Maléfices (1962) : le test complet du Blu-ray

Réalisé par Henri Decoin
Avec Juliette Gréco, Liselotte Pulver et Jean-Marc Bory

Édité par Gaumont

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Le 09/12/2021
Critique

Film policier reposant sur un thème fantastique, injustement oublié car plastiquement très soigné.

Maléfices

Bretagne, région de Noirmoutier, France 1962. Le jeune vétérinaire François Rauchelles est appelé un soir au chevet d’un guépard possédé par la belle Myriam Heller, une mystérieuse artiste revenue d’Afrique afin de vendre son manoir isolé. Myriam tombe amoureuse de François : ils deviennent amants. Bientôt, son épouse Catherine manque de se tuer accidentellement puis tombe malade, peut-être victime d’un empoisonnement. Or Myriam serait initiée à la magie noire africaine, selon Vial un proche de Myriam : il est aussi un conférencier et précisément auteur de recherches ethnologiques sur le sujet. Myriam menace bientôt François : il va devoir choisir, et vite, entre elle et son épouse. François en vient à se demander si Myriam n’aurait pas véritablement « jeté un sort » à Catherine ? Et si, au cas où il voudrait rompre avec Myriam, sa propre vie ne serait pas en danger ?

Maléfices (Fr. 1962) de Henri Decoin, distribué en mars 1962, est adapté du roman homonyme de Pierre Boileau & Thomas Narcejac. Tourné dans un somptueux DyaliScope N&B, avec en vedette Juliette Gréco au sommet de sa beauté plastique, le scénario oscille subtilement entre film fantastique et film policier.

Maléfices

Cette ambivalence avait déjà été exploitée en 1955 par Henri-Georges Clouzot et en 1958 par Alfred Hitchcock lorsqu’ils avaient adapté au cinéma deux autres romans de Boileau-Narcejac qui reposaient, eux aussi, sur une telle oscillation. Elle est mise en scène par Decoin d’une manière tantôt spectaculaire (le générique d’ouverture, l’inondation de la route à marée haute nocturne), tantôt insolite (le guépard dans le salon maladif du manoir) tantôt inscrite dans une quotidienneté sournoise (l’empoisonnement à l’arsenic). La mise en scène et la direction photo isolent les personnages principaux dans d’étranges paysages aux confins de la terre et de la mer, perdus sous l’infini d’un horizon menaçant. Le générique d’ouverture donne le ton : il est spectaculaire et intimiste à la fois, amplifié par une musique dodécaphonique inquiétante. Quelques facilités ont mal vieilli (l’exotisme appuyé, un peu suranné, de la domestique africaine et du guépard) mais elles sont contrebalancées par la relative rigueur avec laquelle le thème du surnaturel et de la nature dans la mentalité primitive est illustré : le documentaire S8mm visionné dans la chambre d’hôtel par le vétérinaire et Vial, aurait certainement beaucoup intéressé Émile Durkheim, Lucien Lévy-Bruhl, Mircea Eliade, Roger Caillois. C’est ce thème qui confère sa densité et sa puissance à une histoire dont la progression dramatique est soigneusement mesurée - j’allais écrire : distillée ! - afin de mener le spectateur de l’inquiétude à l’angoisse puis à la peur. Juliette Gréco est un autre attrait qui résiste bien, lui aussi, au temps écoulé.

Un bel exemple de film fantastique français : ce genre fut plus souvent illustré qu’on ne le pense dans l’histoire de notre cinéma, des origines muettes à nos jours. Et la période 1960-1970 recèle des titres rares et originaux, aujourd’hui oubliés ou méconnus, lui appartenant : Maléfices en est un qui fut injustement ignoré par la critique française spécialisée dans le genre fantastique des années 1960-1970. Injustice que cette critique compensera, avec retard mais très sincèrement.

Maléfices

Présentation - 2,5 / 5

1 Blu-ray BD 50 en 1980 x 1080p AVC , encodage MPEG 4 AVC, multi-régions ABC édité par Gaumont, collection Gaumont Découverte, le 22 septembre 2021. Image N&B au format original 2.35 N&B respecté compatible 16/9. Son DTS-HD Master Audio 2.0 Mono VF + VF sous-titrée sourds et malentendants. Durée du film : 104 min. Suppléments : Présentation par Didier Decoin (2021) + bande-annonce originale (1962). Sous-titrage pour sourds et malentendants.

Bonus - 2,5 / 5

Présentation par Didier Decoin (2021, durée 17 min. environ) : claire et vivante présentation par le fils du cinéaste, rassemblant des souvenirs et des informations de première main sur la genèse du film, son tournage, sa réception critique. Je partage tout à fait son jugement esthétique : l’alliage des paysages, de la musique et du format engendrent une oeuvre à la tonalité étrange et sourde, foncièrement insolite, au casting intéressant. Une remarque thématique, à l’occasion de l’écriture du scénario et du casting de Liselotte Pulver, sur l’intérêt constant d’Henri Decoin pour le thème flaubertien de ce qu’on avait appelé dans le temps le « bovarysme » du nom de l’héroïne de son roman Madame Bovary.

Bande-annonce originale (durée 3 min. 15 sec. environ, DyaliScope N&B) : en bon état argentique, à l’esthétique ample, belle et bien montée, reposant intelligemment sur l’oscillation film policier / film fantastique qui est le ressort dramatique du suspense.

Ensemble sympathique auquel il manque tout de même une solide galerie affiches et photos françaises originales d’exploitation pour obtenir une meilleure note.

Maléfices

Image - 5,0 / 5

Format original DyaliScope 2.35,N&B compatible 16/9 : très belle copie argentique positive, en parfait état, de toute évidence retirée d’après le négatif. Direction de la photographie somptueuse signée Marcel Grignon (1914-1990) : environ 120 longs métrages photographiés entre les années 1940 et 1985 mais aussi et surtout l’un des meilleurs techniciens du cinéma français des années 1955-1965, concernant le format Scope 2.35, qu’il soit photographié en N&B ou en couleurs. Une erreur technique cependant durant un plan de demi-ensemble où le vétérinaire s’éveille d’un cauchemar : on peut repérer, durant une seconde au moins, le déplacement de l’ombre du micro de prise de son sur le mur légèrement éclairé, derrière le lit. Numérisation conciliant d’une manière équilibrée lissage vidéo et respect du grain, remarquable gestion des dégradés noirs et gris. Logo du distributeur de 1962, Paramount, préservé au générique d’ouverture, juste après le logo Gaumont 2021.

Son - 5,0 / 5

VF originale DTS-HD Master Audio 2.0 mono en excellent état et VF avec sous-titres pour sourds et malentendants, coloriés et intuitivement répartis en fonction de la répartition spatiale des locuteurs, comme toujours chez Gaumont. Musique dodécaphonique parfois expérimentale, d’une belle ampleur, signée Pierre Henry.

Crédits images : © 1962 Gaumont / Films Paramount

Configuration de test
  • Téléviseur 4K LG Oled C7T 65" Dolby Vision
  • Panasonic BD60
  • Ampli Sony
Note du disque
Avis

Moyenne

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francis moury
Le 10 décembre 2021
Film policier français rare, au suspense angoissant qui repose sur un thème fantastique, adapté d'après un roman de Boileau-Narcejac et plastiquement très soigné.

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Multimédia
Maléfices
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