Les Enfants du Paradis (1943) : le test complet du Blu-ray

Édition Digibook Collector

Réalisé par Marcel Carné
Avec Arletty, Jean-Louis Barrault et Pierre Brasseur

Édité par Pathé

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Le 15/11/2012
Critique

Sur le Boulevard du Temple, dit le « Boulevard du Crime », pour quelques centimes, on peut voir la belle Garance, nue comme la vérité sortant du puits. Dès qu’il l’aperçoit pour la première fois, le mime Baptiste tombe amoureux d’elle. Mais, timide et, par déformation professionnelle, peu bavard, il n’ose lui déclarer sa flamme. Et la vie va les séparer…

Les Enfants du Paradis, sur un scénario et des dialogues de Jacques Prévert, nous plonge dans l’agitation des Grands Boulevards, dans la première moitié du XIXe siècle, où bateleurs, saltimbanques, bonimenteurs, femmes à barbe et jongleurs attirent une foule de badauds… et de vide-goussets.

Ce chef d’oeuvre du cinéma français et international nous transporte, pendant plus de trois heures qui passent trop vite, dans un univers poétique où nous attendent une galerie de personnages hauts en couleurs : aux côtés de Garance et Baptiste (les meilleurs compositions d’Arletty et de Jean-Louis Barrault), Frédéric Lemaître, interprété par Pierre Brasseur et Pierre-François Lacenaire, le mauvais garçon que fait revivre Marcel Herrand. Mais il y a aussi Maria Casarès, Pierre Renoir, Gaston Modot, Louis Salou, Jane Marken, une belle représentation du gotha des acteurs d’alors.

Un film immense dû au talent de ses auteurs, à commencer par Marcel Carné, cinéaste exigeant, pourtant si décrié par beaucoup des critiques du temps de la Nouvelle Vague, alors qu’il avait réalisé toute une série de films majeurs : Drôle de drame, Le Quai des brumes, Hôtel du Nord, Le Jour se lève, Les Visiteurs du soir. Jacques Prévert a, bien sûr, apporté une contribution essentielle à l’oeuvre, par la poésie, toute simple, des dialogues ; il fait dire à Baptiste « Nous étions plusieurs à la regarder, mais j’étais seul à la voir », lequel, plus tard dira à Garance : « J’aime votre rire » qui lui répondra : « Moi aussi, sans lui qu’est-ce que je deviendrais ? ». Mais il serait injuste d’oublier de saluer la musique du compositeur Maurice Thiriet, qui obtint qu’elle fut dirigée par Charles Münch, la musique des pantomimes par Joseph Kosma, les décors d’Alexandre Trauner, les costumes de Mayo…

Un enchantement de tous les instants, dédié aux amoureux fauchés du théâtre qui pouvaient assister aux spectacles pour moins d’un sou, pour trois centimes, perchés à la hauteur des cintres, « au paradis », auxquels Garance rend hommage « Leur vie est toute petite, mais ils ont de grands rêves ».

Un brillant manifeste de liberté, tourné en pleine occupation allemande…

Présentation - 5,0 / 5

Les deux disques, celui du film et celui des bonus, viennent s’insérer dans l’épaisse couverture d’un superbe livre de 56 pages, commençant par les souvenirs de tournage de Marcel Carné, suivis d’une analyse du film par Carole Aurouet, auteur de plusieurs ouvrages sur Jacques Prévert, et de deux articles sur la restauration du film, par le laboratoire de Bologne, L’Immagine Ritrovata, puis par les Laboratoires Éclair.

Cette nouvelle édition comprend deux disques joliment sérigraphiés, des menus splendides, des sous-titres anglais et français pour malentendants et une piste audiovision. Un bel objet de collection !

Bonus - 5,0 / 5

La quantité s’allie, une fois n’est pas coutume, à la qualité. Jugez sur pièces en passant en revue les presque trois heures de bonus logées sur le deuxième Blu-ray, certains repris du DVD édité en 2006, la plupart inédits, en SD pour l’image ou le son, sauf mention contraire.

Il était une fois… les Enfants du paradis (51’15”), riche en anecdotes, contient des interviews de Marcel Carné et Jacques Prévert, Pierre Brasseur, Arletty, mais aussi de Bertrand Tavernier, sur les difficiles conditions de tournage aux Studios La Victorine à Nice, d’août 1943 à l’automne de 1944 ; la sortie sera reculée par Marcel Carné en mars 1945, quand le film tint l’exclusivité pendant 54 semaines ! Suivent, dans le même chapitre, des entretiens avec Jean-Louis Barrault en 1976 sur le plateau de Monsieur Cinéma (7’03”), avec Pierre Brasseur en 1974 (10’12”), des archives Pathé sur le tournage (5’13”), deux entretiens avec Alexandre Trauner, le premier de 1985 (4’51”) et un autre de 1982, Ciné Parade, l’usine à rêves (1’42”), trois galeries de photos, des décors (44”), des costumes de Mayo (39”) et de photos de plateau, certaines colorisées (7’36”, en format AVC).

Un passionnant documentaire, malheureusement un peu court (11’55”), sur la restauration de l’image et du son, en Italie et en France.

Vient ensuite un intéressant entretien avec Carole Aurouet (31’50”) qui évoque la rencontre, en 1935, de Marcel Carné avec Jacques Prévert marquant le début de leur collaboration ultérieure pour quatre longs métrages. Carole Aurouet rappelle également les projets qui n’auront pas abouti, la démesure du film avec les décors du Boulevard du Crime, longs de 80 mètres dans lesquels ont évolué jusqu’à 1.800 figurants ! Passionnant !

Pour finir, Hallucination de Pierrot, un tout petit film (2’29”) de 1906 : Pierrot, ivre, s’endort aux pieds de la statue d’une femme qui s’anime. Une légende, une vie : Arletty vue par Jacques Prévert (13’08”). Marcel Carné, le retour, 1974 : survol d’une longue carrière au cinéma commencée comme assistant-réalisateur de Jacques Feyder dans la Kermesse héroïque. Tête d’affiche : Lady Arletty (13’26”) où Henri Jeanson et Michel Simon, en 1969, évoquent l’actrice de trois films mythiques, Hôtel du Nord, Les Visiteurs du soir et Les Enfants du paradis.

Image - 5,0 / 5

L’image est merveilleusement restaurée, nonobstant l’avertissement liminaire sur les marques du temps qui n’auraient pas pu être effacées. Le patient travail de restauration, image par image, est d’abord physique : mettre bout à bout les morceaux de pellicule les moins détériorés, réparer les perforations ; puis il continue avec l’assistance d’un ordinateur : effacer chaque griffure, chaque tache, à l’aide d’un « tampon » comparable à celui de Photoshop.

Résultat fantastique : une image parfaite, sans sautes de lumière, sans la moindre scorie, idéalement contrastée, avec des noirs denses et dont la résolution a été magnifiée par un transfert 4k. Tout ça avec un lissage modéré qui sauvegarde la texture d’origine.

Son - 5,0 / 5

La restauration a, encore, accompli des prodiges, malgré les limites de l’exercice, imposées par le nécessaire respect de l’oeuvre originale. L’option du format DTS-HD MA 2.0 conserve le son mono d’origine et c’est tant mieux !

Le son est propre, pratiquement exempt de souffle et de grésillements. Quelques saturations perturbent très occasionnellement les forti de l’accompagnement, mais les dialogues sont restitués avec une exceptionnelle clarté.

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-3806
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918 (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 1 février 2024
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