Pluie noire

Pluie noire (1989) : le test complet du Blu-ray

Kuroi ame

Édition Collector Blu-ray + DVD + Livret

Réalisé par Shôhei Imamura
Avec Kazuo Kitamura, Etsuko Ichihara et Yoshiko Tanaka

Édité par The Jokers

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Le 25/05/2023
Critique

Réédition attendue d’un des rares films japonais sur le bombardement d’Hiroshima, une oeuvre importante de Shōhei Imamura.

Pluie noire

Le 6 août 1945, la jeune Yasuko approche en bateau d’Hiroshima où elle doit s’installer chez son oncle Shigematsu et sa tante qui l’aideront à trouver un mari. Un éclair aveuglant est suivi par un souffle dévastateur. Sous l’énorme nuage en forme de champignon qui a obscurci le ciel, Yasuko reçoit une pluie noire. Dévastée par l’explosion de la bombe atomique, Hiroshima est devenue inhabitable. Yasuko se réfugie dans un village avec sa tante et son oncle, brûlé au visage… Au fil des mois et les années, des survivants exposés à l’éclair succombent. Il apparaît que le mal frappe aussi ceux qui furent sous la pluie noire…

Pluie noire (Kuroi ame), multiprimé au Japon, sélectionné pour la Palme d’or, récompensé à Cannes en 1989 par le Prix du jury oecuménique et le Prix de la commission supérieure technique, est l’adaptation par le cinéaste Shōhei Imamura d’un roman publié en 1966 par Masuji Ibuse (1898-1993).

Pluie noire entre dans l’intimité de trois personnages principaux, Yasuko, sa tante et son oncle, à la recherche, dans une existence bouleversée par la guerre et l’exil, d’un équilibre fragilisé par la menace du « mal de l’éclair » qui emporte, l’un après l’autre, leurs voisins.

Pluie noire

Pluie noire nous arrache aussi au cocon familial pour nous rappeler, par quelques flashbacks, dans une succession de plans courts mais effrayants, les scènes d’horreur dont ont été témoins ceux qui ont survécu à Hiroshima le 6 août 1945. Il rappelle l’ostracisme qui frappa, pendant des lustres, les hibakushas, les irradiés d’Hiroshima et ceux de Nagasaki, le 9 août. Un des personnages secondaires, Yuichi, est là pour remémorer les traumatismes psychologiques dont souffrirent des soldats. Le film évoque aussi le miracle économique japonais, dopé par la guerre de Corée.

Shōhei Imamura a confié le rôle principal à une jeune actrice surtout connue à la télévision, Yoshiko Tanaka, qui sera quatre fois primée dans son pays pour son interprétation de Yasuko. Les deux autres personnages principaux sont interprétés par des acteurs célèbres au Japon, l’oncle Shigamatsu par Kazuo Kitamura, que le réalisateur employa huit fois, notamment dans Désir meurtrier (Akai satsui, 1964) et Le Profond désir des dieux (Kamigami no fukaki yokubô, 1968), et Shigeko, la tante, par Etsuko Ichihara qui avait contribué au succès d’un des chefs-d’oeuvre d’Imamura, L’Anguille (Unagi), vainqueur de la Palme d’or en 1997.

La partition originale, toujours en parfaite harmonie avec les scènes des ravages de la bombe, a été écrite par Tōru Takemitsu, un admirateur d’Olivier Messiaen, compositeur de la musique de plus d’une centaine de films, parmi lesquels Dodes’kaden et Ran d’Akira Kurosawa, L’Empire de la passion de Nagisa Ôshima, Harakiri de Masaki Kobayashi, Nuages épars de Mikio Naruse, Silence de Masahiro Shinoda…

Pluie noire

Présentation - 3,5 / 5

Pluie noire (122 minutes) et ses suppléments (32 minutes) tiennent, dans cette Édition Collector sortie en décembre 2021, sur un Blu-ray BD-50 et un DVD-9 logés dans un digipack à trois volets, glissé dans un étui avec un livret.

Le menu, propose le film dans sa version originale, le japonais, au format audio DTS-HD Master Audio 2.0 mono, avec sous-titres optionnels.

