Réalisé par Eric Assous
Avec
Patrick Chesnais, Charlotte de Turckheim et Elisa Tovati
Édité par Ciné Génération Editions
La Guerre des Sexes est l’un des thèmes de prédilection du
cinéma. Maintes fois adaptés, pas toujours avec bonheur
d’ailleurs, il engendre un intérêt toujours aussi vivace chez
nos contemporains. Pourquoi ? Parce que les sentiments
humains (et particulièrement le sentiment amoureux) demeurent
l’un des grands mystères de l’univers ! Freud y a consacré
son analyse… Chateaubriand sa plume… Ronsard son
coeur… Verdi sa musique… et de ses Arts, le 7ème a extrait
sur le sujet un questionnement intemporel, moteur d’intrigues
passionnelles captivantes. « La Poison »,
Mr et Mme Smith, La Megère apprivoisée,
La Guerre des Rose, Quand Harry rencontre Sally
ont été nourris au sein de cette antagonisme entre hommes et
femmes, livrant aux cinéphiles des trésors de réflexion,
d’humour et d’inventivité. Certains auteurs y ont même
consacré leur oeuvre - Hitchcock, Allen, Capra, Lelouch… -
imprimant à jamais le cinéma de leur vision et de leur
conception des rapports entre les deux sexes.
Sans atteindre ces sommets (trop peu souvent fréquentés),
« Sexes très opposés » s’inscrit dans cette veine en
copiant-collant, peu subtilement mais efficacement, quelques
uns des plus beaux moments de cinéma. Un pari risqué qui
déleste le film de son originalité pour lui octroyer une
intensité certes balisée mais réelle. (cf les scènes avec
Patrick Chesnais rappelant les situations du somptueux film
d’André Cayatte « Les Risques du Métier » avec Jacques Brel).
Dans sa détermination à « pasticher » (le mot est lâché) tout
ce qui peut l’être sur le sujet (les rapports Hommes /
Femmes), Assous aligne emprunts, clins d’yeux et clichés avec
un évident bon esprit et une réjouissante bonne humeur. Son
arme : le stéréotype. Son objectif : le divertissement. Signe
particulier : jamais donneur de leçon. Résultat : Au jeu de
la caricature, le scénariste-dialoguiste-réalisateur s’en
sort plutôt bien. D’abord parce qu’il maîtrise narrativement
l’ensemble. Chaque fil tendu se prolonge avec humour sans
jamais se perdre ni hasardeusement s’emmêler. Ensuite, parce
que la caricature l’aide à créer autant de situations qu’il y
a de couples ce qui est une vraie bonne idée. Assous laisse
ainsi à ses interprètes nombreux et talentueux le soin de
camper des personnages épais. Enfin et par-dessus tout, parce
que les dialogues font mouche. De véritables flèches dont le
caractère sexiste alimente cette guerre jubilatoire (à
l’écran) « Chez les mecs, les vrais jeunes, on les trouve
chez les vieux ! » ou encore « La Culture et
l’intelligence ne sont pas forcément ce que les hommes
recherchent en premier chez une femme » trouvent une
résonance chez Audiard ou Guitry.
Si côté réalisation, c’est la platitude absolue ; Champ /
contre-champ, portés avec quelques panoramas à l’occasion.
Côté dialogues, Assous se lâche totalement, réussissant
habilement ses effets ! Les dialogues cabotins et percutants
fusent avec naturel et décontraction. Perpétuellement en
verve, son texte alerte, rattrape même un montage un peu lent
et sauve du sordide certaines situations (cf le couple Tovati
/ Duléry). Parler des rapports Hommes / Femmes avec bon goût
est toujours un exercice périlleux. Richard Berry et son
L’Art (délicat) de la séduction en ont fait les frais.
Assous évite le(s) piège(s) en faisant preuve ici d’une
finesse qui ne caractérisait pas
Les Gens en maillot de bain ne sont pas (forcément) superficiels, son tout premier film comme
réalisateur. Tant mieux !!! La légèreté aide à une rapide
mais appréciable introspection et empêche « Sexes très
opposés » de verser dans le film à sketchs. On oubliera ici
les dérives du passé pour ne focaliser que sur l’esprit dont
fait preuve ce deuxième premier essai. Essai transformé.
Assous capte notre attention avec juste assez de mordant et
ce qu’il faut de franchise pour ne plus ensuite la laisser
retomber. S’appuyant sur son couple phare (Patrick Chesnais /
Charlotte de Turkheim), il tricote une histoire touchante,
amusante, humaine.
Affirmer qu’on en sort transformé serait audacieux !
