqué, annonce même par son efficacité ce que feront cinq ou dix ans plus tard les meilleurs cinéastes italiens et américains du genre lorsqu’ils traiteront le sujet : on peut même songer sur le plan esthétique, rétrospectivement, au moins durant les cinq premières minutes du Goût de la violence, à des titres postérieurs par la suite devenus classiques du western européen et américain dont le thème (la révolution mexicaine) est proche tels que El Chuncho (Quien sabe ?, Ital. 1966) de Damiano Damiani et (pour son début, mutatis mutandis) La Horde sauvage (USA 1969) de Sam Peckinpah. Ensuite, la narration devient davantage intimiste mais elle s’élève régulièrement et sans aucun effort au spectaculaire lorsque les paysages (d’Europe de l’Est, souvent remarquablement sélectionnés et exploités par l’image) s’y prêtent. Le thème, littérairement rebattu, de la révolution aux mains sales donne certes lieu à des dialogues parfois un peu trop élégants voire même un peu sartriens : c’est néanmoins un prétexte assez rapidement transcendé par l’irruption de certaines séquences placées sous le signe d’un baroque proche du fantastique, par exemple cette rue inoubliable dont chaque côté est hérissée de pendus aux réverbères et lentement remontée par le couple Hossein et Ralli. D’autres relèvent assez nettement du cinéma expérimental contemporain de la Nouvelle vague des années 1960 : la séquence sur la plage est dotée d’un lyrisme assez proche, par exemple, de celui du L’Éternité pour nous (Le cri de la chair) (Fr. 1961) de José Benazeraf.

Le Goût de la violence

Certains effets de style mais aussi certains aspects thématiques étaient dans l’air du temps en France comme à l’étranger au tournant de 1960 : l’incommunicabilité est le thème favori du cinéma de Godard et de Benazeraf mais aussi (et depuis bien plus longtemps) du cinéaste suédois Ingmar Bergman et il sera bientôt celui du cinéaste japonais Koji Wakamatsu. La séquence des travelling-zoom lents et silencieux sur les protagonistes immobiles, contemplant l’infini d’un quasi-désert, n’aurait dépareillé chez aucun de ces cinéastes. Reste le romantisme lyrique de l’amour impossible : c’est finalement cet aspect qui l’emporte dans Le Goût de la violence, visuellement exprimé par des plans d’ensemble d’une constante beauté plastique, isolant les individus devenus symboliquement fragiles au sein d’espace à la profondeur de champ démesurée.

Robert Hossein recherchait visiblement, à cette époque, une mise en scène symbolique prouvant à la fois son ambition thématique et ses capacités techniques. Le résultat est ici original et mérite d’être re-découvert, non seulement pour celui qui s’intéresse à Hossein comme cinéaste auteur mais encore pour celui qui s’intéresse à l’histoire du western européen.

Le Goût de la violence

Présentation - 4,0 / 5

1 Blu-ray multirégions ABC édité par Gaumont collection Découvertes, le 26 mai 2021. Durée du film : 85 minutes environ. Image N&B Full HD 1080p au format original 2.35 respecté et compatible 16/9. Son DTS HD Master audio 2.0 mono VF + Audiodescription 2.0 Mono + VFSTF pour sourds et malentendants. Suppléments : présentation par Jean-François Giré + restauration + bande-annonce originale. Catalogue 2021 des collections Gaumont Classiques et Gaumont Découvertes.

Bonus - 3,0 / 5

Présentation par Jean-François Giré : (durée 20 min. environ) couvrant plusieurs aspects essentiels du film (son esthétique, son casting, sa musique), elle est chaleureuse et me semble globalement pertinente, bien qu’elle ne couvre pas tous les aspects du film et bien qu’elle paraphrase un peu par moments le scénario. La révélation finale de l’affiche originale est un peu abruptement coupée au montage : Giré n’a pas le temps de la déplier intégralement, donc de nous la montrer. Dommage… ce qui me fait penser qu’il manque une galerie affiches et photos françaises d’exploitation à ces suppléments. On ne pouvait vraiment pas en trouver un jeu complet quelque part, ou bien, à défaut, le jeu italien ou allemand puisqu’il s’agit d’une coproduction ? En guise de compensation, Giré nous présente, il est vrai, un autre élément d’époque assez rare : le disque 45 tours de la musique du film.

La Restauration technique du film : (durée 3 min. env.) : module habituel « avant / après » permettant de bien mesurer le travail accompli, notamment concernant la séquence de la remontée de la rue aux pendus qui était vraiment en très mauvais état argentique et qui est, à présent, impeccable.

Bande-annonce originale : (2.35 compatible 16/9, durée 3 min. env.) : à base de surimpression, sonorisée d’abord par la musique, elle est assez avant-gardiste et poétique. En assez bon état argentique, qui plus est.

Le Goût de la violence

Image - 5,0 / 5

Full HD 1080p au format original Scope 2.35 N&B compatible 16/9. Image argentique très bien restaurée en 2016 par Gaumont, au moment de l’édition du DVD. 5 ans plus tard, en 2021, l’édition Blu-ray fournit une définition à tomber par terre de qualité et de précision : les niveaux de dégradés noir-gris-blanc sont admirables et chaque plan d’ensemble le prouve. On peut compter les sourcils de la belle Giovanna Ralli lorsqu’il y a gros plan. Dosage parfait entre grain et lissage. Un exemple de ce qu’il faut faire. Dorénavant l’édition de référence sur le plan technique. Notez qu’il n’y a pas de générique d’ouverture : il n’y a qu’un générique de fin.

Son - 5,0 / 5

VF en DTS HD Master audio 2.0 mono restaurée : bon équilibrage dialogues-musique-effets sonores, piste bien restaurée. La version pour sourds et malentendants est en option : son sous-titrage est graphiquement agréable et intelligemment réparti, de manière à être suivi intuitivement, comme toujours chez Gaumont. Musique signée André Hossein, le père du cinéaste Robert Hossein : elle repose sur quelques tambours et quelques chansons espagnoles assez mélancoliques. L’acteur Mario Adorf est doublé en français par Marcel Bozzufi, à la voix si reconnaissable : elle est bien adaptée au personnage.

Crédits images : © 1961 GAUMONT (FRANCE) / M.G.M. (ITALIE) / U.F.A. (ALLEMAGNE)

Configuration de test
  • Téléviseur 4K LG Oled C7T 65" Dolby Vision
  • Panasonic BD60
  • Ampli Sony
Note du disque
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francis moury
Le 30 juin 2021
Western européen au romantisme lyrique, à l’esthétique baroque parfois proche du fantastique.

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