Un livret de 50 pages par Stéphane du Mesnildot, abondamment illustré de photos de tournage et du film, rappelle les longs métrages japonais précédemment tournés sur le bombardement d’Hiroshima, Les Enfants d’Hiroshima, par Kaneto Shindo en 1952, Hiroshima, par Hideo Sekigawa en 1953. Le Japon des années 60 et 70, « porté par le miracle économique », délaissera le thème du nucléaire qui sera repris après l’explosion de la centrale de Fukushima, d’abord par Sono Sion avec Himizu (2011) et The Land of Hope (Kibô no kuni, 2012). « Loin du style neutre du roman de Masuji Ibuse, Imamura exprime dans Pluie noire son talent visionnaire, déjà visible dans La Ballade de Narayama. » Ce jugement donne la couleur de l’analyse du film par Stéphane du Mesnildot. Il analyse le roman dont il cite quelques passages, avant de souligner l’approche choisie par « Imamura, l’entomologiste » qui « ne donne aucune cause psychologique à l’action de ses personnages », comme dans Désir meurtrier ou Le Profond désir des dieux. Suit un entretien de Shōhei Imamura avec Hubert Niogret, paru en octobre 1989 dans le numéro 344 de Positif, dans lequel le réalisateur dit pourquoi il a attendu plus de 30 ans pour adapter le roman avec quelques ajouts. Il évoque la reconstitution d’un village en août 1945 avec ses habitants confrontés à la maladie, le tiède accueil du film au Japon. Le livret se referme sur l’appréciation de Pluie noire par Tadao Sato, historien du cinéma et président de l’Institut de Cinéma et de Télévision, l’école de cinéma fondée à Kawasaki par Shōhei Imamura. Il relève l’intention d’Imamura : « Malgré l’horreur du récit, l’histoire demeure empreinte d’une atmosphère de comédie humaine. »

The Jokers, qui a absorbé ses labels La Rabbia et Lonesome Bear, a ressorti ce film important dans sa collection Classics le 29 mars 2023. Il est proposé dans deux digipacks, sur Blu-ray ou DVD, avec tous les bonus de l’édition de décembre 2021, mais sans le livret.

Pluie noire

Bonus - 3,0 / 5

Interview de l’actrice principale Yoshiko Tanaka (6’). Elle se souvient être restée consignée pendant cents jours à Hattoji Furusato, un village montagnard de treize maisons de la préfecture de d’Okayama jusqu’à la fin du tournage, pendant lequel elle était devenue Yasuko. La décision d’annuler les séquences en couleurs l’a obligée à retourner à Hattoji pour les prises modifiant la fin du film.

Interview du réalisateur Takashi Miike (7’). Il était, pendant le tournage, le second assistant- de Shōhei Imamura, « ou plutôt son esclave », précise-t-il, là ou trois assistants devaient faire le travail de cinq, dans la précipitation, sans un moment libre ! Toujours attentif aux moindres détails, Imamura était exigeant et agressif. Mais ce fut un bon apprentissage, un bel exemple de lutte constante pour la qualité du cinéma.

Scène coupée du pèlerinage de Yasuko à Shikoku (18’). Ces séquences en couleurs, une suite de l’histoire montrant le personnage principal, Yasuko, âgée de 40 ans, devaient introduire et conclure l’histoire racontée dans un long flashback en noir et blanc. L’impact du film n’aurait pas vraiment été renforcé par l’ajout d’un saut en avant d’une vingtaine d’années avec lequel le réalisateur entendait rapprocher l’histoire de Yasuko du présent.

Bande-annonce de la version restaurée (1’31”).

Pluie noire

Image - 4,5 / 5

L’image (1080p, AVC) au ratio original 1.85:1, très soigneusement débarrassée des marques de dégradation de la pellicule, stabilisée, offre un dégradé de gris équilibré entre blancs lumineux et noirs denses, avec une résolution satisfaisante. La texture du 35 mm a été préservée avec un grain fin et homogène.

Pluie noire

Son - 4,5 / 5

Le son DTS-HD Master Audio 2.0 mono, lui aussi très propre, pratiquement sans souffle, nécessairement concentré dans le medium, assure un bon équilibre entre les dialogues et une ambiance assez présente. Quelques saturations ne gâchent pas le plaisir procuré par l’accompagnement symphonique de Tōru Takemitsu.

Crédits images : © Hayashibara Group, Imamura Productions, Tohokashinsha Film Company

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 26 mai 2023
Le rappel poignant des terribles conséquences, immédiates et à long terme, du lâcher d’une bombe atomique sur Hiroshima, le 6 août 1945. Réalisé avec un recul de plus de trente ans, Pluie noire est un des films importants de Shōhei Imamura.

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