Néanmoins, avec très peu de moyens et beaucoup d’ingéniosité,
Assous ficelle une comédie alerte et plaisante. De celles
qu’on se laisse aller à regarder. De celles qui ne suscitent
ni de réfléchir, encore moins de se concentrer. De celles qui
caresse vos sens et s’amuse de votre raison. A peine éclose,
elle se fane pour finir par lentement se démoder. Logique,
cette comédie est le reflet d’un temps. Le temps des amours
futiles et des rapports fugaces tels qu’on les conçoit
ajourd’hui, au présent. L’escarmouche n’est là que pour
assurer le spectacle. Ritournelle insolente d’infatigables
tourtereaux mus par le désir, déçus par son assouvissement.
Rien de tragique ni rien d’important ! Les coeurs brisés se
rafistolent, les plaqués se consolent et l’Amour de cruel
devient frivole !!! Légèreté du texte, légèreté de
l’intrigue.
Film d’humour, film d’ambiance, « Sexes très opposés »
réussit l’hasardeux pari de concilier ces genres. Avec »
Sexes très opposés », bienvenue dans un monde où la
caricature fait sens et où l’on peut la savourer sans trop se
poser de questions…
Ni franchement réussi ni totalement raté, le packaging
outrancier de « Sexes très opposés » reprend entièrement les
codes de la campagne cinéma. Résultat : un fouillis
ostentatoire des plus déroutants. Où lire ? Que regarder ? La
surabondance d’accroches, d’annotations, d’indications n’aide
pas ! Ce qui risque d’avoir de fâcheuses conséquences sur la
rotation des linéaires.
Toutefois, après avoir inséré la galette dans le lecteur, les
choses se « limpidifient » rapidement. Des menus sonorisés et
animés guident vos choix. Tiens ! Mais où est donc passé le
menu des bandes-sons ? Pas de panique, il vous faudra cliquer
sur le film (et donc enclencher la séance) pour enfin accéder
au choix du standard sonore. Original non ??? Décidément,
CinéGénération ne s’est pas laissé aller à la simplicité !!!
Côté Image, c’est limite léger. Côté son, c’est un sans
faute. Certes, « Sexes très opposés » est loin, très loin
de la richesse artistique du « Seigneur des Anneaux » mais
tout de même. On sent que l’éditeur n’a pas tout tenté pour
donner de l’ampleur à cette édition DVD. C’est
particulièrement criant en ouvrant la section des
suppléments. Un making of de 7 minutes, un court-métrage, une
bande-annonce et pour le reste de l’écrit (à savoir les
filmographies). Nous voilà revenu au bon vieux temps des
premiers DVD. C’est regrettable et désolant !!!
Et encore, on aurait pu être plus méchants parce qu’avec 3
suppléments qui se battent en duel, il y a de quoi être
furax !!! Pas la moindre interview ni la moindre analyse. Pas
même une introduction de la part du cinéaste ! Rien ou
presque si ce n’est la bande-annonce, le court-métrage dont
est parti l’idée de « Sexes très opposés » sans oublier le
making of qui n’a de making of que le nom ! Autant être franc
et ne rien mettre, au moins on ne risque pas de décevoir à ce
point, tout spécialement lorsqu’il s’agit d’une oeuvre pour
laquelle (on le sait, on le sent) les acteurs se sont
battus !!! Comment est-ce qu’on arrive à convaincre les
producteurs ? les techniciens ? les acteurs ? Quelle
importance a eu le scénario ? Comment finance-t-on les
repérages, la pré-production, le tournage et même la
distribution d’une telle oeuvre ? Comment passe-t-on de
l’écriture à la réalisation ? A qui pense-t-on lorsqu’on
écrit ce genre de comédie ? Enfin bref… il suffisait d’un
peu de volonté, d’une bonne DV et de quelques questions bien
préparées et l’édition DVD aurait pris des allures de
collector. Un quasi premier film pour lequel son réalisateur,
ses techniciens et ses acteurs se sont mobilisés est une
aventure passionnante. Mais encore faut-il avoir envie de la
raconter ! Là rien… ni envie ni moyens. Juste d’atterrantes
coquilles vides en guise de suppléments qui donnent à cette
édition DVD d’irritants accents lucratifs.
Le making of (7’05)
Censé être la pièce de résistance de l’édition DVD, ce
documentaire mal filmé, mal monté, mal sonorisé… et
par-dessus tout très mal structuré nous propose pêle-mêle les
coulisses de certaines scènes (essentiellement les scènes
d’action), les interviews à chaud de quelques acteurs, un
très gros plan furtif d’une des pages du scénario ainsi qu’un
plan d’ensemble non moins furtif des habituelles
félicitations de fin de tournage. En 7 minutes, le tout est
plié… pile poil le standard pour bien frustrer le
dévédéphile. De la genèse, nous n’apprendrons rien. De
l’ambiance sur le tournage, rien non plus, du rythme et de la
pression financière, rien encore. Il y a bien deux ou trois
interviews d’acteurs, mais là aussi, ces interviews manquent
d’anecdotes, d’illustrations, de consistance… pour faire
court d’intérêt. Et pourtant !!! On aimerait tant en retirer
quelque chose mais il semble que même Eric Assous ait renoncé
à faire de ce making of un véritable instrument
d’introspection dans son film ! Encore une fois c’est
regrettable et désolant !
