Contes cruels de la jeunesse (1960) : le test complet du Blu-ray

Seishun zankoku monogatari

Réalisé par Nagisa Oshima
Avec Yusuke Kawazu, Miyuki Kuwano et Yoshiko Kuga

Édité par Carlotta Films

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Le 17/11/2021
Critique

Le deuxième film de Nagisa Ôshima sur le rejet des valeurs traditionnelles par la jeunesse japonaise des années 50.

Contes cruels de la jeunesse

Makoto use de son charme pour se faire raccompagner chez elle par des quadragénaires lors de ses sorties nocturnes. Lorsqu’un soir, l’un d’entre eux tente de la ramener de force à son hôtel, Kiyoshi, un étudiant désabusé et violent, lui permet d’échapper au pire. Désormais attachés l’un à l’autre, Makoto et Kiyoshi entament une relation amoureuse ambiguë et troublée par les excès de violence de ce dernier…

Contes cruels de la jeunesse (Seishun zankoku monogatari) est le deuxième des trois premiers longs métrages de Nagisa Ôshima, sortis en 1959 et 1960, avec Une ville d’amour et d’espoir (Ai to kibo no machi) et L’Enterrement du Soleil (Taiyô no hakaba), précédemment édités en 2008 par Carlotta Films dans le coffret La Trilogie de la jeunesse : 3 films de Nagisa Oshima.

Contes cruels de la jeunesse est, par son style et son ambiance, un des films emblématiques de la Première Nouvelle Vague dont Nagisa Ôshima fut un des porte-drapeaux avec Masahiro Shinoda (Assassinat, Ansatsu, 1964), Yasuzō Masumura (Passion / Manji, 1964, dans le coffret La Femme de Seisaku + Passion), Seijun Suzuki (La Jeunesse de la bête / Yajû no seishun, 1963) et Shōhei Imamura (Cochons et cuirassés / Buta to gunkan, 1961)…

En colère… à cause de tout !

Ce cri de Kiyoshi classe Contes cruels de la jeunesse dans la catégorie des nombreux films révélateurs du mal-être de la jeunesse japonaise au lendemain de la seconde guerre mondiale, entretenu par l’humiliation ressentie par l’occupation américaine, levée en 1952, par la crise économique, par sa remise en cause des valeurs et de la culture traditionnelles, notamment soulignée par la place prise par le jazz. Ce rejet des conventions sociales creusa un fossé entre les générations.

Le principal ressort dramatique du film est l’évolution des relations entre Makoto et Kiyoshi, chacun des deux devenant peu à peu, sans peut-être en avoir conscience, les personnages méprisables dont ils voulaient seulement projeter l’image. Ce glissement progressif est subtilement communiqué par Miyuki Kuwano qu’avait employée Yasujiro Ozu dans Fleurs d’équinoxe (Higanbana, 1958) et Fin d’automne (Akibiyori, 1960). Kiyoshi est interprété par Yusuke Kawazu vu, notamment, dans La Condition de l’homme (Ningen no joken, Masaki Kobayashi, 1959), l’ambitieuse et inoubliable fresque récemment rééditée par Carlotta Films.

Contes cruels de la jeunesse nous revient dans une édition séparée, la première en haute définition, après une restauration 4K opérée par les studios Shōchiku en 2015.

Contes cruels de la jeunesse

Présentation - 3,0 / 5

Contes cruels de la jeunesse (97 minutes) et ses suppléments (42 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé dans le traditionnel boîtier de 11 mm, glissé dans un fourreau.

Le menu fixe et musical propose le film dans sa version originale, en japonais, avec sous-titres optionnels (bien placés à cheval sur la bande noire sous l’image), au format audio DTS-HD Master Audio 1.0.

Une édition DVD est sortie simultanément avec le même contenu.

