Le Dernier Empereur (1987) : le test complet du 4K UHD

The Last Emperor

Édition collector limitée - 4K Ultra HD + Blu-ray

Réalisé par Bernardo Bertolucci
Avec John Lone, Joan Chen et Peter O'Toole

Édité par Metropolitan Film & Video

Voir la fiche technique

Avatar Par
Le 23/10/2023
Critique

Cette première édition Ultra HD de la superproduction de Bertolucci nous est proposée avec un excellent choix de bonus, tous inédits.

Le Dernier empereur

En 1908, l’impératrice, la veille de sa mort, nomme son neveu Pu Yi, âgé de 3 ans ½, empereur de Chine, ce qui lui confère un pouvoir absolu sur la Cité interdite, devenue « un théâtre sans public » lorsque Sun Yat Sen fonde la république en 1912. Chassé en 1924 par un seigneur de guerre, Pu Yi mène une vie de playboy à Tientsin où il sympathise avec les Japonais qui feront de lui, en 1937, l’empereur fantoche du Manchukuo, le nom donné à la province chinoise occupée de Mandchourie. Capturé par les Russes, Pu Yi est remis en 1950 aux Chinois qui le jugent criminel de guerre et l’envoient dans un camp de rééducation. Libéré en 1959, il devient jardinier d’un parc botanique de Pékin, jusqu’à sa mort, en 1967.

Le Dernier empereur (The Last Emperor), réalisé par Bernardo Bertolucci en 1987, met en images un scénario ébauché par Enzo Ungari, puis coécrit par Mark Peploe et Bernardo Bertolucci, une adaptation de J’étais empereur de Chine - L’autobiographie du dernier empereur de Chine (1906-1967), publiée en mandarin en 1964, en anglais en 1967 par Skyhorse Publishing sous le titre The Last Manchu: The Autobiography of Henry Pu Yi, Last Emperor of China.

Silenzio… Motore… Action !

Le Dernier empereur

C’est, après 1900 (Novecento) sorti en 1976, l’autre blockbuster réalisé par Bernardo Bertolucci, grâce à l’appui du producteur britannique Jeremy Thomas, et une contribution de l’Italie, Hong Kong et la France. Un budget de 40 millions de livres sterling lui donnait tous les moyens d’une superproduction : un casting de stars, la mobilisation de 19 000 figurants, une profusion de décors et de costumes et le recrutement d’un des plus grands chefs-opérateurs, Vittorio Storaro qui s’était acquis une réputation internationale et ses deux premiers Oscars avec Apocalypse Now en 1980 et Reds de Warren Beatty en 1982. Et, cerise sur le gâteau, il eut la chance unique de pouvoir tourner dans la Cité interdite, peut-être accordée par Pékin par l’entremise d’Enrico Berlinguer, le secrétaire du Parti communiste italien auquel adhérait le réalisateur.

Le Dernier empereur, l’événement cinématographique de 1987, décrocha neuf Oscars, ceux du Meilleur film, Meilleur réalisateur, Meilleure photographie, Meilleure adaptation, Meilleure direction artistique, Meilleurs costumes, Meilleur son, Meilleur montage et Meilleure musique originale.

Le Dernier empereur fut partout chaudement accueilli par la critique et le grand public, comme en France où il attirera pendant toute sa distribution pas loin de 5 millions de spectateurs, sollicités en cette année 1987 par un bon lot de grands films : Full Metal Jacket, Empire of the Sun, Angel Heart, Raising Arizona, Les Ailes du désir, Good Morning Vietnam, Maurice, Le Festin de Babette, Hope and Glory, Au revoir les enfants, Cry Freedom, Pelle le conquérant, Bagdad Café, La Famiglia, Wall Street, Intervista, Cobra Verde, Requiem pour un massacre

Le Dernier empereur

Le choix de l’histoire de Pu Yi présente un double intérêt. D’abord, d’aider à la découverte d’un personnage à l’étrange destin, resté à l’écart du monde pendant toute sa vie, dans une cage dorée pendant son enfance, à Tientsin au milieu d’une jet set futile, dans le rôle d’une marionnette dont les Japonais tiraient les ficelles, puis emprisonné dans un camp de rééducation avant de finir ses jours comme simple jardinier. Ensuite, de nous faire traverser, dans une succession de flashbacks, les remous qui ont agité la planète tout au long de la première moitié du XXème siècle.

