Coffret 5 Pink Films - Vol. 1-5 : Une poupée gonflable dans le désert + Deux femmes dans l'enfer du vice + Chanson pour l'enfer d'une femme + Prière d'extase + Une famille dévoyée (1967) : le test complet du Blu-ray

Kôya no Dacchi waifu + Burû firumu no onna + Onna jigoku uta: Shakuhachi benten + Funshutsu kigan - 15-sai no baishunfu + Hentai kazoku: Aniki no yomesan

Pack

Réalisé par Atsushi Yamatoya
Avec Miki Watari, Yuichi Minato et Shohei Yamamoto

Édité par Carlotta Films

Voir la fiche technique

Avatar Par
Le 23/11/2020
Critique

Cinq films, encore inédits en vidéo, pour se faire une idée du cinéma érotique nippon des années 70 et 80.

Coffret 5 Pink Films - Vol. 1-5

Le film rose, pinku eiga, est un genre apparu au Japon à la fin des années 60 et a duré deux décennies. Les films, tournés en quelques jours avec de petits moyens, essentiellement en noir et blanc, avec quelques courtes scènes érotiques en couleurs, visaient à attirer un public d’hommes.

Le Coffret 5 Pink Films, nous propose des oeuvres triées sur le volet, affichant une certaine ambition artistique, avec des scénarios à la construction souvent sophistiquée, des cadrages et un montage recherchés, un jeu avec les couleurs et avec les sons. Une somme de caractéristiques qui les démarque nettement du tout venant de la production soft porn.

Une poupée gonflable dans le désert (Kôya no Dacchi waifu, Atsushi Yamatoya, 1967, 86 minutes, 2.35:1, noir et blanc). Sho, un détective privé, est engagé par un riche promoteur immobilier pour retrouver sa maîtresse disparue. Elle a été enlevée par des yakuzas et assassinée pendant le tournage d’un snuff movie. Elle est, en réalité, vivante… Une curiosité du genre due à son scénario à la structure insolite, avec des sauts dans le temps.

Prière d’extase (Funshutsu kigan - 15-sai no baishunfu, Masao Adachi et Haruhiko Arai, 1971, 73 minutes, 2.35:1, noir et blanc et couleurs. À Tokyo, noyé dans la brume, quatre lycéens, pour échapper aux conventions d’une société qu’ils jugent corrompue, s’adonnent au sexe collectif. Yasuko, 15 ans, enceinte d’un professeur, se prostitue et se pose deux questions : garder l’enfant, ou pas ? Vivre ou mourir ? Un des films les plus intéressants formellement, en partie grâce à la photo de Hideo Itô qui sera le chef opérateur de L’Empire des sens (Ai no korîda, Nagisa Ôshima, 1976).

Coffret 5 Pink Films - Vol. 1-5

Une famille dévoyée (Hentai kazoku: Aniki no yomesan, Masayuki Suo, 1984, 62 minutes, 1.85:1, couleurs). Koichi, le fils aîné des Mamiya, amène son épouse Yuriko dans la maison de ses parents et entame une relation avec une serveuse. Délaissée, Yuriko se rapproche des membres de la famille de son mari, de Shukichi, du père, qui croit reconnaître en elle sa femme défunte, de Kazuo, le jeune frère frustré et d’Akiko, la petite soeur. Pour cette dernière, le mariage signifie un confinement à la maison : elle veut vivre librement, gagner beaucoup d’argent et s’éclater. Elle choisit la voie de la prostitution : son premier client sera son frère…

Deux femmes dans l’enfer du vice (Burû firumu no onna, Kan Mukai, 1969, 78 minutes, 2.35:1, couleurs). Un agent de change, ruiné par la chute brutale du cours d’une action, ne peut rembourser une dette de 200 000 dollars envers Uchiyama qui accepte de reporter l’échéance, à condition que le débiteur défaillant lui prête sa femme. Cet arrangement conduit à la destruction du couple, dont la fille, Mariko, décide de faire payer le prix à Uchiyama…