Bande-annonce (1’15)
Livrée avec une très belle qualité de son et d’image, la
bande-annonce de « Sexe très opposés » est une véritable
gifle qui vous donne envie de vous remuer pour aller voir le
film. Alerte, drôle et rythmée, elle n’en montre ni trop ni
trop peu… juste ce qu’il faut pour vous présenter cette
sympathique comédie sous son jour le meilleur… et déjà dans
la bande-annonce Patrick Chesnais crève l’écran !!!. Une des
excellentes surprises de cette édition DVD !
Court-métrage « A cause d’Olivia… » (8’02)
C’est indéniablement la meilleure surprise de cette édition
DVD. Présenté en Dolby Surround, « A cause d’Olivia… »
affiche une image d’une excellente qualité (parfois meilleure
que celle de « Sexes très opposés) lumières et couleurs
sont ici très bien contrastées - ce qui rend plus agréable la
vision de ce retour aux sources. Un retour aux sources de
l’oeuvre essentiel (au sens littéral du terme) à la
compréhension de « Sexes très opposés ». Pourquoi ? Parce
qu’en 8 minutes, le court-métrage donne le ton, les
influences et même l’esprit du film. Logique ! Pour connaître
les honneurs du long-métrage, le cinéaste doit parfois passer
par l’exercice du court… afin de montrer ce dont il est
capable et ce qu’il a envie de faire passer. Un résumé somme
toute du long-métrage qui marque la première réalisation
d’Eric Assous (1999) et pose les jalons d’un cinéma mêlant
fondamentalement humour grinçant, dialogues mordants et
légèreté du divertissement. On y retrouve quelques uns des
acteurs de « Sexes très opposés »… de ceux qui ont été parmi
les tous premiers à porter le projet. A l’image du film, le
court-métrage vaut largement le détour !
Autant ne pas se le cacher ; L’image n’est pas le point fort
de cette édition DVD. Pâlichonne, parfois imprécise, manquant
de contrastes et de couleurs, elle ne saurait concourir avec
les meilleures éditions actuellement sur le marché. A la
décharge toutefois de l’éditeur, le film aligne les
contre-jours et les surexpositions, rendant plus difficile
l’affinement du grain et le contraste appuyé des couleurs.
Résultat : l’ensemble respire la fadeur et ne peut éviter de
temps à autres d’agaçants effets de solarisation.
Côté compression, c’est toutefois du beau travail… néanmoins
facilité par l’extrême simplicité de la réalisation. Le film
est d’ailleurs parfaitement adapté à l’écran d’une télévision
qui rend anodine l’absence « cruelle » d’une authentique
profondeur de champ. Eric Assous ne s’en cache pas. Il a
confiance en le support DVD qu’il a choisi pour rendre
hommage à la construction de « Sexes très opposés ». Ses
points forts sont l’intrigue, les acteurs et les dialogues,
ses points faibles la réalisation !
Sur un écran de télévision, la réalisation de « Sexes très
opposés » semble moins plate. Les scènes gagnent même en
intérêt, en rapidité et en intensité. (cf la scène du suicide
de Cyril ou celle de l’escarmouche entre Fernand et l’ex
petit ami de Vanessa). Quant aux tâches, bruits, coulures et
crénelages… on oublie.
Le son apporte au dévédéphile nettement plus de satisfaction.
Oublions l’encodage en Dolby Stéréo 2.0 qui concentre (et
c’est bien normal) l’ensemble des effets et musiques vers
l’avant pour immédiatement passer au Dolby Digital 5.1
incomparablement plus dynamique et percutant. (cf les scènes
dans le bureau du Proviseur ou encore celles dans les murs de
l’association d’aide à la réinsertion des conjoints
plaqués).
Mouvements de foules, musiques enveloppantes, ambiances boîte
de nuit et répliques hors champ, tout est rendu avec
élégance, précision et nuance. Quant aux voix, elles se
détachent avec suffisamment de clarté pour mettre en valeur
le jeu des intonations et la vivacité des répliques qui (on
ne le dira jamais assez) donnent tout son sel au film.
Certes, « Sexes très opposés » ne dispose pas de la bande-son
nécessaire pour tester pleinement les capacités de votre
installation Home Cinema mais il est tout de même important
de noter les efforts payants de l’éditeur dans ce domaine.
Des efforts trop rares lorsqu’il s’agit de comédies sans
armes et sans effets spéciaux. Pour l’un de ses premiers DVD,
CinéGénération signe un travail de qualité qui mérite d’être
salué.
Excellente projection DVD à toutes et tous !