Illusions perdues

Illusions perdues (2021) : le test complet du Blu-ray

FNAC Édition Spéciale

Réalisé par Xavier Giannoli
Avec Benjamin Voisin, Cécile de France et Vincent Lacoste

Édité par Gaumont

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Le 22/04/2022
Critique

Une remarquable adaptation d’une oeuvre majeure d’Honoré de Balzac : on ne sent pas le temps passer au long des 2h30 de projection.

Illusions perdues

Lucien est un jeune poète inconnu dans la France du XIXème siècle. Il a de grandes espérances et veut se forger un destin. Il quitte l’imprimerie familiale de sa province natale pour tenter sa chance à Paris, au bras de sa protectrice. Bientôt livré à lui-même dans la ville fabuleuse, le jeune homme va découvrir les coulisses d’un monde voué à la loi du profit et des faux-semblants. Une comédie humaine où tout s’achète et se vend, la littérature comme la presse, la politique comme les sentiments, les réputations comme les âmes. Il va aimer, il va souffrir, et survivre à ses illusions.

Illusions perdues, le huitième long métrage de Xavier Giannoli, salué en 2022 par sept Césars, dont ceux du Meilleur film, de la Meilleure adaptation et de la Meilleure photographie, est l’adaptation de la deuxième partie d’un roman capital d’Honoré de Balzac, publié en trois parties entre 1837 et 1843, Les Deux poètes, Un grand homme de province à Paris, Les Souffrances de l’inventeur (le personnage de Lucien reviendra en 1847 dans Splendeurs et misères des courtisanes). Ces ouvrages s’intègrent dans le volet Scènes de la vie de province de La Comédie humaine.

Illusions perdues

Alors que l’oeuvre d’Honoré de Balzac a inspiré plus de deux cents adaptations pour le grand écran et la télévision, parmi lesquelles reviennent souvent La Peau de chagrin, La Cousine Bette ou Le Colonel Chabert, Illusions perdues n’avait été adapté que deux fois, en 2015 par Laurent Labbarrère dans un moyen métrage de 65 minutes et par Maurice Cazeneuve, en 1966, dans une minisérie où Lucien était incarné par un Yves Rénier débutant, qui venait d’être révélé au grand public par le rôle d’André Bellegarde dans la minisérie Belphégor, réalisée en 1965 par Claude Barma.

Illusions perdues restera une des plus brillantes adaptations d’Honoré de Balzac, dont elle restitue fidèlement le regard incisif de l’auteur sur la France de la Restauration, sur la futilité des abonnés à l’Opéra, là pour se faire voir en payant le prix de l’ennui, sur l’importance donnée aux apparences : Lucien, définitivement catalogué parce qu’il a montré quelqu’un du doigt à l’Opéra, est poussé à cacher ses origines roturières en troquant le nom de Lucien Chardon pour celui de Lucien de Rubempré en s’attribuant le nom de jeune fille de sa mère, à se ruiner en tenues au goût du jour dans les milieux huppés du « Faubourg »…

Les importants moyens alloués par la production d’Illusions perdues ont été intelligemment investis pour créer une remarquable reconstitution du Paris de la Restauration, du « Boulevard du Crime » où étaient tous les théâtres, rappelant celle imaginée par Marcel Carné pour Les Enfants du Paradis. Le film montre un Paris grouillant de monde avec une légion de figurants sur les Grands Boulevards ou sous les arcades du Palais Royal, une profusion de costumes, d’attelages, de somptueux décors naturels.

Illusions perdues

Tout s’achète et se vend. Le journal tiendra pour vrai tout ce qui est probable.

Le scénario donne, comme le roman, une large place au cynisme des jeunes journalistes qu’Honoré de Balzac connaissait pour avoir exercé ce métier avant de pouvoir vivre de ses romans. Ils faisaient chanter les directeurs de théâtre : une bonne critique valait 150 francs et la souscription d’une centaine d’abonnements. Un refus valait un papier à dissuader tout public d’acheter un billet. Un art de la mauvaise foi démontré par une savoureuse improvisation de Lucien, relevant, avec les mots de Balzac, le défi d’un collègue.

