The Fake (2013) : le test complet du Blu-ray

Saibi

Édition Collector

Réalisé par Yeon Sang-ho

Édité par Spectrum Films

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Le 29/06/2018
Critique

The Fake

Les habitants d’un village qui va être englouti après la construction d’un barrage ont reçu une indemnité d’expropriation qui suscite l’intérêt de Monsieur Choi, un homme d’affaires véreux, et du pasteur évangéliste Sung : les dons qu’ils les poussent à faire pour l’édification d’une nouvelle église leur ouvriront en grand les portes du paradis. Min-chul, un vaurien brutal et alcoolique, revient au village et tente de s’opposer aux escrocs…

The Fake (Saibi) est le deuxième long métrage du cinéaste sud-coréen Yeon Sang-ho, réalisé en 2012, un an après The King of Pigs (Dwae-ji-ui wang), une animation sur les tragiques retrouvailles de deux camarades de lycée après quinze ans de séparation. Pour assurer son indépendance, le réalisateur avait fondé sa propre société de production, le Studio Dada Show, avec laquelle il créera en 2106 son troisième long métrage d’animation, Seoul Station (Seoulyeok), sur une pandémie qui transforme en zombies les habitants du coeur de Séoul.

Le succès de ses trois premiers longs métrages attire l’attention des producteurs : Yeon Sang-ho dispose d’un budget de 9 millions de dollars pour réaliser Dernier train pour Busan (Busanhaeng), sorti en France en août 2016, salué par une trentaine de prix en Asie et ailleurs, sur la lutte pour la survie des passagers d’un train cherchant à échapper aux zombies.

The Fake

The Fake, une fable sombre et pessimiste, entretient la confusion entre le bien et le mal. Min-chul apparaît comme la quintessence du mal, tout juste sorti de prison, alcoolique et brutal. À peine rentré au bercail, il fait le malheur de sa fille en volant les économies qu’elle avait faites pour payer les droits d’entrée dans la prestigieuse université de Séoul où elle venait d’être admise. À l’opposé, le pasteur Sung semble l’incarnation du bien quand il réconforte ses ouailles, traumatisées par la disparition de leur village : les dons qu’ils feront pour la construction d’une nouvelle église leur garantiront une des places, en nombres comptés, encore disponibles au paradis.

Toutes ces apparences, comme le titre anglais du film le laisse deviner, ne sont que faux-semblants : Min-chul est le seul dans le village à avoir percé l’identité de Choi, un escroc notoire dont la photo figure pourtant sur la liste des criminels recherchés affichée dans le poste de police, et à avoir subodoré l’hypocrisie du pasteur, visant un seul objectif : disputer à Choi la plus grosse part des indemnités d’expropriation soustraites aux villageois.

The Fake, une féroce critique sociale du Pays du matin calme, n’épargne personne : les policiers sont trop paresseux pour arrêter les escrocs, la religion chrétienne, au moins celle prêchée par le pasteur Sung, qui cherche, pour mieux les gruger, à endormir la méfiance des villageois. Le réalisateur n’est pas plus tendre avec ces derniers : incultes, ils sont, de plus, assez stupides pour gober toutes les sornettes contées par Choi et Sung, pour croire à la guérison miraculeuse d’un faux paralytique, et pour leur abandonner toutes leurs économies. Même Min-chul, pourtant le seul « héros » de l’histoire, reste antipathique jusqu’au bout.

L’impact du message n’est pas amoindri par une animation rudimentaire, tribut de la modestie des moyens disponibles, d’autant moins que cette faiblesse est, dans une large mesure, compensée par le cachet du dessin épuré des personnages et des décors et par la beauté des paysages, fruits de la formation aux beaux-arts du réalisateur.

The Fake

Présentation - 3,0 / 5

The Fake (101 minutes) et ses généreux suppléments (107 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé dans un boîtier de 11 mm, glissé dans un fourreau.

Le menu animé et musical propose le film dans sa version originale, au format DTS-HD Master Audio 2.0 stéréo, avec sous-titres optionnels, placés un peu trop haut sur l’image.

