Air Force : Bat 21 (1988) : le test complet du Blu-ray

Film de guerre adapté d’un fait réel survenu durant la guerre du Viêt-Nam.

Viêt-Nam, 1972 : l’avion du lieutenant-colonel américain Hambleton (1918-2004) est abattu. L’US Air Force veut récupérer à tout prix ce spécialiste des missiles avant que l’armée communiste Nord-Viêtnamienne ne le fasse prisonnier. Lui qui n’a jamais eu d’expérience du combat au sol va pourtant réussir à survivre plusieurs jours et nuits en territoire ennemi, sous le nom de code radio BAT*21, avant d’être enfin sauvé.

Air Force : Bat 21 (Bat*21, USA 1988) de Peter Markle apparaît rétrospectivement comme l’ancêtre de la série cinéma des En territoire ennemi (*). La première ligne du slogan de l’affiche américaine employait d’ailleurs cette expression tactique. Le thème, du fait de l’usage grandissant de l’aviation de guerre au cours du vingtième siècle, a progressivement investi l’histoire du cinéma, notamment à partir de la guerre américaine de Corée (1950-1953) : qu’on se souvienne de certaines séquences du Flammes sur l’Asie (The Hunters, USA 1958) de Dick Powell ! La guerre américaine du Viêt-Nam (1965-1975) l’amplifia encore davantage et sa filmographie comporte d’autres titres importants, tel que le Rescue Dawn (USA-All. 2006) de Werner Herzog, inspiré d’un autre fait réel.

Air Force : Bat 21 est un assez gros budget filmé en extérieurs naturels dans l’État malaisien de Sabah, au Nord de l’île de Bornéo, et sur la côte Est de la Malaisie avec le concours de son armée, y compris aérienne (hélicoptères et divers avions américains dont des F5 qui avaient servi au Viêt-Nam). La mise en scène est assez bonne, le montage capable d’enchaînements soignés et le film est techniquement bien photographié par Mark Irwin (le travail sur des couleurs parfois d’une insolite beauté presque fantastique), sans oublier une bonne direction de seconde équipe aérienne. Armement léger historiquement correct, depuis les armes de poing jusqu’aux mitrailleuses. Ne soyez pas surpris par le pistolet semi-automatique Browning Hi-Power calibre 9mm Parabellum porté par Hambleton : c’était l’arme favorite des unités aériennes américaines de reconnaissance SOG (Study and Observation Group) pendant la guerre du Viêt-Nam. En cas de chute en territoire ennemi, il était réputé pour sa robustesse, sa fiabilité, son efficacité au combat et la grande capacité de son chargeur.

Air Force : Bat 21 est adapté d’un livre de William C. Anderson publié en 1980 (**) et Hambleton est lui-même crédité à son générique d’ouverture comme consultant. Basé sur des faits réels, le scénario les a cependant mélangés à des éléments de fiction : il ne relate pas dans toute son ampleur la réalité. Ce sauvetage fut, en effet, une opération plus lourde (à la fois navale, aérienne, terrestre) que ce qui est ici montré. On chuchote même que ce fut l’opération la plus coûteuse (en argent comme en pertes d’effectifs tués au combat) de sauvetage d’un seul homme durant toute la guerre du Viêt-Nam. Le scénario en accorde le mérite principal à l’US Airforce (au point que le titre français d’exploitation la mentionne) alors qu’en réalité, l’US Navy y aurait été impliquée à un degré au moins équivalent. Les acteurs Gene Hackman et Danny Glover ont interprété dans leur filmographie des personnages placés dans des situations parfois presque inverses de celles montrées dans Air Force : Bat 21 : ainsi Hackman organisait une mission afin de secourir son fils prisonnier derrière les lignes ennemies dans Retour vers l’enfer (Uncommon Valor, USA 1983) de Ted Kotcheff ; Glover sera abattu au-dessus du Viêt-nam et secouru dans Flight of the Intruder (USA 1991) de John Milius et Hackman dirigera l’opération de secours d’un autre aviateur abattu durant une reconnaissance (pas au-dessus du Viêt-Nam mais au-dessus de la Yougoslavie) dans En territoire ennemi (Behind Enemy Lines, USA 2001) de John Moore.