Illusions perdues brille aussi par sa distribution. Après quelques assez bons choix, avec Léo Karmann pour le « touchant » La Dernière vie de Simon, Benjamin Parent pour Un vrai bonhomme et François Ozon pour Eté 85, Benjamin Voisin relève sans faillir l’exigeant défi de l’incarnation de Lucien de Rubempré, récompensée par le César du meilleur espoir masculin. Il est solidement soutenu par trois autres jeunes : Xavier Nolan, dans le rôle d’un jeune romancier talentueux et narrateur du drame, Vincent Lacoste, révélé en 2009 par Les Beaux gosses, dans celui de Lousteau, rédacteur en chef d’un journal, et Salomé Dewaels, dans celui de l’actrice Coralie, la maîtresse de Lucien.

Dans des rôles secondaires, une autre génération d’acteurs relève vaillamment le gant. Cécile de France donne une sincère épaisseur à Louise de Bargeton, la première maîtresse de Lucien, et Jeanne Balibar distille aisément la condescendance persifflante de la marquise d’Espard. Gérard Depardieu est inoubliable dans sa composition de Dauriat, l’éditeur analphabète, tout comme Jean-François Stévenin, dans celle de Singali qui vit, plutôt bien, des faveurs des salles de théâtres en y organisant la claque. Citons encore Louis-Do de Lencquesaing, dans le rôle de Finot, patron de presse, et André Marcon dans celui du baron Du Châtelet, dit « la pintade ».

Illusions perdues

Présentation - 3,5 / 5

Illusions perdues (150 minutes) tient sur un Blu-ray BD-50, son supplément (49 minutes) sur un DVD-5, logés dans un boîtier non fourni pour le test, effectué sur check discs.

Le menu animé et musical propose le film avec le choix entre deux formats audio, DTS-HD Master Audio 5.1 ou stéréo.

Piste d’audiodescription DTS-HD MA 2.0.

Sous-titres pour malentendants.

Bonus - 4,5 / 5

Bande-annonce (2’11”).

Sur le DVD de bonus propre à l’édition spéciale de la FNAC :

Entretien de Xavier Giannoli avec Marie Sauvion pour Télérama (49’). Xavier Giannoli rêvait depuis longtemps d’avoir un jour les moyens de créer une « reconstitution viscontienne » du Paris de 1820 pour adapter ce livre qu’il avait découvert à 17 ans, dont un des professeurs de la Sorbonne lui avait « ouvert une autre dimension ». Balzac est un auteur de la « littérature du regard », que Sergei M. Eisenstein avait rapprochée de l’écriture filmique. Le réalisateur explique ses choix de supprimer le vertueux personnage de Daniel d’Arthez, la mauvaise conscience de Lucien, et de donner plus d’épaisseur à Louise de Bargeton. Son adaptation « subjective mais respectueuse de l’esprit de l’oeuvre », souligne l’inquiétude exprimée par Balzac : quelque chose de beau va-t-il pouvoir être préservé de la corruption par l’argent ? Une question soulevée par le cinéma, une industrie dépendante de l’argent (Illusions perdues a coûté 19 millions d’euros, ce qui lui a donné la possibilité de « créer tout un monde »). Mais, appuie-t-il, « la réussite d’un film, c’est toutes les concessions qu’on n’a pas faites ». Marie Sauvion souligne le mouvement qui embarque le spectateur dans une « ronde folle », à une époque, rappelle Xavier Giannoli, où la France prend le « grand virage vers le libéralisme économique ». Il justifie l’utilisation de la voix off, celle d’un personnage du film, Nathan d’Anastazio, interprété par Xavier Dolan.

Illusions perdues

Image - 5,0 / 5

L’image numérique (2.39:1, 1080p, AVC), lumineuse, fermement contrastée, avec des noirs denses et une résolution pointue, déploie une riche palette de couleurs dans des tonalités chaudes. Elle mérite tous les superlatifs !

Illusions perdues

Son - 5,0 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 5.1 (une alternative stéréo est proposée) restitue avec clarté les dialogues. Une large ouverture de la bande passante, des aigus aux graves, sollicitant à bon escient le caisson de basses, combinée à une répartition cohérente du signal sur les cinq voies immerge le spectateur dans l’ambiance. L’illustration musicale, faite de musique baroque, classique et romantique, est idéalement aérée.

Crédits images : © 2021 Curiosa Films, Gaumont, France 3 Cinéma, Pictanovo, Gabriel, Umedia

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

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Philippe Gautreau
Le 23 avril 2022
On tient là une des plus belles adaptations d’un roman d’Honoré de Balzac, pour son intelligence de l’œuvre, pour la richesse de sa mise en scène et pour la qualité de sa distribution, des rôles principaux comme des autres. En supplément, un utile entretien avec le réalisateur.

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