Chanson pour l’enfer d’une femme (Onna jigoku uta: Shakuhachi Benten, Mamoru Watanabe, 1970, 76 minutes, 2.35:1, noir et blanc et couleurs). Okayo Benten est livrée par un policier à des yakuzas qui la recherchent pour le meurtre de plusieurs membres de leur clan. Ils ont pour ordre de la tuer et de la dépecer pour récupérer le tatouage de la déesse Kisshoten qui orne tout son dos. Elle est délivrée par un mystérieux joueur de shakuhachi (une flûte de bambou) portant le même tatouage… Une autre pièce maîtresse du coffret pour la beauté des cadrages et des éclairages.

Trois de ces films ont été produits par Daisuke Asakura, un pseudonyme masculin derrière lequel se cache une femme, Keiko Satô. Les meilleurs positifs 35 mm des films du coffret ont été trouvés par le laboratoire Rapid Eye Lab qui les a remasterisés en 4K, sans toutefois les restaurer « pour respecter l’expérience du spectateur de l’époque » nous précise un message inséré en exergue à chacun des films. Pas sûr, pour autant, que « l’expérience » du spectateur d’aujourd’hui aurait été gâchée par le nettoyage des marques laissées par le temps sur l’image ou les bruits parasites affectant certaines séquences.

Coffret 5 Pink Films - Vol. 1-5

Trois films sont les témoins d’une recherche expérimentale dans des genres différents. Celui du film noir pour Une poupée gonflable dans le désert, du film de sabre pour Chanson pour l’enfer d’une femme, du film politique pour Prière d’extase, avec la quête de quatre jeunes pour changer l’ordre des choses, pour « vaincre la sexualité », réalisé par Masao Adachi, un cinéaste au parcours surprenant, ex-yakuza chargé de donner les « autorisations » de tournage à Tokyo, engagé au Liban dans les rangs de l’Armée rouge japonaise, ce qui lui vaudra un séjour en prison après son extradition !

D’une facture plus conventionnelle, Une famille dévoyée, sous la forme d’une parodie du cinéma de Yasujirô Ozu, et Deux femmes dans l’enfer du vice, exploitent la veine du drame familial, voire du mélodrame le plus noir pour le deuxième, réalisé par Kan Mukai, un cinéaste exceptionnellement prolifique avec 200 films à son palmarès, dont 18 pour la seule année 1969 !

Le Coffret 5 Pink Films annonce clairement sa couleur, bien que trois des cinq films aient été, pour en réduire le coût, tournés en noir et blanc, avec quelques plans en couleurs pour une représentation plus réaliste de la nudité féminine : les scènes érotiques ne manquent pas, sans qu’on puisse jamais voir, ni même entre-apercevoir le moindre organe génital, dans le respect du code des bonnes manières nippones. Cette retenue culturelle ne freine par les audaces de nombreuses scènes de viol, de bondage, de coïts incestueux…

Le Coffret 5 Pink Films, une curiosité, contribue aussi à donner, avec le coffret Roman Porno 1971-2016 - Une histoire érotique du Japon, édité par Elephant Films (10 Blu-ray ou DVD, sorti en décembre 2019), un large aperçu d’un cinéma érotique atypique, resté populaire au Japon pendant deux décennies.

Coffret 5 Pink Films - Vol. 1-5

Présentation - 4,0 / 5

Le Coffret 5 Pink Films (d’une durée cumulée de 376 minutes) et ses suppléments (25 minutes) tiennent sur trois Blu-ray (2 BD-50 et 1 BD-25) logés dans un digipack à trois volets.

Un menu sur fond rose, fixe et musical, propose chaque film dans sa version originale, en japonais, avec sous-titres optionnels, au format audio DTS-HD Master Audio 1.0.

À l’intérieur du digipack, un livret de 24 pages propose, pour chaque film, quatre photos, le synopsis, une courte analyse critique, la biographie du réalisateur et sa filmographie sélective.

