L'Autre côté de l'espoir (2017) : le test complet du Blu-ray

Toivon tuolla puolen

Réalisé par Aki Kaurismäki
Avec Sherwan Haji, Sakari Kuosmanen et Ilkka Koivula

Édité par Diaphana

Voir la fiche technique

Avatar Par
Le 30/08/2017
Critique

L'Autre côté de l'espoir

Helsinki. Deux destins se croisent. Wikström, la cinquantaine, décide de changer de vie en quittant sa femme alcoolique et son travail de représentant de commerce pour ouvrir un restaurant. Khaled est un jeune réfugié syrien, échoué en Finlande par accident. Sa demande d’asile rejetée, il décide de rester, clandestinement. Un soir, Wikström le trouve près des poubelles de son restaurant. Touché par le jeune homme, il décide de le prendre sous son aile.

L’Autre côté de l’espoir (Toivon tuolla puolen, 2017) reprend le thème de la fiction précédente d’Aki Kaurismäki, Le Havre, réalisée en 2011 (Prix Louis-Delluc 2011 du meilleur film français) : celui d’un jeune immigré clandestin secouru par un homme de bonne volonté. Ce pourrait être le deuxième volet d’un triptyque annoncé sur l’immigration, à moins qu’Aki Kaurismäki ne se tienne à la résolution d’arrêter de filmer, annoncée en février dernier à la Berlinale qui lui a décerné l’Ours d’argent du meilleur réalisateur.

L’Autre côté de l’espoir s’ouvre d’une manière elliptique, caractéristique du cinéma d’Aki Kaurismäki : Khaled émerge d’un tas de charbon dans la cale d’un navire, descend par l’échelle de coupée pour s’enfoncer dans une ville qui lui est inconnue, toutes ses affaires dans un baluchon. Wikström sort de sa chambre et dépose, sur une table où une femme en bigoudis se ressert une grande rasade de vodka, son alliance et la clef de l’appartement qu’il quitte avec seulement une petite valise, avant de prendre le volant de sa Checker Marathon (le modèle des taxis américains des années 60). Sans qu’un seul mot soit prononcé, on sait déjà que les deux personnages, au même moment, vont changer de vie.

L'Autre côté de l'espoir

« La mort est facile, mais je veux vivre ! »

Le sujet est dramatique : Khaled a dû fuir Alep après avoir, à la fin d’une journée de travail, retrouvé les cadavres de tous les membres de sa famille sous les décombres de sa maison bombardée, puis perdu de vue à la frontière hongroise la seule rescapée, sa sœur Miriam. Parallèlement, Wikström, quitte tout son passé, sa femme alcoolique, son métier de VRP, pour, sur un coup de poker, se lancer dans l’inconnu en rachetant un restaurant.

La situation quasi-désespérée des deux personnages n’empêche pas Aki Kaurismäki d’avoir recours à l’humour caustique et burlesque, caractéristique de son cinéma. Entre quelques scènes dramatiques du film, se succèdent des plans cocasses, comme des pieds-de-nez au destin.

« Je suis tombé amoureux de la Finlande. Mais si tu sais t’enfuir d’ici, je te serais reconnaissant. »

Cette confidence de Khaled à un réfugié irakien arrivé avant lui dans le pays révèle une autre dimension de L’Autre côté de l’espoir : une critique acerbe de la Finlande d’aujourd’hui dans laquelle, par exemple, on tolère les provocations de voyous néo-nazis. Mais il brocarde particulièrement l’hypocrisie de l’administration, parfois avec un humour particulièrement noir dans cette scène où un juge rejette la demande d’asile de Khaled au motif que la ville d’Alep ne souffre pas d’insécurité, au moment précis où la télévision diffuse des bombardements apocalyptiques !

L’Autre côté de l’espoir, un grand petit film, salué dans plusieurs festivals en Europe, doit aussi au talent des deux acteurs principaux, Sakari Kuosmanen dans la peau de Wikström, son huitième rôle dans un long métrage sous la direction d’Aki Kaurismäki, et Sherwan Haji, un Kurde qui a quitté la Syrie en 2000 pour s’établir en Finlande et réussir, après différents emplois, à réaliser son rêve : devenir acteur.

L'Autre côté de l'espoir

Présentation - 3,5 / 5

L’Autre côté de l’espoir (140 minutes) et ses suppléments (68 minutes) tiennent sur un Blu-ray double couche logé dans un boîtier noir (non fourni pour le test effectué sur check disc).

Le menu animé et musical propose le film dans sa version originale, avec sous-titres imposés, un peu haut sur l’image, et dans un doublage en français, avec le choix, pour l’un et l’autre, entre deux formats, DTS-HD Master Audio 5.1 et 2.0.

