Un Tramway nommé désir (1951) : le test complet du Blu-ray

A Streetcar Named Desire

Réalisé par Elia Kazan
Avec Vivien Leigh, Marlon Brando et Kim Hunter

Édité par Warner Bros. Entertainment France

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Le 07/03/2013
Critique

Nouvelle Orléans, après la seconde guerre mondiale. Après une longue séparation, Blanche Dubois retrouve sa soeur Stella dans le vieux quartier français où elle vit avec son mari, Stanley Kowalski, un ouvrier d’origine polonaise. Tout d’abord révulsée par cet homme qu’elle juge violent et misogyne, Blanche se laisse peu à peu séduire par le charme « animal » de son beau-frère. Après le départ à l’hôpital de Stella, enceinte, une intense relation se nouera entre la douce et fragile jeune femme et le charismatique mais agressif ouvrier…

Un Tramway nommé Désir d’Elia Kazan est évidemment l’adaptation sur grand écran de la pièce écrite par le dramaturge Tennessee Williams et montée à Broadway en 1947 par… Elia Kazan avec Marlon Brando, énorme succès populaire qui révéla le comédien principal.

Les studios américains ont tout d’abord été frileux quant à une possible transposition au cinéma et c’est finalement la Warner Bros qui se lance dans la production du film au début des années 50. Sur l’insistance de Tennessee Williams, Elia Kazan accepte de mettre en scène cette adaptation en reprenant la quasi-intégralité du casting qu’il a dirigé sur scène. Seule Jessica Tandy, créatrice du rôle de Blanche se voit remplacer par Vivien Leigh, imposée par les studios en raison de son statut de star confirmé et nécessaire pour eux afin de vendre le film. Marlon Brando n’avait jusqu’alors tourné que dans un seul film au cinéma, C’étaient des hommes de Fred Zinnemann.

Le reste appartient à la légende. L’acteur devient un véritable sex-symbol et une icône pour la jeunesse d’après-guerre, la ligue pour la vertu américaine s’en mêle et dénonce le caractère sexuel du film, tandis que l’oeuvre d’Elia Kazan repart avec 4 Oscars : Meilleure actrice pour Vivien Leigh, Meilleur acteur dans un second rôle pour Karl Malden, Meilleure actrice dans un second rôle pour Kim Hunter, et meilleurs décors.

Aujourd’hui, Un Tramway nommé Désir étonne par son abondance de dialogues et son rythme très lent, mais n’a rien perdu de sa force et de son charme venimeux grâce notamment au jeu des comédiens, Vivien Leigh, Kim Hunter, Karl Malden et évidemment Marlon Brando, sensationnel, mélange de force et de fragilité, d’enfance et de virilité, d’innocence et d’animalité, qui crève littéralement l’écran dès son apparition. La musique singulière d’Alex North, alliant le jazz à la musique classique, souligne l’ambiguïté des personnages (tristes, manipulateurs, seuls, violents, menteurs et ténébreux), l’atmosphère moite et l’appétit sexuel environnant, tandis que la mise en scène d’Elia Kazan parvient à s’extirper sans mal du théâtre filmé.

Présentation - 3,0 / 5

Dommage que l’éditeur n’ait pas repris le visuel de l’ancienne édition DVD car celui du Blu-ray est moins attractif. De plus, si le menu principal est musical, il demeure désespérément fixe. En revanche, la sérigraphie du disque est vraiment très belle.

Bonus - 5,0 / 5

On commence cette imposante interactivité avec un documentaire rétrospectif sur la carrière d’Elia Kazan (1909-2003), en compagnie du réalisateur, réalisé en 1994 et narré par Eli Wallach. Ecrit et mis en scène par l’historien du cinéma Richard Schickel, ce film d’1h16 permet de voir ou de revoir de nombreux extraits des films d’Elia Kazan commentés par le cinéaste lui-même. Les anecdotes de tournage sont nombreuses, un portrait ainsi qu’une biographie du metteur en scène (son enfance, ses débuts dans le théâtre en tant que comédien, ses principaux films, sa passion pour l’écriture) sont également dressés en parallèle mais l’ensemble demeure plutôt sage et ne s’attarde pas du tout sur le fait qu’Elia Kazan ait dénoncé certains de ses confrères sympathisants communistes lors du maccarthysme.

