Matador (1986) : le test complet du Blu-ray

Réalisé par Pedro Almodóvar
Avec Antonio Banderas, Assumpta Serna et Nacho Martinez

Édité par Tamasa Diffusion

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Le 05/01/2023
Critique

Sortie attendue en haute définition d’une des dernières oeuvres de jeunesse de Pedro Almodóvar, un très curieux mélodrame romantique !

Matador

Gravement blessé, le torero Diego a dû quitter l’arène pour enseigner la tauromachie. Une de ses fans, l’avocate María, fascinée par son art, porte à ses partenaires sexuels une estocade fatale au moment de l’orgasme. Ángel, un des élèves de Diego, supporte difficilement le poids d’une stricte éducation catholique troublant sa sexualité…

Matador, sorti en 1986, le sixième long métrage de Pedro Almodóvar, est encore un film de jeunesse, provocateur, bien qu’on puisse apprécier le soin grandissant accordé par le réalisateur à la forme, de plus en plus policée, film après film, depuis Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier (Pepi, Luci, Bom y otras chicas del montón), sorti six ans plus tôt. Grâce aussi à la contribution du chef-opérateur Ángel Luis Fernández qui l’a accompagné depuis Le Labyrinthe des passions (Laberinto de pasiones, 1982) jusqu’à La Loi du désir (La Ley del deseo, 1986).

Eros et Thanatos

Diego est terriblement frustré de ne plus pouvoir mettre à mort des taureaux après s’être fait gravement encorner : « Arrêter de tuer, c’est comme arrêter de vivre ! » La scène d’ouverture le montre en train de se masturber devant un écran de télévision sur lequel défile une suite de mises à mort sanglantes, certaines par décapitation. L’amour et la mort sont indissociables pour Diego et María. Ce nouvel étalage des fantasmes qui hantent Pedro Almodóvar est probablement, en dépit de touches burlesques, le plus sombre et le plus pessimiste de toute sa filmographie.

Matador

Matador peut être vu comme une fable mettant en évidence les tiraillements de la société espagnole du milieu des années 80, une dizaine d’années après la fin du franquisme. La Movida, dont Pedro Almodóvar fut l’un des porte-drapeaux au cinéma, cohabite avec la rigueur d’antan, épinglée par l’éducation étouffante et castratrice imposée à Ángel par une mère adhérente de l’Opus Dei. L’éclipse à la fin du film symbolise peut-être cette dichotomie, en diffusant, comme le dit María, « une lumière à la fois noire et ardente ».

Matador, alors que Pedro Almodóvar est le cinéaste des femmes, met en avant trois personnages masculins, Diego, Ángel et le commissaire de police, interprétés par Nacho Martínez, Antonio Banderas et Eusebio Poncela, trois acteurs familiers de son cinéma, tout comme les actrices Carmen Maura, Julieta Serrano, Chus Lampreave et Assumpta Serna.

Matador nous est proposé en haute définition par Tamasa Diffusion dans une édition complétée par un utile bonus qui supplante définitivement le DVD sorti par Films sans Frontières en 2006. Rappelons aux amateurs du cinéaste l’édition Blu-ray Le Cinéma d’Almodóvar - Anthologie - 18 films sortie en 2016, encore trouvable.

Matador

Présentation - 3,0 / 5

Matador (106 minutes) et ses suppléments (32 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé dans un boîtier blanc, avec une reproduction de l’affiche créée par Juan Gatti, sur la jaquette, la sérigraphie du disque et le menu principal.

Le menu fixe et musical propose le film dans sa version originale, en castillan, et dans un doublage en français, les deux au format audio standard Dolby Digital 2.0 mono.

Une édition DVD est disponible, avec le même contenu.

Bonus - 3,5 / 5

Matador, un film charnière, par Marcos Uzal (30’, Les Productions du désordre, 2022). Matador, « un des films les plus secrets de Pedro Almodóvar » marque une « rupture de ton » dans sa filmographie, un passage de quatre « comédies trash » pour aller vers un mélange assez noir des genres. Matador est né de l’idée d’Almodóvar de « faire un film sur la mort », avec des personnages masculins plus abstraits que dans ses autres films, avec une « inversion des genres » les rendant ambigus. « Un film sur l’Espagne (…) dix ans après la mort de Franco (…) et le poids du passé, de l’éducation catholique. » Le portrait d’une Espagne coupée en deux, avec « d’un côté les intolérants, de l’autre les envieux », sur lequel il reviendra avec La Mauvaise éducation. Un film sur l’amour fou entre des personnages « libres et imprévisibles », dans la « logique amorale » qui imprègne tout l’oeuvre du cinéaste. Matador montre aussi l’importance croissante qu’il accorde à la forme, à l’élégance de la mise en scène, aux mouvements de caméra, aux éclairages…

Un utile complément au film.

Bande-annonce (1’51”).

Matador

Image - 5,0 / 5

L’image (1.85:1, 1080p, AVC), après une restauration 2K, probablement à partir du négatif original, stable, très propre, bien définie, fermement contrastée, déploie des couleurs naturelles agréablement saturées. Le contrôle du grain, fin et régulier, est idéal.

Son - 3,5 / 5

Le son mono d’origine, resté compressé sous le format standard Dolby Digital 2.0 stéréo, manque de finesse et de dynamique. Mais, assez propre, il assure l’essentiel, une restitution claire des dialogues.

Le doublage en français est appauvri en basses avec quelques saturations et des dialogues peu naturels au timbre altéré par un excès de réverbération et placés trop en avant, au détriment de l’ambiance et de l’accompagnement musical. Il n’a pas été pris en compte pour l’attribution de la note.

Crédits images : © Compañía Iberoamericana de TV, TVE

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

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Philippe Gautreau
Le 5 janvier 2023
Cet étalage des fantasmes qui hantent Pedro Almodóvar est probablement, en dépit de touches burlesques, le drame le plus sombre et le plus pessimiste de toute sa filmographie. Encore un film de jeunesse, provocateur, mais annonciateur du style des grandes œuvres à venir.

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