Dans son film Signer, Nurith Aviv s’aventure dans un champ peu connu, celui des langues des signes. Ces langues sont diverses, chacune a sa grammaire, sa syntaxe, complexe et riche. Trois générations de protagonistes, sourds et entendants, mais aussi les chercheuses du Laboratoire de Recherche de Langue des Signes de l’université de Haïfa, s’expriment sur des langues qui ont émergé en Israël au siècle dernier, rejoignant les questions chères à Nurith Aviv de la langue maternelle, la traduction, la transmission. Une invitation à élargir notre perception des langues humaines.
Signer est un documentaire réalisé en 2018 par Nurith Aviv, entrée dans l’univers du cinéma comme chef opérateur, notamment de Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma soeur et mon frère… (René Allio, 1976), édité en 2013 dans un coffret de quatre films Histoires de René Allio - Vol. 1), a commencé, parallèlement, à s’engager dans une carrière de documentariste dans laquelle elle porte un intérêt évident aux langues, avec plusieurs films déjà sur ce sujet : Traduire (2001), D’une langue à l’autre (2004), Langue parlée, langue sacrée (2008), et deux courts métrages, Vaters Land (2002) et L’Alphabet de Bruly Bouarbé (2008), tous réunis dans le Coffret Nurith Aviv, sorti par les Éditions Montparnasse en 2011, contenant un livre Une langue et l’autre (128 pages).
Signer montre, même s’il fait une furtive allusion à un langage international, qu’à chaque langue parlée sur la planète correspond une langue des signes. Mieux encore, que s’est créé, à l’intérieur de petites communautés de sourds, dans un village ou dans un quartier, un langage qui leur est propre, qu’ils ont inventé pour communiquer entre eux ou avec leur entourage. Ainsi, en Israël, à côté de la langue des signes « officielle » du pays, l’I.S.L. qui s’est établie dans les années 30, se sont développées d’autres, parmi lesquelles celle de la tribu bédouine d’Al-Sayyid ou encore celle de Kafr Qasem.
Signer évoque l’évolution vers une langue vernaculaire, « Fa », surtout parlée par les jeunes, plus rythmée, plus dynamique, communiquant mieux les émotions, avec sa propre syntaxe, dans laquelle les « signes » du corps et du visage complètent ceux de la main.
Un passionnant documentaire : à l’intérêt des explications fournies par des chercheurs de l’université de Haïfa, s’ajoute l’apport des images, par exemple dans la scène de la conversation de deux enfants entendants avec leurs parents sourds, ou celle de l’improvisation d’un nouveau langage par une troupe de théâtre, un laboratoire où s’invente « une grammaire du corps »… Fascinant !
Signer (60 minutes) et son supplément (8 minutes) tiennent sur un DVD-5, dans sa version originale multilingue, en français, hébreu et anglais, avec le choix entre deux formats, Dolby Digital 2.0 stéréo ou 5.1, avec sous-titres français imposés.
Dans le même boîtier de 14 mm, un DVD-9 sur lequel le film est disponible dans son édition originale multilingue, avec sous-titres anglais, et dans un doublage en hébreu, avec sous-titres hébreux, les deux versions sous les deux formats, DD 2.0 stéréo ou DD 5.1.
Signer en langues (8’). L’actrice Emmanuelle Laborit signe en plusieurs langues, jusqu’à onze, une suite de mots : parler, signer, ciel, bleu, homme, femme, aimer, faire l’amour, etc. Les signes peuvent être assez semblables, par exemple pour « ciel », ou complètement différents d’une langue à l’autre pour « bleu », y compris en anglais britannique et en anglais américain.
L’image (1.78:1) est lumineuse, propre, bien contrastée, avec des couleurs soigneusement étalonnées.
Le son, propre lui aussi, restitue clairement les dialogues et commentaires en français, en hébreu et en anglais. La différence est ténue entre les deux formats proposés, Dolby Digital 5.1 ou 2.0 stéréo : l’image sonore reste centrée sur les voies frontales.
Crédits images : © Éditions Montparnasse