Nous trouvons ensuite un autre documentaire rétrospectif sur Un Tramway nommé Désir, réalisé par Laurent Bouzereau. Divisé en cinq partie et d’une durée totale d’1h24, ce documentaire revient tout d’abord sur la création de la pièce de théâtre Un Tramway nommé Désir à Broadway mise en scène par Elia Kazan à la fin des années 40, déjà avec Marlon Brando, Karl Malden et Kim Hunter. Ces deux derniers apparaissent d’ailleurs dans tous les segments consacrés au film, tout comme Elia Kazan et Richard Schickel. C’est ici l’occasion d’en savoir plus sur le rapport du metteur en scène avec ses comédiens, sur les différentes représentations et le triomphe qui a conduit Hollywood à s’intéresser de plus près à la pièce sulfureuse de Tennessee Williams qui s’est jouée deux ans à Broadway. La deuxième partie est donc consacrée à cette transposition au cinéma en 1951 laborieusement mise en route puisque les studios ne cessaient de se refiler le projet par peur des représailles et de la censure. Le casting est donc passé au peigne fin, notamment le remplacement de Jessica Tandy par une star plus « bankable », en l’occurrence Vivien Leigh (qui remporta l’Oscar et la Coupe Volpi de la meilleure actrice), ainsi que les enjeux psychologiques des personnages, tandis qu’Elia Kazan avoue préférer la pièce au film et Jessica Tandy à Vivien Leigh.

S’ensuit la partie consacrée aux démêlés avec la censure (le célèbre Code Hays) et la condamnation de la célèbre Ligue pour la vertu (Legion of Decency), qui a conduit la Warner Bros à demander au monteur du film de réaliser une douzaine de coupes (soit environ 4 minutes de film) de scènes ou dialogues jugés trop explicites et crus (beaucoup de sous-entendus sexuels notamment), sans prévenir Elia Kazan, occupé sur Viva Zapata!

La version disponible sur ce Blu-ray est celle reconstituée par la Warner Bros grâce aux éléments coupés retrouvés en 1989 et ressortie en 1993 en VHS, LaserDisc puis plus tard en DVD. Un montage permet d’ailleurs de comparer la version sortie dans les salles américaines et celle reconstituée telle qu’Elia Kazan l’avait tout d’abord imaginé !

Ce documentaire se clôt sur un segment consacré à la sublime composition d’Alex North - ce qui permet de réhabiliter ce musicien trop souvent oublié, grâce aux interventions d’un spécialiste - ainsi qu’une partie dédiée à Marlon Brando où s’entrecroisent les hommages de tous les intervenants présents dans les autres modules.

Ne partez pas tout de suite, il reste encore des suppléments !

Outre trois bandes-annonces d’Un Tramway nommé Désir (de la sortie puis des ressorties en 1958 et 1970), nous trouvons également des chutes d’images (16’, magnifiquement restaurées) ou de prises de son (17’) permettant de voir ou d’entendre Marlon Brando à l’oeuvre et proposant différentes interprétations à chaque séquence tournée. Le supplément audio n’est pas sous-titré.

Un commentaire audio du comédien Karl Malden et des historiens du cinéma Rudy Behlmer et Jeff Young est également au programme et une fois n’est pas coutume disponible en version originale sous-titrée. Si si, il l’est… en chinois.

L’interactivité se clôt sur un essai vidéo de Marlon Brando (5’), non pas réalisé pour Un Tramway nommé Désir mais pour La Fureur de vivre, ou plutôt une version que les studios Warner Bros envisageaient de mettre en scène à la fin des années 40. Agé de 23 ans, Marlon Brando y fait preuve d’une extrême sensibilité mêlée à une force et une violence qui ont sûrement tapé dans l’oeil de certains producteurs puisque le comédien se verra offrir son premier rôle au cinéma en 1950 dans C’étaient des hommes (The Men) de Fred Zinnemann, juste avant l’adaptation d’Un Tramway nommé Désir au cinéma l’année suivante. A la fin de ce supplément, Marlon Brando répond face caméra à quelques questions posées sur sa carrière au théâtre.

Image - 5,0 / 5

Quel plaisir de redécouvrir les bijoux de l’âge d’or d’Hollywood dans de telles conditions ! Warner se devait de restituer la beauté originelle du N&B d’Un Tramway nommé Désir, présenté pour l’occasion dans sa version intégrale restaurée. C’est désormais chose faite et l’apport de la HD demeure omniprésent, offrant aux spectateurs un relief inédit, des contrastes denses et chatoyants. La propreté du master 1.37 est ébouriffante, la stabilité et la clarté sont de mise, le grain cinéma respecté et la compression AVC de haute volée. A l’exception de quelques plans peut-être plus vaporeux ou moins pointus, il serait impensable de ne pas donner la note maximale à ce master HD exceptionnel.

Son - 4,5 / 5

Point de remixage 5.1 superflu à l’horizon mais la version originale jouit néanmoins d’une élévation en DTS-HD Master Audio 1.0, tandis que la langue de Molière se contente d’une piste Dolby Digital 1.0. Aucun souffle, craquement, ni fluctuations ne sont à déplorer, le confort acoustique est clair, net, précis tout du long. La version française se révèle tout aussi soigné et propre, et la musique d’Alex North est également logée à la même enseigne.

Configuration de test
  • Téléviseur 16/9 Sony LCD Bravia KDL-32W5710
  • Sony BDP-5350
  • Ampli Pioneer VSX-520
  • Kit enceintes/caisson Mosscade (configuration 5.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 81 cm