Soudain l'été dernier (1959) : le test complet du Blu-ray

Suddenly, Last Summer

Réalisé par Joseph L. Mankiewicz
Avec Elizabeth Taylor, Katharine Hepburn et Montgomery Clift

Édité par Carlotta Films

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Le 21/08/2017
Critique

Soudain l'été dernier

Le docteur Cukrowicz vient de prendre ses fonctions à Lions View, un hôpital psychiatrique public de La Nouvelle Orléans, mais est rapidement découragé par le manque de moyens octroyés à l’établissement. C’est alors qu’il reçoit une étrange proposition de la part de Violet Venable, une riche notable qui vient de perdre son fils Sebastian dans des circonstances étranges. Celle-ci est prête à lever un fonds d’un million de dollars si le Dr Cukrowicz accepte de pratiquer une lobotomie sur sa nièce Catherine : selon elle, Catherine aurait perdu la raison depuis qu’elle a assisté à la mort de son cousin qu’elle accompagnait dans un voyage en Europe…

Soudain, l’été dernier (Suddenly, Last Summer), pièce de Tennessee Williams créée en 1958, fut, à l’initiative du producteur Sam Spiegel, adaptée pour l’écran dans un scénario coécrit par le réalisateur Joseph L. Mankiewicz et par le célèbre scénariste Gore Vidal (qui allait, vingt ans après, signer le scénario du Caligula réalisé par Tinto Brass en 1979).

Auteur d’une trentaine de pièces, Tennessee Williams allait laisser un forte empreinte dans le septième art en inspirant une centaine de films ou téléfilms, une empreinte d’autant plus durable que certaines adaptations de son théâtre sont des chefs-d’œuvre, comme Un Tramway nommé désir (Elia Kazan, 1951), La Chatte sur un toit brûlant (1958) et Doux oiseau de jeunesse, deux films réalisés par Richard Brooks en 1958 et 1962, ainsi que La Nuit de l’iguane par John Huston en 1964. Il écrivit aussi le scénario de deux œuvres fortes, Baby Doll, réalisé par Elia Kazan en 1956, et Propriété interdite (This Property Is Condemned), par Sydney Pollack en 1968.

Soudain l'été dernier

Personnages tourmentés, interprétés par des acteurs tourmentés pendant le tournage de Soudain, l’été dernier : Montgomery Clift n’est pas encore remis d’un grave accident de voiture, Elizabeth Taylor du décès accidentel du producteur Michael Todd, le troisième de ses sept maris, et Katharine Hepburn de sa séparation d’avec Spencer Tracy, son compagnon pendant 25 ans. Ces traumatismes récents ont nécessairement marqué le jeu des acteurs et souligné le mal-être des personnages d’un des films hollywoodiens les plus sombres. Tennessee Willliams avait, d’ailleurs, mis beaucoup de lui-même dans la pièce, son homosexualité, projetée à mots couverts sur le personnage fantomatique de Sebastian, la rupture avec sa famille après l’internement dans un asile psychiatrique de sa sœur Rose qui subira une lobotomie (le thème du poignant Frances, réalisé par Graeme Clifford en 1982, sur la triste destinée de l’actrice Frances Farmer, interprétée par Jessica Lange dans son meilleur rôle). Soudain, l’été dernier évoque aussi, de manière voilée l’inceste, la pédophilie et même, dans la scène finale, le cannibalisme : on comprend qu’il ait déclenché l’hostilité des ligues de vertu, plus encore que les autres adaptations des œuvres de Tennessee Williams.

Filmé en intérieurs, Soudain, l’été dernier crée un climat étrange. À l’intérieur de la luxueuse demeure de Violet Venable qui, telle un Deus ex machina, entre en scène, dans un ascenseur en fer ouvragé, toute vêtue de blanc. À l’intérieur de l’asile où Catherine, traumatisée par la mort de Sebastian, dont elle n’a pourtant aucun souvenir, semble obnubilée par la folie, au point d’être irrésistiblement entraînée vers le fond de ces sortes de fosses où sont entassés les patients, les hommes dans l’une, les femmes dans une autre. À l’intérieur de l’extraordinaire jardin de Sebastian, un hallucinant enchevêtrement de plantes exotiques au centre duquel sommeille, dans une petite serre qui lui est réservée, une plante carnivore, probablement une allusion inconsciente à l’amour dévorant de sa mère.

Soudain, l’été dernier a gardé, près de soixante ans après sa sortie, son pouvoir de fascination. Carlotta Films a comblé un vide, l’édition de 2002 étant depuis longtemps épuisée.

Soudain l'été dernier

Présentation - 3,0 / 5

Soudain, l’été dernier (113 minutes) et ses suppléments (29 minutes) tiennent sur un Blu-ray double couche logé dans un boîtier fumé glissé dans un fourreau qui reprend, en le simplifiant, l’affiche du film.

Le menu fixe et musical propose le film dans sa version originale, avec sous-titres optionnels et dans un doublage en français, les deux au format DTS-HD MA 1.0.

Sort, simultanément à cette édition Blu-ray, la première en France, une édition DVD avec le même contenu.

Bonus - 4,0 / 5

En supplément inédit, Le prédateur et sa proie (26’), l’intéressant regard de Michel Ciment, directeur de la publication du magazine Positif, porté sur Soudain, l’été dernier, la pièce en un acte de Tennessee Williams étoffée par Mankiewicz et Gore Vidal en un film de 114 minutes. Il rappelle que Tennessee Williams avait mis de son expérience personnelle dans la pièce, notamment la présence étouffante de sa mère. Il relève aussi l’attachement de Mankiewicz à l’influence du passé sur le comportement présent des personnages qui ressort dans la moitié de ses films, sa passion pour le langage et pour le théâtre qui l’avait conduit, en 1953, à porter à l’écran Jules César, le drame de Shakespeare, son intérêt pour les femmes, révélé par sa vision de la confrontation entre Violet et Catherine, entre Katharine Hepburn et Elizabeth Taylor qu’il choisira comme vedette de son prochain film, le démesuré Cléopâtre. Alors que Soudain, l’été dernier est aujourd’hui considéré comme un film important, il fut boudé à sa sortie par les Cahiers du Cinéma qui avaient tendance, au temps de la Nouvelle Vague, à rejeter tout ce qui venait de Hollywood.

Pour finir, la bande-annonce originale du film.

Soudain l'été dernier

Image - 5,0 / 5

L’image (1.85:1, 1080p, AVC) magnifiquement nettoyée, débarrassée du bruit sans altération de la texture argentique, avec une échelle de gris délicatement restaurée, assure le visionnage du film dans des conditions idéales.

La comparaison avec la bande-annonce permet d’apprécier la qualité du travail de restauration.

Son - 4,0 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 1.0 de la version originale est, lui aussi, très propre, avec très peu de souffle, et une ouverture de spectre et une dynamique correctes pour un film du début des années 60.

Cette appréciation vaut aussi pour la version française (également DTS-HD M A 1.0), malheureusement gâchée par la ridicule affectation du doublage de Katharine Hepburn.

Soudain l'été dernier

Crédits images : © Horizon Pictures

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 21 août 2017
Soudain l'été dernier, une des adaptations exemplaires du théâtre de Tennessee Williams à l’écran, a gardé, près de soixante ans après sa sortie, un étrange pouvoir de fascination.

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Soudain l'été dernier
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