Réalisé par Yamina Benguigui
Avec
Fejria Deliba, Zinedine Soualem et Marie-France Pisier
Édité par Sony Pictures
De nombreux Algériens, seuls des hommes, sont venus en France
combler un manque de main d’oeuvre, après la seconde guerre
mondiale ; en 1974, l’immigration est stoppée, sauf celle
justifiée par le regroupement familial.
C’est dans ce contexte que Zouira, accompagnée de ses trois
enfants et de sa belle-mère, quitte l’Algérie et sa mère, pour
rejoindre un mari avec lequel elle a très peu vécu, parce
qu’il travaille depuis dix ans à Saint Quentin, en Picardie.
Elle vit maintenant dans un pays dont elle ne connaît rien,
cloîtrée dans la maison sous l’autorité d’une belle-mère
tyrannique et d’un mari maladroit et brutal. De plus, elle est
confrontée à l’hostilité des voisins.
A l’approche de la fête de l’Aïd, dans un effort désespéré
pour retrouver ses racines et en cachette de son mari, elle se
réfugie après d’une mère de famille algérienne, habitant la
même commune. Loin de trouver là un peu du réconfort espéré,
elle est chassée par cette femme qui, pourtant, éprouve les
mêmes difficultés qu’elle. Mais voilà : aucune révolte ne peut
être tolérée, seule la soumission silencieuse est de mise…
Coup d’essai, coup de maître ! Après « Mémoires d’immigrés,
l’héritage maghrébin », un intéressant documentaire de 160
minutes réalisé en 1998, Yamina Benguigui, née à Lille en
1957, signe là son premier long métrage, centré sur le
personnage de Zouina, remarquablement interprété par Fejria
Deliba. Elle nous montre avec pudeur quel déchirement ont
ressenti ces femmes qui ont dû quitter leurs proches, leur
pays et leur culture, pour se retrouver dans un pays lointain,
dont elles ignoraient la langue et les coutumes, obligées
désormais de partager l’intimité d’un mari qu’elles
connaissaient à peine.
Les valises sont partout dans la maison : c’est le signe que
l’immigration ne peut être que transitoire, avant un prochain
retour au pays. Pourtant, le temps passe inexorablement,
érodant peu à peu l’illusion du retour…
Ce beau film, évocation émouvante du drame de l’immigration
vécu par les femmes maghrébines, a obtenu au festival du film
féminin d’Arcachon de 2001, le prix du meilleur film et le
prix du public et le prix de la meilleure interprétation
féminine revenant à Fejria Deliba ; et, aussi, la même année,
le grand prix à Marrakech et le prix de la critique
internationale à Toronto. Il faut saluer également
l’excellente prestation de Rabia Mokeddem, la belle-mère, et
de Zinedine Soualem, le mari.
Bonne qualité de l’image et du son. Suppléments généreux, dont
certains sont particulièrement intéressants (les deux courts
métrages et les entretiens « A nos mères »).
Les menus sont sobres avec un graphisme blanc arabisant sur
dégradé de bleu. Images animés pour le menu principal et fixes
pour les autres. Navigation facile avec la première lettre de
l’élément sélectionné qui apparaît en noir.
Découpage en 12 chapitres repérés par un titre et une image
fixe. Les sous-titres partiels pour les dialogues en langue
arabe peuvent être supprimés ou réactivés à la volée, comme
nous l’indique un insert, au lancement du film.
La sérigraphie du disque reprend le portrait de Fejria Deliba
qui orne le boîtier keep-case. Toutes les information utiles
figurent au dos du boîtier.
Les commentaires de la réalisatrice et du directeur de
casting resituent les scènes dans leur contexte historique
et sociologique et livrent quelques anecdotes de tournage.
Intéressant.
Le making of (16’55”, 4/3) est précédé d’une
introduction de la réalisatrice (1’50”) ; tourné par
les élèves de l’ancien lycée de Yamina Benguigui, c’est un
regard empreint de sympathie sur un tournage décontracté ; il
est complété par une série de photos de plateau.
Fin alternative : « Le mouton » (27 », 4/3), où l’on voit,
après une introduction de la réalisatrice (2’14”), le mouton
de l’Aïd, juste entraperçu à la fin du film, dévaster le
jardin obsessionnellement entretenu par les voisins irascibles
et ruiner ainsi leurs espoirs de remporter le premier prix des
jardins fleuris !
Très bonne idée que de nous offrir aussi les deux courts
métrages de Yamina Benguigui, commandés par Canal+. Tout
d’abord, La télévision, une compagne bruyante pour une
solitude muette (13’11”, 4/3), tourné en 1999, nous montre
après une courte introduction (1’56”), la place éminente du
petit écran dans la vie des émigrés, qui les rapproche du pays
et leur « fait voir le monde ».
Puis Pimprenelle (1’25”, 1.66, après intro de 1’25”) : la fée
qu’on attend pour distraire les enfants à un goûter
d’anniversaire, loin d’avoir la tête blonde imaginée par
toutes les mères, jette un froid en arborant fièrement sa
foisonnante chevelure noire de beurette ; ce court métrage
était l’un des douze sketches du recueil sur le racisme
intitulé Pas d’histoires (2001).
A nos mères (22’25”, 4/3) : l’entretien avec la
réalisatrice et les deux principaux acteurs, Fejria Deliba et
Zinedine Soualem nous fait comprendre combien a pu être
douloureux le déracinement de leur mère qui, sans préparation,
a dû tout abandonner et combien la vie en couple a dû être
difficile, après une si longue séparation, alors que l’espoir
d’un retour au pays allait s’amenuisant au fur et à mesure que
le temps passait…
Une bande-annonce (1’56”, VOST).
Galerie de photos (5’16”, 4/3), une bonne centaine,
prises en Algérie, là où commence le film, et à Saint Quentin.
Une image assez propre, avec un étalonnage soigneux des couleurs, qui restitue avec finesse les éclairages changeants du ciel de Picardie.
Le son Dolby Digital Surround, un peu mat, est cohérent et assez fin ; il offre une certaine profondeur qui met en valeur la musique originale agréable de Théodore Shapiro et une bonne qualité d’enregistrement des bruits d’ambiance.