J'accuse (2019) : le test complet du Blu-ray

Réalisé par Roman Polanski
Avec Jean Dujardin, Louis Garrel et Emmanuelle Seigner

Édité par Gaumont

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Le 08/09/2020
Critique

Une évocation inspirée de la courageuse détermination du colonel Picquart à réhabiliter le capitaine Dreyfus et un chef-d’oeuvre de Roman Polanski.

J'accuse

Une lettre non signée, déchirée en six morceaux, qu’on appellera « le bordereau » est remise au service de renseignements de l’armée par la femme de ménage de l’attaché militaire de l’ambassade d’Allemagne. Elle fait état de la transmission d’informations militaires. Quatre auteurs potentiels sont hâtivement désignés, parmi lesquels le capitaine Alfred Dreyfus, d’origine alsacienne, polytechnicien et de confession juive. Une instruction menée à charge aboutit à son arrestation. Après des débats conduits en violation des droits de la défense (des pièces supposées établir la culpabilité de l’accusé ont été communiquées au président du conseil, mais pas au défendeur), le conseil de guerre, siégeant à huis clos, déclare Alfred Dreyfus coupable de trahison le 22 décembre 1894, prononce sa dégradation et le condamne à la déportation perpétuelle. Le lieutenant-colonel Marie George Picquart, un des officiers qui avaient participé à l’instruction de l’affaire, affecté à la direction du service de renseignements, réalise que l’écriture du bordereau est différente de celle de Dreyfus et découvre l’espion, le commandant Ferdinand Walsin Esterhazy…

J’accuse est l’adaptation par Roman Polanski du roman D. (An Officer and a Spy), publié en 2013 (en France en 2019 sous le titre J’accuse) par le romancier et ex-journaliste Robert Harris, auteur d’autres ouvrages adaptés au cinéma, dont The Ghost Writer, réalisé par Roman Polanski en 2010. Ce roman se concentre sur le colonel Picquart qui, en défiant les ordres de sa hiérarchie d’étouffer l’affaire, eut à supporter les lourdes conséquences de son acharnement à faire prévaloir la vérité et à réhabiliter un officier injustement condamné.

L’affaire Dreyfus, très médiatisée, notamment par l’article d’Émile Zola dans L’Aurore, fit grand bruit à l’époque et, pendant une décennie, dans l’antisémitisme ambiant, divisa la France entre « dreyfusards » et « anti-dreyfusards », parmi lesquels on comptait Jean Jaurès qui, en guise d’argument contre la peine de mort, osa écrire : « Un troupier vient d’être condamné à mort et exécuté pour avoir lancé un bouton au visage de son caporal. Alors pourquoi laisser ce misérable traître en vie ? » Le soutien obstiné de la thèse de la culpabilité de Dreyfus par le pouvoir en place valut au colonel Picquart d’être déchu de son poste, muté en Tunisie, avant d’être réformé puis emprisonné pendant un an. Émile Zola, à la suite d’une plainte pour diffamation déposée par le ministre de la guerre, fut condamné par la cour d’assises de la Seine à la peine maximale d’un an d’emprisonnement et au paiement d’une amende de 3 000 francs.

J’accuse, pour son respect de la vérité, réussit à captiver l’attention et, grâce à un découpage habilement structuré, à entretenir le suspense de la première à la dernière séquence en donnant au film le ton d’un thriller.

J’accuse immerge le spectateur au crépuscule du XIXème siècle et à l’aube du XXème avec une méticuleuse reconstitution de l’époque. Les uniformes ont été scrupuleusement copiés, mais aussi, comme le réalisateur le précise dans le supplément, de nombreux cadres ont été inspirés par des tableaux de Vuillard, Manet, Monet, Toulouse-Lautrec… Tout ce travail concourt à à la remarquable esthétique de l’oeuvre, mise en valeur par la photographie de Pawel Edelman, chef-opérateur de six autres films de Roman Polanski, dont Le Pianiste (The Pianist, 2002) et The Ghost Writer (2010).

