Morgiana (1972) : le test complet du Blu-ray

Combo Blu-ray + DVD

Réalisé par Juraj Herz
Avec Iva Janzurová, Josef Abrhám et Nina Divísková

Édité par Artus Films

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Le 28/11/2023
Critique

Première édition d’un film injustement méconnu de Juraj Herz, soulignant le rôle complémentaire des éditeurs de vidéo.

Morgiana

Viktoria, tenancière d’une maison close, se sent injustement lésée quand elle apprend que son père a légué l’essentiel des biens à sa soeur Klára. L’intérêt pour Klára d’un homme qu’elle aime exacerbe la jalousie de Viktoria, au point qu’elle commence à verser dans les boissons de sa soeur un lent poison indétectable…

Morgiana, sorti en Tchécoslovaquie en 1972, jamais distribué en France, est le cinquième de la trentaine de longs métrages pour le grand écran de Juraj Herz (1934-2018). Dans le courant de la Nouvelle vague du cinéma tchèque, il s’était fait connaître assez tôt au-delà des frontières de son pays par L’Incinérateur de cadavres (Spalovac mrtvol, 1969), salué à Sitges par trois médailles d’argent, dont celle du Meilleur film et de la Meilleure photo et par Les Lampes à pétrole (Petrolejové lampy), sélectionné à Cannes en 1972.

Morgiana est l’adaptation du roman Jessie and Morgiana, publié en 1929 par l’écrivain russe Aleksandr Grin (1880-1932). Juraj Herz, après avoir changé le nom des deux soeurs et attribué celui de Morgiana à la chatte siamoise de Viktoria, avait l’intention de faire des deux femmes, l’une incarnant le bien, l’autre le mal, une seule, en révélant dans un twist final que Klára souffrait de schizophrénie. Une idée rejetée par la dictature communiste qui avait réimposé le « réalisme socialiste » après avoir brutalement refermé la parenthèse de liberté ouverte par l’éphémère Printemps de Prague. De cette idée, brillamment exploitée par Robert Mulligan dans L’Autre (The Other), découle l’attribution du rôle des deux soeurs à la même actrice, Iva Janzurová, une célébrité tchèque toujours active, avec plus de 200 rôles tenus sur le grand et le petit écran depuis 1961.

Morgiana

Morgiana frappe par son inventivité visuelle annoncée dès le générique, et confirmée tout au long du film, notamment dans la représentation des hallucinations de Klára causées par le poison, dans la vision subjective par le chat, déformée par l’utilisation d’une très courte focale. Elle s’exprime aussi par les décors, costumes, coiffures et maquillages rappelant l’art nouveau et, plus particulièrement les portraits de Gustav Klimt. Une beauté visuelle à laquelle a contribué le chef-opérateur Jaroslav Kucera (Les Petites marguerites / Sedmikrasky, Vera Chytilová, 1969).

Luboš Fišer (1935-1999), connu pour sa musique de chambre et son accompagnement musical de plus de 160 films, parmi lesquels Le Château des Carpathes (Tajemství hradu v Karpatech, Oldrich Lipský, 1981), a composé une partition qui souligne l’étrangeté de l’atmosphère de Morgiana.

Nous disions, dans notre critique de L’Incinérateur de cadavres, sorti au printemps 2022, espérer l’édition prochaine d’autres films de Juraj Herz, notamment de trois oeuvres majeures, Morgiana (1972), Le Neuvième coeur (Deváté srdce, 1979), deux voeux réalisés par Artus Films ! Continuons à exprimer nos souhaits d’une sortie prochaine de Les Lampes à pétrole et de Habermann (2010), sur l’invasion des territoires sudètes en 1938, son avant-dernière réalisation. En attendant la réalisation de ce voeu, on peut voir et revoir La Belle et la Bête (Panna a netvor, 1978), une belle relecture du conte de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont.

Morgiana

Présentation - 2,0 / 5

Morgiana (101 minutes) et ses suppléments (56 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-50 logé, pour cette édition combo, en compagnie d’un DVD-9 avec le même contenu, dans un Digipack à deux volets, glissé dans un étui.

Le film est proposé dans sa langue originale, le tchèque, avec sous-titres optionnels, au format audio Linear PCM 2.0 mono.

Bonus - 2,5 / 5

Le Chat aux yeux bleus (Artus Fims, 2023, 25’), une présentation du film par Christian Lucas. Juraj Herz, un des cinéastes de la Nouvelle Vague tchèque, fut remarqué en 1965 par son court métrage Brutalité récupérée (Sberné surovosti)* et par L’Incinérateur de cadavres (1969). Son penchant pour le fantastique est révélé par Le Diable boiteux (Kulhavý dábel, 1968), La Belle et la bête, Le Vampire de Ferat (Upír z Feratu, 1982), Passage (Pasáz, 1997) et Darkness (T.M.A., 2009) et des contes pour enfants. Pour Morgiana, il reprend l’équipe de Les Lampes à pétrole. Christian Lucas évoque ensuite Aleksandr Grin, l’actrice Iva Janzurová, les costumes d’Irena Greifová, la qualité du travail du chef-opérateur Jaroslav Kucera, le cauchemar du tournage en Bulgarie des scènes au bord de la mer, la symbolique du chat et de la couleur rouge…

Diaporama (1’11”) : cinq affiches et six photos du film.

Morgiana

Noapte, court métrage de l’IUT de Béziers (2021, 1.85:1, 1080p, AVC, LPCM 2.0 stéréo, 29’). Une jeune femme, accompagnée par un homme, rend visite à sa mère et à sa soeur dans un lointain manoir. Le chauffeur de taxi donne à l’homme un crucifix en lui souhaitant bonne chance… Noapte (« la nuit » en roumain) a été réalisé par les étudiants en deuxième année du département des métiers du multimédia et de l’Internet, supervisés par Sandy Blanco. Sélectionné par plusieurs festivals, ce court métrage où l’on peut relever des références au Dracula de Francis Ford Coppola et à Erzebet Bathory des Contes immoraux de Walerian Borowczyk **, méritait une édition vidéo, en dépit de son lointain rapport avec Morgiana.

(*) En bonus de l’édition Malavida Films de L’Incinérateur de cadavres.

(**) réédité dans le beau Coffret Boro édité par Carlotta Films en 2017

Morgiana

Image - 3,0 / 5

Les couleurs ont été ravivées, offrant aux rouges tout l’éclat qu’avait souhaité leur donner Juraj Herz. Une définition assez pointue a été obtenue, mais au prix d’un effacement du grain qui dénature la texture du 35 mm et donne un aspect cireux aux visages, particulièrement gênant dans les gros plans.

Son - 5,0 / 5

Le son monophonique d’origine, réencodé au format Linear PCM 2.0, très propre, restitue les dialogues avec un timbre naturel. La dynamique et l’ouverture de la bande passante donne à la musique une belle ampleur, perceptible dès le générique, accompagné aux grandes orgues.

Crédits images : © Filmové studio Barrandov

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
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Philippe Gautreau
Le 29 novembre 2023
Artus Films, avec ce film de Juraj Herz qui n’avait pas été distribué ni édité en vidéo en France, nous propose la surprenante découverte d’un conte vénéneux, mis en image avec inventivité et accompagné par une partition qui en souligne l’étrangeté. Un ajout estimable à la richesse du cinéma tchèque dans nos catalogues vidéo !

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