Réalisé par Sofia Djama
Avec
Sami Bouajila, Nadia Kaci et Amine Lansari
Édité par BAC Films
Alger, 2008. Samir, gynécologue et Amal, son épouse, enseignante à l’université, veulent fêter le vingtième anniversaire de leur mariage. Ils cherchent un restaurant. L’un n’accepte pas les femmes au bar, le second ignore les clients, le troisième ne sert pas de vin à la terrasse, à la suite de plaintes de voisins. Le ton monte sur l’avenir de leur fils Fahim. Amal voudrait qu’il parte étudier en Europe pour pouvoir s’assurer un avenir plus prometteur que celui que pourra lui offrir l’Algérie. Fahim, lui, sans projet d’avenir, s’accommode de la vie à Alger, des soirées passées avec ses amis Reda et Feriel et d’autres, à écouter de la musique, à consommer de l’alcool, à fumer des joints…
Les Bienheureux est le premier long métrage de Sofia Djama. Les illusions de Samir et Amal sur l’Algérie, sont-elles aussi les siennes ? Les espoirs, nés en octobre 1988 avec la promulgation d’une nouvelle constitution et l’avènement du multipartisme, furent dissipés par la guerre civile qui a mis le pays à feu et à sang pendant plus de dix ans, après la victoire électorale du Front islamique du salut en 1991. Le calme revenu, leurs aspirations à un avenir meilleur ont été déçues par un enlisement dans des difficultés économiques et par l’emprise de la religion. Amal regrette de n’avoir pas quitté l’Algérie. Samir continue d’entretenir son rêve d’ouvrir un jour une clinique…
Les Bienheureux seraient peut-être la génération suivante, qui n’a connu que les conditions de vie actuelles. Fahim, aujourd’hui étudiant, s’abandonne à une douce insouciance, dans des appartements ou dans des squats, bien à l’abri du rigorisme officiel, qui fait toutefois brutalement irruption deux fois dans les vingt-quatre heures que dure l’action. Une première fois quand un religieux s’interpose violemment dans une discussion avec ses parents, en pleine rue. Une seconde fois, quand trois hommes fouillent le sac que lui avait confié Reda, y trouvent des joints et appellent la police pour le faire arrêter.
Les Bienheureux souligne aussi l’hypocrisie du mode de vie des insoumis des deux générations. Entre quatre murs, tout est permis. Dehors, c’est une autre histoire. Certains ont même choisi de rester cloîtrés chez eux, comme le père de Feriel : fenêtres fermées, rideaux tirés, il ne sort que pour se rendre au cimetière sur la tombe de sa femme et d’une de ses filles, assassinées en 1995. La cicatrice que Feriel cache par une écharpe qu’elle garde toujours autour du cou est probablement la marque encore visible des atrocités subies par la famille, treize ans plus tôt. La jeune fille est le personnage fort du film, le plus énigmatique aussi : le policier quinquagénaire qu’elle fréquente est-il un ami, un protecteur ou un amant ?
Si la réalisation est plutôt conventionnelle, les dialogues et la direction des acteurs font l’essentiel : dire la soif de liberté et aussi la résignation, voire la désespérance des personnages. On remarque dans la distribution Sami Bouajila, Nadia Kaci et, dans le rôle de Feriel, Lyna Khoudri, récompensée par le Prix Orizzonti de la Meilleure actrice à la Mostra de Venise.
Les Bienheureux et les trois histoires contées par En attendant les hirondelles de Karim Moussaoui, sorti sur DVD en mars, viennent confirmer l’émergence d’un nouveau cinéma algérien.
Les Bienheureux (98 minutes) tient sur un DVD-9 logé dans un boîtier non fourni pour le test.
Le menu animé et musical propose le film dans sa version originale, en français et en arabe (avec sous-titres des dialogues arabes incrustés dans l’image), au format Dolby Digital 5.1.
Aucun bonus vidéo.
L’image (1.85:1), lumineuse et nette, avec des couleurs assez saturées, d’une texture agréable, bien contrastée, avec des noirs denses, assure une parfaite lisibilité de toutes les scènes, de jour comme de nuit.
Le son Dolby Digital 5.1, propre, avec une bonne dynamique, reste plutôt centré sur les voies frontales, en procurant toutefois une discrète sensation d’immersion dans l’ambiance des scènes tournées dans la rue.
Crédits images : © Pierre Aïm - Liaison Cinématographique