Réalisé par Jean-Jacques Annaud
Avec
Sean Connery, Christian Slater et F. Murray Abraham
Édité par TF1 Studio
En l’an 1327, dans une abbaye bénédictine, le moine franciscain Guillaume de Baskerville, accompagné de son jeune novice Adso, enquête sur de mystérieuses morts qui frappent la confrérie. Le secret semble résider dans la bibliothèque, où le vieux Jorge garde jalousement un livre jugé maudit.
Avant d’être un film, Le Nom de la Rose est un chef d’oeuvre de la littérature, un roman écrit par l’immense Umberto Eco, paru en 1980 et traduit en français deux ans plus tard. Best-seller international récompensé entre autres par le Prix Médicis étranger en 1982, toujours classé aujourd’hui parmi les plus grands livres du vingtième siècle, Le Nom de la Rose tape immédiatement dans l’oeil du réalisateur Jean-Jacques Annaud. Alors qu’il vient de connaître un immense succès avec La Guerre du feu fin 1981 (près de 5 millions d’entrées dans nos contrées), il commence à se pencher sur son prochain film, L’Ours, quand Le Nom de la Rose arrive dans sa vie. Passionné de longue date par le Moyen-Age et les monastères, le réalisateur y voit alors tous les thèmes qui lui sont chers et décide de transposer ce roman, jugé pourtant inadaptable, remettant à plus tard son film avec le grand mammifère plantigrade.
Après plus d’une quinzaine de moutures, le scénario est enfin prêt. Sean Connery fait des pieds et des mains pour obtenir le rôle principal, allant même jusqu’à implorer Jean-Jacques Annaud en Allemagne où il fait les repérages. Le comédien écossais parvient à convaincre le réalisateur, mais les producteurs américains qui se sont déjà engagés sur le film, déchirent le contrat en apprenant cette nouvelle. Pour eux, l’ancien agent 007 dans la peau d’un moine franciscain entamera l’authenticité du projet. Le Nom de la Rose sera finalement une coproduction française, allemande et italienne.
Le Nom de la Rose est une réunion d’immenses et talentueux artistes : adapté du roman éponyme d’Umberto Eco, coécrit par Gérard Brach (Répulsion, Tess, Identification d’une femme), interprété par Sean Connery (avant de rejoindre l’équipe des Incorruptibles), photographié par Tonino Delli Colli - chef opérateur d’Il était une fois en Amérique et Le Bon, la Brute et le Truand - mis en musique par James Horner, tandis que les sensationnels décors sont créés par Dante Ferretti (Salò ou les 120 journées de Sodome, Les contes de Canterbury). A l’instar du roman original, le film, ou plutôt le « palimpseste » du roman comme l’indiquent les credits en ouverture, s’impose comme un véritable film policier médiéval. On pense souvent à une enquête menée par Sherlock Holmes, où Sean Connery, Guillaume de Baskerville (comme le célèbre chien…), ex-inquisiteur, interpréterait le rôle du détective créé par Sir Arthur Conan Doyle, tandis que son jeune novice (Christian Slater) serait le Docteur Watson. Par ailleurs, des références au private detective du 221B Baker Street sont disséminées à travers le film.
Solidement épaulé par des techniciens de renom, un script en béton armé et des interprètes (donc des personnages) extraordinaires (Michael Lonsdale, Ron Perlman, F. Murray Abraham), Jean-Jacques Annaud relève et remporte son défi, celui de rendre une intrigue complexe se déroulant en 1327 captivante sans jamais lasser les spectateurs, avec une modernité à couper le souffle, des dialogues somptueux, une dimension documentaire et historique qui subjugue à chaque plan (des décors, en passant par les costumes et les lumières), des séquences étouffantes de huis clos, des rebondissements inattendus comme dans un véritable polar populaire prenant place dans une abbaye bénédictine perdue dans une vallée alpine, le tout avec quelques pointes d’humour et une scène érotique qui aura marqué plus d’un spectateur.
Les spectateurs français ont fait un triomphe au film de Jean-Jacques Annaud. Avec près de cinq millions d’entrées, Le Nom de la Rose arrive en quatrième position au box-office de 1986 derrière Jean de Florette, Manon des sources … et Rocky IV.
Le Nom de la Rose fait peau neuve avec un master HD de haute volée. Le menu principal est animé sur la séquence du labyrinthe en version française. Le visuel de la jaquette est attractif.
S’il y a bien un réalisateur français dont il ne faut jamais manquer les commentaires audio, c’est bien Jean-Jacques Annaud. Celui du Nom de la Rose demeure évidemment indispensable. D’entrée de jeu, le cinéaste indique ce qui l’a poussé à vouloir transposer à l’écran le roman jugé inadaptable d’Umberto Eco - il aura quand même fallu 17 versions du scénario - notamment sa passion pour la période médiévale et les monastères depuis l’enfance, mais aussi d’autres thèmes qui, précise-t-il, semblaient s’adresser à lui personnellement.