Bonus - 4,0 / 5

Le Japon sous tension, entretien avec Donald Richie (25’, en anglais, sous-titré). Auteur de plusieurs ouvrages sur le cinéma japonais, il rappelle qu’à la fin des années 50, l’économie de l’archipel était défaillante et que l’apparition de la télévision dans la moitié des foyers avait fait déserter les salles de cinéma. Alors que les studios produisirent des films de monstres pour faire revenir le public, le studio Shōchiku a fait le choix de promouvoir des films différents, pour attirer les jeunes, en confiant leur réalisation à des nouveaux venus. Nagisa Ôshima fut, pour la première fois, autorisé à faire ce qu’il voulait. Ses premiers films rapportèrent peu d’argent, et Shōchiku retira vite des salles Nuit et brouillard au Japon (Nihon no yoru to kiri, 1960) à la dimension politique marquée en des temps d’agitation étudiante, ce qui conduisit Ôshima, rangé à gauche, à quitter le studio pour retrouver une liberté qu’il mit à profit dans les années 60. Les films formant La Trilogie de la jeunesse montrent la révolte des jeunes « emprisonnés dans le carcan d’une société rigide ». Les films suivants (pour la plupart réunis dans l’excellent coffret Coffret Nagisa Oshima - 9 films, édité par Carlotta Films en 2015) deviendront politiques en montrant de manière quasi-documentaire les conditions de vie des jeunes, indignes pour les plus pauvres. Le style d’avant-garde, influencé par le Film noir et la Nouvelle Vague, évoluera lorsque la caméra s’éloignera progressivement des acteurs et les scénarios deviendront plus sereins.

Extraits des carnets de notes d’Ôshima (15’). Quelques extraits de carnets sur lesquels le réalisateur notait des idées pour ses prochains films, ici ceux préparant La Trilogie de la jeunesse, recueillis en 1963, lus et illustrés par des séquences : « faire émerger le sens d’une situation (…) désigner l’énergie et les moyens d’un changement (…) rendre le sexe comme objet (…) jeunesse contemporaine impulsive (…) effondrement de la morale établie (…) drame de la conscience de soi (…) un monde où il faut vendre et se vendre (…) subjectivité de la caméra, panoramiques multiples (…) utilisation percutante du son (…) filmer les choses lentement (…) exprimer l’improbabilité du couple (…) ils ne pensent pas avoir fait quelque chose de mal mais la société les punit (…) aucun moyen d’exprimer sa colère, sauf sous une forme distordue (…) je veux exprimer ma colère contre la situation dans laquelle est prise la jeunesse contemporaine… »

Deux utiles compléments exclusifs produits en 2008 par Carlotta Films, repris du coffret La Trilogie de la jeunesse.

Bande-annonce (2’).

Contes cruels de la jeunesse

Image - 4,5 / 5

L’image (2.35:1, 1080p, AVC), parfaite dans les scènes en pleine lumière, lumineuse, bien contrastée avec des noirs denses et des couleurs naturelles soigneusement étalonnées, mais avec une profondeur de champ réduite dans les scènes les plus sombres. L’effacement des marques de dégradation de la pellicule n’a laissé subsister que d’infimes petites taches, à peine perceptibles, dans un scrupuleux respect de la texture du 35 mm.

Son - 4,5 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 1.0, très propre lui aussi, restitue clairement les dialogues et met en valeur l’intéressante partition avant-gardiste de Riichirô Manabe qui signa l’accompagnement des premiers films de Nagisa Ôshima.

Crédits images : © 1960 / 2014 SHOCHIKU CO., LTD. Tous droits réservés.

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

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Philippe Gautreau
Le 18 novembre 2021
Un des nombreux films révélateurs du mal-être de la jeunesse japonaise au lendemain de la seconde guerre mondiale et de son rejet des conventions sociales, creusant un fossé entre les générations. Cette œuvre de jeunesse de Nagisa Ôshima nous revient, pour la première en haute définition après une restauration 4K, et complétés par deux pertinents bonus.

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Contes cruels de la jeunesse
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