Réalisé par Vittorio De Sica
Avec
Lamberto Maggiorani, Enzo Staiola et Lianella Carell
Édité par Films sans Frontières
Si l’on fait une liste des meilleurs films de tous les temps,
on notera, au grand dam des cinéphiles de ce siècle naissant,
que la majeure partie des plus grands films ont été réalisés
dans la première moitié du vingtième siècle. Et, dans cette
liste, on trouvera en bonne place « Le voleur de bicyclette »,
de Vittorio de Sica.
Sur une histoire simple, De Sica érige un monument du cinéma,
bâti pour durer. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’Italie
subit de plein fouet une crise économique majeure. Au chômage
depuis deux ans, Antonio Ricci se voit enfin attribuer un emploi
de colleur d’affiches, pour lequel il devra se déplacer à vélo.
Il récupère donc celui-ci au mont-de-piété et se rend à son
premier jour de travail. Hélas, il se fait dérober la précieuse
bicyclette. Le dimanche suivant, avec son fils, il arpentera la
ville pour la retrouver.
Le film est à la fois terriblement implanté dans son époque et
incroyablement intemporel. En effet, De Sica a su axer la majeure
partie du fim sur les rapports familiaux, et, en particulier,
les relations père-fils. Un dimanche après-midi au cours duquel
un père aprend à connaître son fils, il se crée petit à petit un
lien très fort entre eux. Dans cette optique, le travail des
acteurs (tous non professionnels) est fantastique. D’un naturel
confondant, ils donnent toute leur profondeur à ces personnages,
qui tentent de survivre à une époque folle.
De Sica, par la même occasion, conserve une trace de cette
période durant laquelle le destin d’une famille dépend de la
possession de l’un des moyens de transport les plus basiques
qu’il soit. La bicyclette est de tous les plans au début du film,
et son fantôme hante l’esprit des spectateurs jusqu’au mot fin.
Et c’est à ce moment-là que « le voleur… » prend sa forme
critique.
Avec sa caméra, le cinéaste balaye une Italie fragile, en train
de renaître de ses cendres ; depuis les nouveaux HLM, plantés
dans le sable comme des parpaings blancs, aux vieilles rues de
la ville dans lesquelles peu de voitures circulent, et où la
délinquence a établi ses quartiers ; c’est la mutation de la
société italienne que vise le film, la charnière exacte où
l’Italie bascule pour devenir ce qu’elle est aujourd’hui.
Films Sans Frontières aligne les jaquettes sur le même modèle.
Seules les affiches et les photos de production changent.
Pourquoi pas ! Surtout que le rendu est plutôt joli ; les
lettrines élégantes et l’affiche du « voleur… » de belle
conception. On sera sympas pour cette fois, mais on demande
un peu d’imagination pour les prochaines éditions.
Comme toujours, le menu s’ouvre sur l’affiche du film. Ensuite,
on tombe sur des photos de production qui illustrent un menu
fixe mais musical. En revanche, les concepteurs font preuve d’un
mauvais goût certain en teintant de rouge lesdites photos.
Le film est accompagné d’une simple filmographie du réalisateur et d’une fiche historique bien détaillée ; mais c’est, hélas, trop peu. Les parutions de Olvidados, Los et de El présentent de bien meilleurs éléments. Bref, même si l’intention est bonne, l’élève Films Sans Frontières peut mieux faire.
A-t-on jamais entendu parler de restauration chez Films Sans Frontières ? La copie sur laquelle s’appuie le master de ce DVD est somme toute propre, hormis quelques déplorables accidents (qui pourraient être corrigés à la palette graphique) ; mais, hélas, les images manquent de piqué et, surtout, de contraste. Même si l’état de la pellicule ne justifie pas aujourd’hui une restauration, il vaut nieux prévenir que guérir, et passer la poussière sur ce film avant que cela ne soit devenu une absolue nécessité.
Pour une fois (et c’est une première chez Films Sans Frontières) le film bénéficie d’une VF… calamiteuse ! Inaudible et désynchronisée. On se rabattra donc sur la VO, qui, même si elle a subi les assauts du temps, s’avère tout de même fort honorable (dialogues un peu sourds).