Cure (1997) : le test complet du Blu-ray

Kyua

Réalisé par Kiyoshi Kurosawa
Avec Koji Yakusho, Tsuyoshi Ujiki et Anna Nakagawa

Édité par Carlotta Films

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Le 21/09/2021
Critique

Cette très étrange enquête policière inaugure un renouveau de l’horreur à la japonaise et révèle l’insolite talent d’un jeune réalisateur.

Cure

À Tokyo, l’inspecteur Kenichi Takabe recherche l’auteur d’une série de meurtres signés d’une croix entaillée dans le cou des victimes. Sur une plage, près de l’endroit où le dernier corps a été trouvé, Kunio Mamiya, un jeune homme, erre, sans savoir qui il est, ni où il est. Cet ancien étudiant en psychologie, passionné par les recherches de Messmer sur l’hypnose, attire l’attention de l’inspecteur…

Cure (Kyua), sorti en 1997, sélectionné dans de nombreux festivals, est le film qui a révélé hors du Japon le talent de Kiyoshi Kurosawa, promoteur, avec Hideo Nakata (Ring / Ringu, 1997) d’un renouveau du cinéma d’horreur japonais, étiqueté J-Horror, associant psychologie et surnaturel. Un genre qui essaimera hors de l’archipel nippon en inspirant des remakes aux USA ou par des coproductions nippo-américaines comme Le Cercle (The Ring) (Gore Verbisnki, 2002), The Grudge et The Grudge 2 (Takashi Shimizu, 2004 et 2006).

Cure s’affranchit des codes habituels de l’horreur. L’histoire est ancrée dans l’époque contemporaine : fini les costumes traditionnels et les effets spéciaux des films de fantômes japonais, dont un des modèles reste Kwaidan (Masaki Kobayashi, 1964). Les moments horrifiques, bien présents, ne sont pas exploités, juste montrés froidement, presque subrepticement. Le rythme est lent, la mise en scène sobre, faite d’une suite de plans fixes, souvent faiblement éclairés dans lesquels les personnages semblent surgir du néant, dans des décors presque nus comme celui d’un hôpital désaffecté, perdu en pleine campagne. Pour la confrontation entre l’inspecteur Kenichi Takabe et l’étrange Mamiya, suspecté d’être un ange annonciateur de l’apocalypse, Kiyoshi Kurosawa opte pour un style épuré et des couleurs désaturées dans une dominante glauque, à l’opposé l’explosion de couleurs et des flots d’hémoglobine choisis par Yoshihiro Nishimura pour un autre film pré-apocalyptique, Tokyo Gore Police (Tokyo zankoku keisatsu, 2008).

Cure

Cure, avec une étonnante économie de moyens, réussit à faire sourdre l’inquiétude, à créer un climat d’horreur glacée, stylée, qu’on reconnaîtra dans ses oeuvres ultérieures, Kaïro (2001), Retribution (Sakebi, 2006) et, hors du genre de l’horreur, dans Vers l’autre rive (Kishibe no tabi, 2015), un subtil film fantastique, Prix de la mise en scène en 2015 à Cannes dans la section Un certain regard.

La froideur ambiante de Cure est renforcée par la sobriété, la distanciation du jeu de l’acteur principal, Kôji Yakusho, que Kiyoshi Kurosawa a choisi dans sept autres de ses films, parce qu’il lui ressemble, nous confie-t-il dans l’entretien joint en supplément du film. C’est un des acteurs les plus en vue au Japon, avec plus d’une centaine de rôles. Il a été choisi par les grands cinéastes contemporains, par Shohei Imamura pour L’Anguille (Unagi, 1997) et De l’eau tiède sous un pont rouge (Akai hashi no shita no nurui mizu, 2001), par Rob Marshall pour Mémoires d’une geisha (Memoirs of a Geisha, 2005), par Takashi Miike pour 13 assassins (Jûsan-nin no shikaku, 2010) et Hara-Kiri, mort d’un samouraï (Ichimei, 2011), par Hirokazu Kore-Eda pour The Third Murder (Sandome no satsujin, 2017)…

Cure nous revient, pour la première fois en haute définition, après remastérisation, probablement celle effectuée pour l’édition Eureka Entertainment Limited, sortie au Royaume Uni en 2018.