J’accuse, un film aux nombreux personnages, rassemble une extraordinaire distribution. Avec Jean Dujardin, probablement dans son meilleur emploi sous l’uniforme du colonel Picquart, mais aussi, dans les rôles secondaires, une belle galerie d’acteurs : Louis Garrel, émouvant dans son interprétation d’Alfred Dreyfus, Grégory Gadebois, Hervé Pierre, Wladimir Yordanoff, Didier Sandre, Melvil Poupaud, Mathieu Amalric, Vincent Pérez, Denis Podalydès, Emmanuelle Seigner, etc., tous attentivement dirigés par Roman Polanski qui apparaît furtivement dans une scène sous l’habit vert d’un académicien. À cette pléiade d’acteurs s’ajoute une armée de figurants, pas moins de 400, nous dit-on, pour l’audience publique du procès en révision.

L’accompagnement musical aéré, en contrepoint de quelques plans du film, a été composé et dirigé par Alexandre Desplat. Deux fois oscarisé, pour The Grand Budapest Hotel (Wes Anderson, 2014) et pour La Forme de l’eau (The Shape of Water, Guillermo del Toro, 2017), il a signé la partition des cinq derniers longs métrages de Roman Polanski.

J’accuse, un grand film, est aussi la meilleure de la dizaine d’adaptations pour l’écran de l’affaire Dreyfus, loin devant le très estimable L’Affaire Dreyfus, le téléfilm réalisé par Yves Boisset en 1995, jamais édité en vidéo.

Présentation - 4,0 / 5

J’accuse (131 minutes) et son supplément (32 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 dont toute la capacité a été utilisée, logé dans un boîtier non fourni pour le test, effectué sur check disc.

Le menu animé et musical propose le choix entre deux formats audio, DTS-HD Master Audio 5.1 ou 2.0 stéréo.

Piste d’audiodescription DTS-HD MA 2.0 et sous-titres pour malentendants.

Une édition DVD est disponible, avec le même contenu.

Bonus - 4,0 / 5

Making of J’accuse (32’). Roman Polanski projetait depuis six ans la réalisation de ce film qu’il souhaitait, initialement, tourner en studio, dans des décors reproduisant les lieux du drame. Les premiers producteurs approchés demandaient un tournage en anglais pour une plus large distribution du film. Le réalisateur a sollicité la contribution de plusieurs historiens et conseillers militaires pour retracer fidèlement l’histoire, faire revivre les personnages. Les décors ont été dessinés à l’aide de milliers de photos et de gravures et des tableaux de l’époque ont inspiré la composition de certains cadres. Le souci d’authenticité est allé jusqu’à une reproduction minutieuse des pièces du dossier. Roman Polanski a consacré beaucoup de temps à la mise en place des scènes, jusqu’à deux heures pour certaines. Le document souligne son contrôle de tous les détails, y compris de la pose de verrues sur le visage d’un des acteurs. Pour rappeler que l’antisémitisme continue de sévir, il cite Bertolt Brecht : « La chienne qui enfanta le monstre est à nouveau en chaleur ».

Bande-annonce.

Image - 5,0 / 5

L’image (1.85:1, 1080p, AVC), parfaitement résolue, agréablement contrastée, d’une texture délicate, propose une palette de couleurs discrètement saturées.

Son - 5,0 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 5.1 (avec une option 2.0 stéréo pour les installations non équipées pour décoder le 5.1) est irréprochable. Les dialogues sont restitués avec toute la clarté souhaitable. Une large ouverture de la bande passante, une forte dynamique et une répartition efficace sur les cinq canaux créent une réaliste impression d’immersion dans l’ambiance.

Crédits images : © Guy Ferrandis / All rights reserved

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

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Philippe Gautreau
Le 9 septembre 2020
J’accuse, grâce à son respect de la vérité et à un habile découpage, réussit à entretenir le suspense de la première à la dernière séquence, en donnant au récit la tonalité d’un thriller. Un grand film et, de loin, la meilleure de la dizaine d’adaptations pour l’écran de l’affaire Dreyfus.

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J'accuse
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