Air Force : Bat 21 est un peu bavard durant son premier tiers mais ensuite son rythme monte en puissance et son suspense aussi. L’argent de la production est sur l’image : on voit par exemple de très spectaculaires bombardements au napalm. Les séquences les meilleures demeurent celles avec Hackman survivant seul dans la jungle : séquences nocturnes et diurnes, riches en rebondissements parfois remarquables (le combat imprévu au corps à corps, la rencontre de l’enfant sur le pont, etc.). Notez, enfin, sur le strict plan de l’histoire de l’exploitation (partie intégrante de l’histoire du cinéma) que le titre original comporte, au générique d’ouverture, une * entre Bat et 21, petite étoile qui n’apparaît nullement sur les affiches américaines : encore une légère mais curieuse divergence entre titre pellicule argentique et matériel publicitaire correspondant.

NOTES :
(*) En territoire ennemi (Behind Enemy Lines, USA 2001) de John Moore, En territoire ennemi II (Behind Ennemy Lines II : Axis of Evil, USA 2006) de James Dodson, En territoire ennemi 3 : Mission Colombie (Behind Enemy Lines : Columbia, USA 2009) de Tim Matheson. L’histoire de chacun des trois titres est indépendante des deux autres : ils ne sont reliés que par cet aspect thématique. Leur géographie est d’ailleurs variée : Yougoslavie en 2001, Corée du Nord en 2006, Colombie en 2009. Il y a eu d’autres films (des séries B et C) intitulés Behind Enemy Lines, produits dans les années 1980 et 1990. Ils étaient sans rapport avec cette trilogie thématique mais déjà situés par leur scénario au Viêt-Nam : je renvoie à leur sujet le lecteur intéressé à mon livre Flammes sur l’Indochine - Les Classiques du cinéma de la guerre du Viêt-Nam (335 pages, éditions Ovadia, Nice 2019).
(**) Dix ans après la production de ce film, le livre de Darrel D. Whitcomb, The Rescue of Bat 21 (1998) bénéficia d’informations plus complètes, parmi lesquelles certaines rendues publiques alors qu’elles étaient encore couvertes par le secret militaire en 1980 au moment de la parution du livre de Anderson et Hambleton.

1 Blu-ray BD50 région B édité par BQHL le 29 juin 2023. Image couleurs au format 1.85 compatible 16/9. Son DTS-HD Master Audio VF d’époque + VOSTF 2.0 mono. Durée film : 105 min. environ. Supplément : présentation du film par Jean-François Dickeli (20 min. environ).

Présentation du film par Jean-François Dickeli (20 min. environ) : Assez bonne concernant certains aspects du film (la situation historique brève mais claire du film dans la filmographie de la guerre du Viêt-Nam, la caractérisation du personnage joué par Hackman, les remarques sur la photo de Irwin) mais elle en ignore certains autres (le fait que le film ne correspond pas vraiment à la réalité historique, réalité d’ailleurs pas encore totalement accessible au moment de sa réalisation). En illustrations, extraits (parfois munis de leur bande-son, parfois recouverts par la voix du présentateur) du film, ainsi que quelques affiches bien reproduites mais un peu trop petites.

Honorable édition spéciale mais sans plus (ni galerie photos et affiches, ni même la si commune et habituelle bande-annonce originale). Le cinéphile anglophone souhaitant des bonus plus solides pourra se tourner vers l’édition américaine Kino Lorber 2018 qui contient un commentaire audio du réalisateur Peter Markle.

Format large respecté 1.85 compatible 16/9, reporté en Full HD 1080p AVC, en couleurs. Copie argentique impeccablement restaurée, master dotée d’une excellente définition vidéo et d’une très bonne gestion des couleurs. L’édition française de référence en Full HD à partir de maintenant.

Son Linear PCM VF d’époque + VOSTF 2.0 stéréo  : offre nécessaire et suffisante pour le cinéphile francophone. Pistes son bien nettoyées dans les deux cas, dynamiques toutes les deux car c’était du Dolby stéréo d’origine. VF d’époque correcte sans plus. Musique fonctionnelle, ample et solide, dont l’instrumentation emprunte parfois au Japon : ces effets sonores étaient à la mode dans les années 1985-1990.

Crédits images : © BQHL