Cure

Présentation - 3,0 / 5

Cure (111 minutes) et ses suppléments (38 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé dans un boîtier de 11 mm, glissé dans un fourreau.

Le menu animé et musical propose le film dans sa version originale, en japonais, avec sous-titres optionnels, et le choix entre deux formats audio, DTS-HD Master Audio 5.1 ou 2.0 stéréo.

Une édition DVD est sortie simultanément, avec le même contenu, proposée au même prix.

Bonus - 4,0 / 5

Le jouet du démon (22’, Allerton Films, 2021), un entretien avec Stéphane Du Mesnildot, essayiste, spécialiste du cinéma asiatique, auteur de Fantômes du cinéma japonais (Rouge profond, 2011). Cure suit le courant des films de serial killers, lancé par Manhunter - Le Sixième sens (Michael Mann, 1986), Le Silence des agneaux et Seven, dans lesquels les enquêteurs sont « possédés par l’esprit malin du tueur ». Il s’inscrit dans le genre de la « J-horror », l’horreur à la japonaise, peuplé de fantômes, redevenu populaire à la fin des années 90, une période marquée par des événements angoissants, le tremblement de terre de Kobé et l’attentat de Tokyo au gaz sarin. Le tueur de Cure, presqu’immatériel, est une sorte de « fantôme moderne » qui « libère les pulsions » des personnes qu’il approche, « pousse à bout » la traditionnelle politesse nippone, peut-être un « missionnaire de l’apocalypse » qui n’est plus lui-même, mais possédé par l’esprit de Messmer.

Un entretien avec Kiyoshi Kurosawa (15’, repris de l’édition MK2 de 2004, en traduction simultanée). Godzilla est le premier film dans lequel Kiyoshi Kurosawa a vu la destruction totale d’une ville, une forme de reproduction par les réalisateurs d’expériences qu’ils avaient vécues à la fin de la guerre. Aujourd’hui, il n’a plus peur de Godzilla, mais de ce qui se cache à l’intérieur de chacun, plus fort qu’un danger extérieur et visible qu’on peut fuir. Ses films sont la projection d’un futur possible, une réponse au pressentiment qu’un événement va mettre fin à la présente douceur de vivre, récurrent au Japon, où sont encore lues les prophéties de Nostradamus.

Bande-annonce.

Cure

Image - 4,0 / 5

L’image (1.85:1, 1080p, AVC) est propre, stable, bien définie, après une remasterisation qui a sauvegardé le grain argentique, assez visible mais cohérent avec l’aspect âpre et rugueux de la mise en scène. Dans une palette souvent sombre, aux couleurs désaturées, les personnages semblent souvent surgir de noirs apparemment bouchés : certainement un choix de mise en scène, pas une faille dans l’étalonnage.

Son - 4,0 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 5.1 (et, en alternative, la stéréo d’origine), très propre, avec une large ouverture de la bande passante assurant une bonne présence de l’ambiance, mais avec un cantonnement sur le plan frontal qui limite la sensation d’immersion et réduit la différence entre les deux formats proposés.

Crédits images : © 1999 DAIEI CO LTD. Tous droits réservés.

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

Moyenne

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Philippe Gautreau
Le 22 septembre 2021
Cure, avec une étonnante économie de moyens, réussit à faire sourdre l’inquiétude, à créer un climat d’horreur glacée, renforcée par la sobriété du jeu de l’acteur principal, Kôji Yakusho. Une approche de l’horreur, en marge des codes du genre, qu’on reconnaîtra dans les œuvres ultérieures de Kiyoshi Kurosawa. Ce film insolite nous revient, pour la première fois en haute définition, après remastérisation.

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