Monos (2019) : le test complet du Blu-ray

Réalisé par Alejandro Landes
Avec Julianne Nicholson, Moises Arias et Sofia Buenaventura

Édité par Le Pacte

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Le 07/10/2020
Critique

Ce film insolite, primé à Sundance, nous entraîne dans un hallucinant tourbillon de violence. Fascinant !

Monos

Huit adolescents armés assurent la garde, dans les montagnes de Colombie, d’un otage américain, une femme ingénieur qu’ils appellent Doctora. Ils sont régulièrement inspectés par le « messager » de l’organisation qui les a recrutés. Repérés et bombardés par l’armée régulière, ils se réfugient dans la forêt amazonienne…

Monos, sorti dans nos salles en mars 2020, est le troisième long métrage du réalisateur Alejandro Landes, né à São Paulo en 1980 d’une mère colombienne et d’un père équatorien. Son premier film, Cocalero, un documentaire sur les paysans boliviens confrontés à l’éradication de la culture de la coca, fut sélectionné en 2007 à Sundance pour le Grand prix du jury. Le deuxième, Porfirio (DVD édité en Espagne), le portrait tragi-comique d’un homme devenu paraplégique à la suite d’une bavure policière, fut retenu à Cannes dans la sélection Un certain regard.

Monos, difficile à classer, laisse volontairement le spectateur dans le flou sur « l’organisation » sous l’autorité de laquelle sont placés Rambo, Lobo, Leidi, Sueca, Pitufo, Perro, Patagrande et Bum Bum, sur les enjeux de la rébellion contre le pouvoir institutionnel. On peut cependant facilement imaginer que la toile de fond du scénario reflète la « violence ordinaire » qui a gangréné la Colombie pendant une soixantaine d’années et couve encore malgré les accords de paix signés avec les FARC en 2016. Un flou délibéré, confirme le réalisateur dans un entretien, pour donner une dimension universelle au sujet : « Sans ligne de front stable, les soldats ne savent plus de quel côté se tourner pour combattre. C’est une confusion générale entre les belligérants. Et c’est ce que j’ai cherché à représenter dans Monos. »

Monos

Monos exploite aussi le thème du comportement d’un petit groupe d’adolescents, coupés de la société, s’inventant ses propres lois et ses rites sauvages, en quête d’un pouvoir, qui peut rappeler Sa majesté des mouches, l’inoubliable adaptation en 1963 par Peter Brook du roman de William Golding, Lord of the Flies.

Monos, face à une actrice chevronnée, Julianne Nicholson, vue récemment dans les miniséries Eyewitness, créée par Adi Hasak en 2016, Law & Order True Crime - L’Affaire Menendez, par Rene Balcer en 2017 et The Outsider, par Richard Price en 2020, aligne des jeunes acteurs presque tous débutants, sauf Moises Arias dans le rôle de Patagrande et Laura Castrillón, dans celui de Sueca. Wilson Salazar a dû pouvoir se glisser facilement dans la peau du messager après avoir, il y a quelques années, encadré des guérilleros.

Dans un environnement qui peut rappeler celui d’Apocalypse Now de Francis Ford Coppola et d’Aguirre, la colère de Dieu (Aguirre, der Zorn Gottes) de Werner Herzog, Monos, insolite par son thème, l’est aussi par sa forme, une suite de scènes paroxystiques toutes prises en extérieur, parfois très violentes (et quelques moments de tendresse), dans des milieux hostiles, sur une montagne battue par les vents et noyée dans la brume sur laquelle se dressent d’étranges ruines, vestiges d’un passé difficile à dater, dans la forêt moite et étouffante, infestée de moustiques, dans les rapides d’une rivière gonflée par des pluies diluviennes…

La bande-son, avec l’obsédante composition de Mica Levi (révélée en 2013 par sa partition originale pour Under the Skin de Jonathan Glazer), renforce l’étrangeté de l’ambiance quand elle ne cède pas la place aux cris des animaux de la jungle, au crépitement de la pluie, au grondement d’une cascade, au hurlement du vent.

L’édition vidéo de Monos, complétée par un intéressant entretien avec le réalisateur, devrait permettre à ce film exceptionnel, malencontreusement sorti au début du confinement imposé par l’épidémie, de trouver le public qu’il mérite.

Monos

Présentation - 4,0 / 5

Monos (103 minutes) et ses suppléments (35 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé dans un boîtier non fourni pour le test, effectué sur check disc.

Le menu animé et musical propose le film dans sa version originale, en espagnol et en anglais, avec sous-titres imposés mais idéalement placés sous l’image, et dans un doublage en français, les deux au format audio DTS-HD Master Audio 5.1.

Piste d’audiodescription DTS 2.0 et sous-titres pour malentendants.

Une édition DVD est sortie simultanément.

Bonus - 4,5 / 5

Entretien avec Alejandro Landes (20’, en espagnol, sous-titré). Répondant aux questions de Victor Lamoussière, il rappelle avoir réalisé le documentaire Cocalero et écrit le scénario de Porfirio sans être passé par une école de cinéma. Il a été accepté à la Cinéfondation de Cannes pour un stage de six mois à Paris où il a pu « dévorer le cinéma » grâce à une carte d’accès à toutes les salles de la ville. Puis il a été reçu à la résidence de réalisation de Sundance pour le tournage de Porfirio. Pour Monos, c’est en équipe que se sont faits les repérages et le recrutement des vingt candidats présélectionnés pour jouer les jeunes « soldats ». Ils ont suivi dans la montagne un entraînement quasi-militaire pendant plusieurs semaines au cours desquelles certains dialogues ont été adaptés à l’âge des acteurs. Dans des conditions éprouvantes, une collaboration fructueuse s’est nouée avec le chef-opérateur Jasper Wolf, bien qu’il ne parle pas espagnol, pour un travail sur les couleurs visant à « amener la réalité imaginée (…) à la frontière du fantastique ». Mica Levi a composé l’accompagnement musical après avoir vu le film monté, en alliant des sons synthétisés et naturels, avec la collaboration de Lena Esquenazi, pour s’accorder aux lieux et à l’état d’esprit des personnages « à fleur de peau (…) en constante évolution et adaptation ». On ne sait rien sur les origines des personnages, emportés « dans un cycle où la violence engendre la violence. »

Making of Monos (11’). Ce document saisissant immerge le spectateur dans les conditions particulièrement éprouvantes du tournage dans la montagne, dans la forêt et sur la rivière.

Galerie de photos du tournage (2’), une trentaine.

Bande-annonce.

Monos

Image - 4,5 / 5

L’image numérique (2.39:1, 1080p, AVC), très finement résolue, solidement contrastée, assure une parfaite lisibilité de toutes les prises en lumière naturelle, dans des environnements variés : dans la brume, dans la semi-obscurité de la jungle, en plein soleil, dans la nuit.

Son - 4,5 / 5

Le son DTS-HD Master audio 5.1 de la version originale, servi par une large ouverture de la bande passante sollicitant souvent le caisson de basses, une bonne dynamique et une répartition efficace du signal sur les cinq canaux, immerge le spectateur dans l’action, tout en restituant clairement les dialogues.

Ce constat s’applique au doublage en français, très monotone.

Crédits images : © Stela Cine

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

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Philippe Gautreau
Le 8 octobre 2020
L’édition vidéo de Monos, complétée par un intéressant entretien avec le réalisateur, devrait permettre à ce film exceptionnel, malencontreusement sorti au début du confinement imposé par l’épidémie, de trouver le public qu’il mérite.

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Monos
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