Bonus - 3,5 / 5

En supplément, un entretien avec Aki Kaurismäki (52’), l’enregistrement de l’émission de Laure Adler dans la case L’Heure bleue, diffusée sur France Inter le 16 mars 2017. L’écoute de ce document (sur le plan fixe de trois personnages dans la fameuse voiture noire) demande un bel effort. Les propos du réalisateur, en finnois sans sous-titres, occupent plus de temps que la traduction qui nous en est donnée ultérieurement (ce qui permet de vérifier, au passage, que le finnois ne ressemble à aucune autre langue européenne). Une autre particularité de ce supplément est que, le plus souvent, Aki Kaurismäki ne répond pas aux questions (pas toujours inspirées d’ailleurs) qui lui sont posées. Une autre partie non négligeable du temps est pris par des clips musicaux.

Ceci dit, on grappille çà et là quelques rares informations sur la genèse du film. Aki Kaurismäki dit, notamment, s’être documenté sur la question de l’immigration en Finlande. Il dit aussi aimer tout faire en créant ses films, pas seulement l’écriture du scénario, la réalisation et la production, mais aussi la photo, la prise de son et le montage, tant la technique est importante au cinéma. Il rappelle aussi ses débuts dans le septième art : après avoir été refusé au concours d’entrée à l’école de cinéma, il entre par la petite porte dans cet univers, comme acteur, puis monteur, scénariste… Il dit avoir aimé le Néo-réalisme italien et la Nouvelle Vague, notamment Jacques Rivette, et avoir noué des liens d’amitié avec Jean-Pierre Léaud (qui joue dans Le Havre).

Ce qui ressort surtout de cet entretien, c’est, malgré la fin ouverte du film qui laisse une faible lueur d’espoir, le profond pessimisme d’Aki Kaurismäki : « Je ne crois pas à la survie de l’humanité qui va se détruire. C’est la vie… »

Suivent quatre vidéos de chansons inédites (13’) par des interprètes locaux, avec une prépondérance de la guitare. Un document qui reprend les inserts musicaux du film.

Pour finir, la bande-annonce.

L'Autre côté de l'espoir

Image - 4,5 / 5

L’image (1.85:1, 1080p, AVC) bénéficie d’un transfert qui respecte le grain argentique original, ce qui lui donne une relative douceur, sans jamais nuire à sa lisibilité quelles que soient les conditions d’éclairage. L’étalonnage des couleurs, bien contrastées, dans une palette assez froide, a été soigneusement effectué.

Son - 4,0 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 5.1 de la version originale (une piste DTS-HD MA 2.0 est également proposée), très propre, offre dynamique et finesse dont profitent les clips musicaux en contrepoint de l’histoire. Les dialogues (en finnois, anglais et arabe) sont toujours clairement restitués.

L’utilisation timide des voies surround ne génère qu’une très discrète sensation d’immersion dans l’ambiance.

Cette appréciation vaut pour le doublage en français, un peu monotone. Les dialogues sont maintenus en arabe, avec sous-titres automatiques.

L'Autre côté de l'espoir

Crédits images : © Diaphana Films

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

Moyenne

3,5
5
0
4
1
3
1
2
0
1
0

Je donne mon avis !

Avatar
P. de Melun
Le 26 novembre 2023
Sur fond d’immigration clandestine, de froideur sociétale et d’humanité individuelle, Aki Kaurismäki a l’art de nous faire passer de vrais messages sans aucune parole militante dans la bouche de ses personnages. Il en résulte une forme de grâce, accentuée par le jeu des acteurs, la force du propos, une acuité des situations dramatiques, un rythme volontairement indolent… Le traitement chirurgical de l’histoire est glaçant et peut rebuter tous ceux atteints par la sinistrose de notre époque. Pour les autres, ce film est bel et bien « L’autre côté de l’espoir » et pétri d’espérance. L'histoire est peu vraisemblable et le dernier regard évasif, dont on ne sait s'il est tourné vers l'espoir ou la mort, nous amène à réfléchir…
Avatar
Philippe Gautreau
Le 30 août 2017
L’Autre côté de l’espoir est un grand petit film sur le drame de l’immigration, salué dans plusieurs festivals en Europe. La gravité du thème n’empêche pas Aki Karismäki d’épicer son film de scènes cocasses, une habitude qu’il a prise de faire des pieds-de-nez au destin.

Lire les avis »

Multimédia
L'Autre côté de l'espoir
Bande-annonce 1 VOST
L'Autre côté de l'espoir
Bande-annonce 2 VOST

Proposer une bande-annonce

Du même auteur
(publicité)

(publicité)