Le Dernier empereur se distingue aussi par sa distribution, dominée par John Lone qui s’était fait connaître comme le chef de gang de L’Année du dragon (Year of the Dragon, Michael Cimino, 1985). Il tient là son plus grand rôle en incarnant Pu Yi de l’âge de 18 ans jusqu’à son vieil âge. Le cabotinage de Peter O’Toole s’accorde assez bien au personnage de son précepteur, Reginald Johnston. On note aussi la prestation de Ryūichi Sakamoto, le cruel capitaine de Furyo (Merry Christmas Mr. Lawrence, Nagisa Ōshima, 1983), plus connu pour ses compositions de musique de film, notamment celle du Dernier empereur, saluée par un Oscar partagé avec les deux autres compositeurs, David Byrne et Cong Su. Chez les dames, on remarque surtout Joan Chen qu’on retrouvera, trois ans plus tard, dans l’incomparable série Twin Peaks de David Lynch.

Le Dernier empereur

Présentation - 5,0 / 5

Le Dernier empereur (162 minutes) et ses suppléments (112 minutes) tiennent sur un Blu-ray BD-100 4K Ultra HD. Un Blu-ray BD-50 supporte la version longue (219 minutes) pour la télévision. Les deux disques et un livret sont logés dans un Digipack à quatre volets, glissé dans un étui. Un élégant conditionnement dans les tonalités rouge et or du film.

Le menu propose le film dans sa version originale, l’anglais, avec sous-titres optionnels (un peu gros, mais bien placés en bas du cadre, à cheval sur la bande noire), et dans un doublage en français, les deux au format audio DTS-HD Master Audio 5.1.

Une autre édition est disponible, avec le livret et le même contenu, supporté par deux Blu-ray BD-50.

Le livret de 64 pages, abondamment illustré, s’ouvre sur un bref rappel de la vie de Pu Yi, puis sur la carrière de Bernardo Bertolucci, du premier film qu’il réalisa à 21 ans sur un scénario de Pier Paolo Pasolini qu’il avait assisté pour Accatone, jusqu’au premier jour du tournage dans la Cité interdite autorisé par les autorités chinoises qui avaient rejeté son projet d’une adaptation de La Condition humaine d’André Malraux. Le choix d’un ouvrage dans lequel un « contre-révolutionnaire » notoire reconnaissait ses erreurs leur convenait mieux. Suivent l’élaboration du scénario, la recherche du financement, le recrutement de l’équipe et d’acteurs, parmi lesquels des Chinois parlant anglais, une denrée rare. Le tournage s’étend, du 12 août au 13 novembre 1986 en Chine, d’abord en studio, puis dans la Cité interdite où Bertolucci reçoit des amis, dont Pierre Edelman, puis dans d’autres villes, pour se terminer à Cinecittà le 27 janvier 1987. Le temps du montage, de l’accompagnement musical et de la postproduction empêchera la présentation du film à Cannes et à Venise. Il sera partout accueilli avec enthousiasme par la critique et le public et ressortira en 3D en 2013, puis en 2022 au Festival Lumière dans la version restaurée reprise dans la présente édition.

Ce livret se referme sur L’Enfant sauvage pour qui « la Cité est un jouet et une figure maternelle », sur les différences entre la version cinéma et la version longue, sur Bazar chinois (Curiosités, anecdotes et billevesées) , sur le ratio de l’image et sur la restauration de… 234 347 images !

Très sérieusement documenté, agréable à lire, il a été rédigé par Nicolas Rioult, membre de l’équipe Metropolitan Films.

Le Dernier empereur

Bonus - 5,0 / 5

Présentation du film par Nicolas Rioult (8’). Une évocation de la production, du tournage, trois mois en Chine, trois mois à Cinecittà, du sombre destin de Pu Yi, de la distribution, de l’accompagnement musical.

La version longue du film (1080p, AVC, 2.35:1, 219’) reprend le premier montage du film, restauré, avec les scènes, d’une durée cumulée de 107 minutes, coupées pour ramener le métrage à une durée plus compatible avec les contraintes de la distribution en salles. L’intérêt dramatique et artistique des scènes additionnelles fait de cette version longue un très estimable complément au film.

