Réalisé par Robert Zemeckis
Avec
Tom Hanks, Robin Wright et Gary Sinise
Édité par Paramount Pictures France
Forrest court toujours. Il cherche le destin d’une Amérique en
manque de repères. Mais la réponse ne se trouve pas derrière
la ligne de l’arrivée, mais dans la quête de soi-même, à la
recherche d’une place et d’un équilibre dans la vie, aussi
fragile qu’une plume d’oiseau..
Robert Zemeckis dessine la quintessence de l’aventure
intérieure - à moitié entre un Frank Capra et Bill Clinton.
Mais il voit grand. Très grand. « Forrest Gump » devient un
fresque de taille colossale, où un simplet se trouve être
l’inspirateur ou le catalyseur de plusieurs événements de
l’histoire américaine contemporaine.
On aimerait voir dans « Forrest Gump » une sorte de continuation
virtuelle du « new deal » et de l’imagerie d’un Norman
Rockwell… Mais ce qu’on retient du gumpisme, est sa
dextérité à jouer avec l’Histoire - et parfois à la réécrire -
à l’aide de ses étonnantes incrustations numériques. « Forrest
Gump » ouvre la boîte de Pandore comme nul autre film l’avait
fait l’avant : ici, la falsification numérique est uniquement
au service du cinéma ; mais on ne peut que frissonner, en
sachant que cette technologie est désormais utilisée pour
maquiller le réel…
Certes, on pourrait reprocher à « Gump » d’être aussi simplet
que son héros. Mais Robert Zemeckis veut émerveiller son
public et lui offrir deux heures et demie de pure
spiritualité. D’autant plus qu’il dispose de son propre
Spencer Tracy : un Tom Hanks absolument foudroyant, qui livre
une performance qui restera dans les annales. Grâce - ou à
cause de sa naïveté, « Forrest Gump » est un conte de fées
intemporel ; un grain de finesse dans un monde de brutes.
Paramount n’a pas l’habitude de surcharger ses disques, mais
lorsqu’elle les collectorise, cela vaut le détour. Le travail
sur « Forrest Gump » a été exécuté tout en finesse, avec un
mélange de candeur (l’innocence de Forrest ?) et technologie.
Les menus animés sont délicieusement « Gumpiens » - la plume
d’oiseau par ici, la balle de ping-pong par là - et donnent
envie de les repasser en boucle. Les deux disques (DVD-9 pour
le film, DVD-5 pour les bonus) reprennent et localisent
l’intégralité de l’édition Z1, mais avec un ajout de taille,
la VF en 5.1. Les transitions sont un exemple de fluidité, et
les changements de langue se font à la volée.
Histoire de trouver quelque chose à arguer, on pourrait dire
que les 11 featurettes sur les FX auraient dû proposer une
option de vision ininterrompue, et que « Forrest Gump » aurait
gagné à s’habiller d’un boîtier Digipack.. Mais ne gâchons pas
notre plaisir, Paramount réalise un quasi-sans faute, pour un
prix encore humain.
Authentique tour de force de Paramount, qui assemble une
flopée de bonus intéressants, et localiser le tout en
française (exception faite pour la première des deux bandes-
annonces).
Le double supplément sur le disque 1 est constitué par deux
commentaires audio, en Pro-Logic. Dans le premier, on
retrouve Robert Zemeckis, l’un des producteurs et le chef
décorateur. Malgré la bonne volonté de tous, le commentaire
est plus didactique que divertissant. Ce n’est pas faute
d’essayer. C’est peut-être car « Forrest Gump » est tellement
« bigger than live » que tout corollaire semble inutile. Sur le
deuxième commentaire, la productrice qui a découvert le roman
de Winston Groom s’exprime moins souvent, mais elle essaie de
se ranger du point de vue du spectateur.
Le disque de bonus cache une surprise de taille : deux
scènes inédites du film. Inutile de les chercher dans les
sous-menus, elles ne figurent pas au générique - et d’ailleurs
elles ne sont pas présentées dans une forme pre-montée. Pour
les repérer, il faut se rendre dans deux chapitres de la
section FX visuels. Dans le premier, on verra la rencontre
entre Forrest et Martin Luther King. George Bush (senior)
montre un court match de ping-pong entre Forrest et l’ex-
Président. En revanche, le mystère de leur exclusion du film -
ou d’une présentation à la « deleted scenes » sur le DVD, reste
entier.
Le premier impact avec le deuxième disque reste cependant « A
travers les yeux de Forrest Gump », un documentaire HBO
d’une demi-heure réalisé en 1994, qui passe en revue - et bien
- les différents aspects du film, de l’implication des acteurs
aux effets numériques. Un modèle du genre.
« Making of » cache une série de featurettes et goodies
sur la réalisation du film. La section est introduite par
quelques essais de casting de quatre acteurs - dont Haley Joel
Osment (ben oui, il joue dans le film…).
La section sur les effets visuels du film - elle-même
repartie en 11 mini-reportages, pour une durée globale de 38
minutes, est assez foudroyante. Mis à part l’intégration des
deux scènes inédites, on découvre avec amusement que les FX du
film ne se limitent pas à incruster Tom Hanks, ou à effacer
les jambes de Gary Sinise. Plusieurs plans ont eu recours à
des trucages invisibles ; le reportage « Améliorer la réalité »
(au titre prophétique) est un modèle du genre pour découvrir
les petites falsifications du film.
On passe ensuite par un mini-documentaire de 8 minutes sur le
maquillage où - on se le doute bien - le challenge des
trucages physiques consistait dans la présentation des
personnages à plusieurs étapes de leur vie. Fascinant.
Le set sur les effets sonores (5 segments d’une durée
globale de 15’16”) se concentre sur d’autres petites
manipulations invisibles du film. Stupéfiant. On peut
également ranger dans la même catégorie la featurette de 7’
sur les décors, qui clôt la section Making of.
Avant de terminer le disque, il y a encore des petits
éléments : ici, deux films-annonces (dont une est titrée de
façon hilarante « bande-annonce du souvenir ») ; un peu plus par
là, une riche galerie de photos.
En rétrospective, on peut regretter l’absence des scènes
inédites en mode « standalone ». Et, paradoxalement, en même
temps on se sent soulevés. « Forrest Gump » est un film au
dosage magique, qui ne requiert rien de plus, et rien de
moins.
Une image qui sait capturer à la fois l’art du gumpisme et les subtiles (pour l’époque..) mystifications visuelles de Ken Ralston et ILM. Même si la compression oublie quelques détails aux arrière-plans, le piqué et les couleurs sont foudroyants. « Forrest Gump » fait un virage à 180° et se retrouve enfin dans le tout-numérique avec toute sa splendeur.
Excusez la métaphore, mais la bande son de « Gump » est comme
une plume transportée par le vent. On pour le dire autrement,
le travail utilise 100% de finesse et matière grise, et 0% de
force brute. Mais on oublie vite les fix en décibels des
bandes-son contemporaines, et on se laisse transporter par une
architecture sonore très fouillie et immersive, qui sait
également se faire entendre lorsqu’il est nécessaire.
Le principal atout de cette édition est la présence d’une
piste française en 5.1. Même si elle n’a pas tout à fait l’art
et la manière du détail de la VO, elle donne la mesure du tour
de force des doubleurs du film. Mais si vous voulez notre
avis, « Gump » s’écoute avant tout en VO, pour sa délicieuse
ambiance « southern ».