Annaud indique que ce film représente quatre années de sa vie, évoque sa première lecture du roman d’Umberto Eco (un ami proche) avant même qu’il soit publié en français, le casting du film (John Huston avait été envisagé) et comment Sean Connery s’est battu pour obtenir le rôle, sachant que le cinéaste avait du mal à l’imaginer dans le rôle de Guillaume de Baskerville. Jean-Jacques Annaud passe également pas mal de temps à indiquer où ont été tournées les scènes en extérieur, mais aussi comment ont été élaborés les décors du célèbre Dante Ferretti. De multiples anecdotes de tournage s’enchaînent sur un rythme vif.
L’éditeur joint également un documentaire d’époque (1985) intitulé L’énigme des noms (64’), composé de rares et fantastiques images de tournage montrant Sean Connery à l’oeuvre, mais aussi et surtout d’interviews de Jean-Jacques Annaud, d’Umberto Eco, des comédiens (sur le plateau) et des producteurs, qui reviennent l’histoire du Nom de la Rose et ses personnages. La seule chose que nous reprocherons à ce documentaire est cette « intrigue » inutile mettant en scène un journaliste avide d’en savoir plus sur la genèse, le succès et la transposition à l’écran du Nom de la Rose. Ces séquences ralentissent le rythme, alors n’hésitez pas à accélérer un petit peu. Enfin, notons que ce documentaire était resté totalement invisible depuis sa première diffusion en 1988 sur la RAI et se voit proposer en HD d’après le négatif 16mm original.
L’éditeur joint également une réplique du dossier de presse original recueillant les propos d’Umberto Eco, Jean-Jacques Annaud, Gérard Brach, mais perd malheureusement le documentaire de deux heures disponible sur l’Edition Collector 2 DVD sorti chez Warner en 2004, ainsi que le making of de 43 minutes diffusé sur la ZDF, intitulé L’abbaye du crime.
Précédemment édité par Warner en DVD, le chef-d’oeuvre de Jean-Jacques Annaud fait peau neuve chez TF1 dans une édition HD (1080p, AVC) qui était attendue au tournant. Nous ne sommes pas déçus. Quelques-uns rechigneront devant le piqué parfois émoussé, divers flous sporadiques ou la gestion aléatoire des noirs, tantôt denses, tantôt bouchés, mais force est de constater que nous n’avions jamais vu Le Nom de la Rose dans ces conditions. Le grain est quasi-omniprésent, mais que serait l’extraordinaire photo signée par le légendaire chef opérateur Tonino Delli Colli (Il était une fois en Amérique, Le Bon, la Brute et le Truand) sans cette texture argentique qui ne cesse de ravir les yeux ! Certains plans sortent particulièrement du lot avec des détails riches et précis sur les décors de Dante Ferretti, mais également sur les visages des comédiens et les étoffes. Les contrastes (surtout sur les séquences sombres) apparaissent en parfait accord avec les volontés artistiques originales - inspirées par les oeuvres du Caravage, Rembrandt, Vermeer - qui rendent largement indispensable l’élévation du film en Haute Définition, d’autant plus que la copie affiche une remarquable propreté et délivre des clairs-obscurs réellement saisissants.
La version française bénéficie d’un excellent doublage, notamment le grand Claude Giraud qui prête son timbre de voix magnifique à Sean Connery. Pour cette sortie HD, cette piste bénéficie d’un encodage DTS-HD Master Audio 2.0 particulièrement ample et efficace, même s’il faut bien avouer qu’elle n’arrive pas à la cheville de la piste anglaise DTS-HD Master Audio 5.1. En effet, dès l’apparition des logos de distribution, la spatialisation de cette dernière s’avère remarquable, les enceintes latérales délivrent un lot fort appréciable d’ambiances naturelles (le vent, les cloches, le chant des moines), d’effets saisissants (le cri des cochons qu’on égorge brrr !), sans oublier la magnifique partition de James Horner. Les voix sont exsudées avec force par la centrale, la balance frontales-latérales est intelligemment équilibrée, l’ensemble est toujours dynamique et les basses interviennent à bon escient avec quelques pics remarquables qui font vibrer les murs et le sol.
Dans les deux cas, aucun souffle n’est à déplorer, l’écoute demeure franche et limpide. Pour l’anecdote, la version originale a été quasiment intégralement postsynchronisée puisque le lieu de tournage principal se trouvait coincé entre un aéroport, une autoroute et une voie de chemin de fer ! Le changement de langue ne peut se faire qu’à travers le menu contextuel et les sous-titres français (peu élégants) sont imposés.
Crédits images : © TF1 Vidéo