Une édition DVD est sortie simultanément, avec le même contenu.

Bonus - 3,0 / 5

Préface de Dimitri Ianni, critique et programmateur, spécialisé dans le cinéma asiatique pour :

Une poupée gonflable dans le désert (4’). Atsushi Yamatoya, surtout connu comme scénariste, n’a tourné que quatre longs métrages. Une poupée gonflable dans le désert est « sans doute, dans l’histoire du cinéma pink, l’un des films les plus singuliers jamais réalisés »

Deux femmes dans l’enfer du vice (4’). Kan Mukai, « entrepreneur du genre, véritable incubateur de talents » réalise en 1969 Deux femmes dans l’enfer du vice, un des premiers films pink en couleurs, « un pur produit de son temps traduisant le changement des moeurs au détour du virage post-soixante-huitard. »

Chanson pour l’enfer d’une femme (4’). Un des rares films en costumes (jidai geki) du genre pink dont Mamoru Watanabe fut un des pionniers. Inspiré de la série La Pivoine rouge, « il transcende les barrières du genre (…) en introduisant un ésotérisme bouddhiste avec des tatouages divins qui s’attirent, au-delà des volontés individuelles. »

Préface de Stéphane Du Mesnildot pour Prière d’extase (8’). Masao Adachi a été découvert par Kôji Wakamatsu, « l’empereur du cinéma pink » pour lequel il a écrit plusieurs scénarios. Prière d’extase, avec « une mise en relation des rapports sexuels et des rapports politiques et sociaux (…) est un film mélancolique, dédié au mal-être et à une jeunesse qui se retrouve dans une société bloquée ».

Préface de Pascal-Alex Vincent pour Une famille dévoyée (5’). C’est le premier long métrage de Masayuki Suo, devenu un célèbre réalisateur de cinéma populaire. En tête de distribution, Ken Osugi, acteur fétiche de Takeshi Kitano. Une famille dévoyée va « reprendre l’univers de Yasujirô Ozu mais le détourner à la sauce pinku eiga ».

Des présentations courtes, mais utiles.

Coffret 5 Pink Films - Vol. 1-5

Image - 3,0 / 5

Un avertissement signale que les films ont été remasterisés en 4K, mais pas restaurés… « pour respecter l’expérience du spectateur de l’époque » !

Pour l’image (1080p, AVC, 2.35:1, 1.85 :1 pour Une famille dévoyée), la note moyenne cache des différences d’un film à l’autre. Dans l’ensemble un peu trop douce, assez instable, elle est assez propre, mais peut être parsemée de quelques taches ou rayures. Les faiblesses de l’étalonnage du noir et blanc et des couleurs entraînent un contraste insuffisant et l’instabilité de certaines séquences, surtout en extérieur, ainsi qu’une occasionnelle coloration trop rouge des visages.

Son - 3,5 / 5

Pour le son DTS-HD Master Audio 1.0, la note attribuée est une moyenne. Le son est généralement assez propre pour quatre des films, moins pour Une poupée gonflable dans le désert dont plusieurs séquences sont affectées par un ronflement. Dynamique généralement assez faible.

Crédits images : © Yamatoya Production, Asakura Production, Kanto Eihai, Kokuei Company

Configuration de test
  • Vidéo projecteur JVC DLA-X70BRE
  • OPPO BDP-93EU
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • TEST EN RÉSOLUTION 1080p - Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

Moyenne

3,0
5
0
4
0
3
1
2
0
1
0

Je donne mon avis !

Avatar
Philippe Gautreau
Le 23 novembre 2020
Cinq films inédits, triés sur le volet pour leurs qualités esthétiques, et d’intéressants compléments, donnent une vue révélatrice du film rose, un genre qui attira son public masculin dans les salles de l’archipel japonais pendant les années 70 et 80. Une des curiosités de l’année 2020.

Lire les avis »

Multimédia

Proposer une bande-annonce

Du même auteur
(publicité)

(publicité)