Bonus - 4,0 / 5

Présentation du film par Cinéma coréen (20’). Yeon Sang-ho, attiré depuis l’adolescence par l’animation, réalise son premier film, un court métrage, à l’âge de 19 ans, en travaillant chez un sous-traitant, avant de créer sa propre structure, le Studio Dada Show, et de réaliser son premier long métrage, King of Pigs, puis, peu après, The Fake. L’histoire de la Corée, l’occupation par les Chinois, par les Japonais, puis par les Américains après une guerre fratricide qui a coupé le pays en deux, le développement économique à marche forcée et le bouleversement des valeurs traditionnelles qu’il a entraîné, mettant en valeur l’argent, devenu jauge de la réussite, ont imprégné le cinéma national, notamment celui de Yeon Sang-ho. Ses films d’animation portent un regard sans compassion sur la société coréenne, avec un graphisme qui ne cherche pas à l’embellir : il faut dire la vérité, même si elle dérange. The Fake fait des allusions claires aux effets désastreux, écologiques et financiers, du Projet des Quatre Rivières et épingle la religion (une bonne moitié de la population adhère encore aujourd’hui au confucianisme, protestantisme et bouddhisme), qu’il désigne clairement comme une forme « d’opium du peuple ».

Rencontre avec Antoine Coppola (19’). Yeon Sang-ho, reconnu comme un des plus importants cinéastes coréens du moment, a réussi à percer dans le domaine de l’animation, un créneau difficile en raison de la concurrence japonaise, en montrant la violence, la misère dans laquelle vivent les laissés pour compte du développement économique. Son graphisme réaliste, statique, dans lequel s’invite le fantastique, rappelle parfois Le Jardin des délices, l’intrigant tableau de Jérôme Bosch…

Critique par Les Cousins font leur cinéma (2003, 10’). Malgré l’animation rudimentaire, le film réussit à transmettre une ambiance crépusculaire sur la misère sociale dans le milieu rural et l’usage fait de la religion pour escroquer les gens…

Love Is a Protein, court métrage (2004, 23’). Un porc livre de la nourriture dans un appartement habité par trois jeunes sans le sou ; il se présente « à la place de l’homme-poulet », lequel apparaît et crie « Non ! ». À l’intérieur du paquet livré, un poulet pané, « Chickboy », le fils de l’homme-poulet, « qui voulait voler vers le ciel. » L’un des jeunes est très affecté par le chagrin du père, tandis qu’un petit fantôme facétieux apporte à l’histoire une note d’humour.

The Hell, court métrage (35’) en deux parties. 1. L’enfer. Un homme, dans les égouts, attrape un rat et le mange. Il se souvient de sa vie antérieure : ignoré par ses collègues, humilié par son chef de service, sa seule distraction était de regarder le calendrier… jusqu’à ce qu’un jour, un ange lui apparaisse pour lui annoncer qu’il allait mourir et se retrouver en enfer. La fuite est-elle possible ? 2. L’enfer. Un autre ange annonce à une jeune femme sur le point de se marier : « Tu vas mourir à 10 heures du soir, dans cinq jours, et tu iras au paradis ». « Cinq jours, c’est bien court pour mettre de l’ordre dans sa vie ». L’idée lui vient de s’enfuir avec son fiancé pour échapper à la prédiction…

Bande-annonce.

Tous ces bonus sont en haute définition, au format 1080i, AVC, DTS-HD MA 2.0.

Image - 4,0 / 5

L’image (1.85:1, 1080p, AVC), très stable, sans défauts de compression, propose des couleurs soigneusement étalonnées, assombries, à l’aulne de l’ambiance du film, mais toujours parfaitement lisibles, jusqu’à une surprenante explosion de lumière dans la dernière séquence.

Son - 4,5 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 2.0 stéréo est incisif, avec un spectre bien ouvert. Une efficace séparation des deux voies procure une sensation d’immersion dans l’action, très proche de celle que peut apporter le 5.1 si votre installation est équipée du décodeur Dolby Pro Logic II ou IIx.

Crédits images : © Studio Dadashow

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

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Philippe Gautreau
Le 29 juin 2018
The Fake, une fable sombre, violente et pessimiste, sans héros, reflète le regard sans concessions porté sur les mœurs sociales de la Corée du Sud par un jeune réalisateur, aussi indépendant que talentueux, dont on n’a certainement pas fini d'entendre parler.

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The Fake
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