Le tournage du Dernier empereur (SD, 1.33:1, 62’) Les images inédites filmées par Pierre Edelman, producteur et journaliste à Libération, ont été spécialement montées par Metropolitan Films pour cette réédition du Dernier empereur. La caméra indiscrète (un minuscule caméscope Sony Handycam) a pu se faufiler partout, en tapinois, saisir des moments d’intimité (dont un entretien avec le dernier survivant des 3 000 eunuques de la Cité interdite) et souligner l’importance des moyens techniques mobilisés et la démesure de la mise en scène des séquences tournées dans la Cité interdite avec des milliers de figurants. L’intérêt de ce précieux complément au film compense indiscutablement les faiblesses de l’image et du son !

Émission de radio Microfilms : interview de Pierre Edelman par Serge Daney (1987, 50’). Pierre Edelman,  » un des plus grands fouineurs du cinéma », dans cet entretien curieusement diffusé par France Culture, dès le lendemain de la dernière prise, des mois avant la sortie du film, rappelle qu’il n’a eu aucune difficulté à approcher le réalisateur :  » Bernardo Bertolucci, narcissique, s’offre à l’image ». Il avait en tête l’idée de conquérir Hollywood, pour y réaliser Red Harvest, après cette superproduction, mobilisant plusieurs nationalités, « une tour de Babel ». S’il est resté fidèle aux grandes lignes de l’histoire de Pu Yi, il a libéré ses fantasmes en ajoutant des décors baroques dans le palais impérial et inséré un « érotisme sous-jacent ». Alors que la mise en scène avait été strictement préparée, il apportait des changements à la dernière minute et s’interposait parfois entre la caméra et les acteurs pour dicter leur jeu.

Bande-annonce originale restaurée en 4K (2’41”).

Le Dernier empereur

Image - 5,0 / 5

Une restauration a été opérée pour l’édition Arrow Films sortie aux USA en février 2023 à partir d’un scan 4K du négatif original et un encodage 2160p 4K HEVC - Dolby Vision, HDR10. L’image, au ratio original de 2.35:1, est très propre. La comparaison avec la première édition DVD d’Opening de 2003 révèle un enrichissement et un affinement des couleurs, une explosion des rouges et ors des scènes de la Cité interdite. Exemplaire, le traitement du grain a permis de tirer le meilleur profit du gain de résolution offert par le 4K, sans dénaturer la texture du 35 mm.

La version longue, un montage en série de plusieurs épisodes pour la Rai, après restauration 2K, au format 1080p AVC, ne déçoit pas, bien qu’elle n’atteigne pas le même niveau de résolution et de nuances des couleurs. On relève quelques failles, notamment un scintillement et une hétérogénéité du grain. Des défauts compensés par leur valeur ajoutée de cette version encore inédite en France.

Seule la version cinéma a été prise en compte pour l’attribution de la note.

Le Dernier empereur

Son - 5,0 / 5

Le son stéréo d’origine, remastérisé au format DTS-HD Master Audio 5.1 par Studiocanal à partir des bandes magnétiques, mérite le même satisfecit. Les dialogues sont clairement restitués, et le remixage multicanal donne une plus grande profondeur à l’accompagnement musical et crée une convaincante sensation d’immersion dans l’ambiance des scènes en extérieur ou dans les grandes salles du palais impérial, sans effets artificiels.

Le doublage en français, au même format, propre lui aussi, dans l’ensemble satisfaisant, n’assure toutefois pas le même équilibre entre les dialogues, l’ambiance et un accompagnement musical moins aéré.

Crédits images : © AAA Productions, Hemdale Film, Recorded Picture, Screenframe, Soprofilms, TAO Film, Yanco

Configuration de test
  • Vidéo projecteur SONY VPL-VW790ES
  • Sony UBP-X800M2
  • Denon AVR-4520
  • Kit enceintes/caisson Focal Profile 918, CC908, SR908 et Chorus V (configuration 7.1)
  • Diagonale image 275 cm
Note du disque
Avis

Moyenne

5,0
5
1
4
0
3
0
2
0
1
0

Je donne mon avis !

Avatar
Philippe Gautreau
Le 24 octobre 2023
Cette superproduction saluée par neuf Oscars, en grande partie tournée dans la Cité interdite, resitue le destin peu commun de l’éphémère dernier empereur de Chine dans les remous qui ont agité la planète tout au long de la première moitié du XXème siècle. Une réédition attendue, la première en Ultra HD, enrichie d’un utile livret et de la version longue du film, jusqu’ici inédite.

Lire les avis »

Multimédia
Le Dernier Empereur
Bande-annonce VOST

Proposer une bande-annonce

Du même auteur
(publicité)

(publicité)